Sylvie Guillaume (PS-Place Publique) : « Les mouvements populistes et nationalistes se sont développés à cause de l’absence de réponses de l’UE »

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Spécial élections européennes 2019 – Vice-présidente du Parlement européen, élue dans l’hémicycle de l’UE depuis 2009, Sylvie Guillaume figure en deuxième position sur la liste « Envie d’Europe » qui réuni le PS, Place Publique, Nouvelle Donne et le Parti Radical de Gauche. Parmi ses priorités pour la prochaine mandature figure le renforcement du rôle du Parlement UE.

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Sylvie Guillaume, à votre avis, compte tenu des mouvements populaires qui sont développés en Europe ces dernières années, l’UE a-t-elle besoin de plus de démocratie  ?

On voit bien que les mouvements populistes et nationalistes se sont développés à cause de l’absence de réponses de l’Union Européenne. Il faut rendre plus visible ce qui est déjà disponible. Il y a une manque de visibilité de la dimension européenne dans la vie quotidienne des citoyens. Puis il y aurait des mesures institutionnelles qui seraient utiles pour faire progresser les choses. Par exemple la lutte contre l’unanimité. Parce que le verrou de l’unanimité comporte des temps de réponse de l’UE trop longs. Je pense aussi qu’il faut agir sur l’initiative législative. Ma liste pense qu’on ne peut pas laisser à la Commission européenne l’initiative législative. On considère que les parlementaires européens sont aussi ceux qui peuvent avoir une bonne connaissance du territoire et des besoins pour avoir cette initiative législative.

 

« Le Parlement européen doit se déplacer, aller sur le terrain, lancer des grandes consultations et des grands dialogues avec les citoyens »

 

Croyez-vous qu’il faille ajouter aussi une « dose » d’initiative législative citoyenne au sein de l’Union Européenne ?

D’abord il faut que les initiatives législative citoyenne – qui existent déjà actuellement – soient améliorées, qu’elles soient rendues plus accessibles. Il faut penser également à des outils différents. Par exemple, les dialogues citoyens organisés par la Commission européenne sont passés complétement inaperçus. Le Parlement européen doit se déplacer, aller sur le terrain, lancer des grandes consultations et des grands dialogues avec les citoyens. Quant aux référendums, c’est une bonne façon de voir les choses, à condition que les questions soient maitrisées parce que les cultures politiques sont différentes dans chaque État.

Justement, vu qu’il y a des sensibilité et des cultures politiques très différentes en Europe, en particulier sur certains sujets, est-il correct de dire que votre liste souhaite « tirer vers le haut » toutes les avancées sociétales ?

On ne peut pas se situer comme prescripteur sans nuances sur ce genre de sujets. Évidemment notre liste souhaite que les avancées soient reprises dans l’Union Européenne mais nous n’avons pas de baguette magique. On ne peut pas imposer ces sujets. L’enjeu pour nous, c’est la conviction de son partage. En effet, il y a des thèmes sur lesquels nous sommes intransigeants. Sur ces sujets nous constatons que les retours en arrière sont dangereux.

L’immigration et la sécurité sont des thèmes inflammables en ce moment. Mais il faut reconnaitre que, dans ces domaines, le bilan UE de ces cinq dernières années est très négatif. Qu’attendez vous de la prochaine mandature du Parlement européen et que souhaitez-vous faire sur ces thèmes ?

En 2015 il y a eu un summum de crises aux frontières extérieures de l’UE  avec l’arrivée de très nombreuses personnes fuyant les guerres et les persécutions. Depuis nous sommes revenus à une sorte de normalité. La réaction de la Commission ou du Conseil, ces dernières années, s’est appuyée sur le fait qu’il y avait une situation de crise humanitaire. Les propositions faites ont pris en compte seulement cet aspect. Donc on a pris des mesures très restrictives. Du côté du Parlement, nous avons essayé, au contraire, de voir les choses sur le long terme, afin d’arriver à l’application d’un régime d’asile commun. Nous avons fait des propositions équilibrées de façon à prendre en compte les nécessités liées à la sécurité mais également les exigences des personnes qui cherchent la protection internationale. Le problème, c’est que tous ces textes approuvés par le Parlement européen, on été bloqués par les gouvernements nationaux. Pour résumer il faut, premièrement, faire baisser d’un ton le débat sur ce sujet. Deuxièmement, il est nécessaire de prendre en considération les textes approuvés et, enfin, arriver à faire des propositions positives en affirmant, par exemple, qu’il y a besoin de voies d’accès légales à l’Union européenne. Car tant que les voies d’accès sont irrégulières, les personnes continueront à mourir.

Pouvez-vous donner des exemples?

Je pense par exemple à des visas humanitaires. Ces outils permettraient aux personnes souhaitant demander l’asile, de le faire dans des projection de l’UE tels que les consulats , en dehors de l’Union. Il y a aussi le regroupement familial qui, pour le moment, est très restrictif et qui mériterait d’être amélioré.

« On voudrait aussi un parcours éducatif universel en matière de culture et citoyenneté européenne »

A propos de la protection de l’environnement et de la lutte contre le réchauffement climatique, beaucoup de citoyens en Europe se disent prêts à agir mais la position de l’UE n’est pas toujours claire. Pensons à l’interdiction du glyphosate…

Il ne faut pas opposer « la fin du mois à la fin du monde », comme on dit en France. L’UE doit agir de façon plus résolue pour soutenir les investissements en matière de transition écologique. Nous soutenons par exemple qu’il faut consacrer 500 milliards d’Euros – qu’on pourrait faire sortir des questions du déficit de 3% – pour avoir une action vertueuse sur le climat. Prenons par exemple les logements. Si on investit pour des logements qui ne sont plus des passoires énergétiques, on a une action directe sur le pouvoir d’achat.

Si vous étiez élue comme députée européenne, prendrez-vous des initiatives en faveur de la culture dans votre prochain mandat ?

Bien sûr ! Par exemple dans le domaine de l’éducation et de la mobilité de la jeunesse, il faudrait faire en sorte qu’on puisse avoir une sorte de « contrat d’apprentissage européen ». On voudrait aussi un parcours éducatif universel en matière de culture et citoyenneté européenne. Puis il y a aussi le thème de l’harmonisation des diplômes et puis il y a soutien à la diversité culturelle et linguistique en Europe.

 


Spécial élections européennes 2019 :
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(photo à la une : Sylvie Guillaume numéro 2 de la liste « Envie d’Europe ». Image libre de droits)

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