David Saada souffle un vent de poésie avec « une vie qui s’envole »

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Dans la vie, parfois, il y a des moments suspendus qui sonnent juste. Au point de sortir du lot et de rester gravé entre les deux yeux. C’est ce que parvient à faire, David Saada, en parlant avec justesse, gravité et poésie du chagrin d’amour, dans son one man show « une vie qui s’envole ».

La salle est toute petite. Petite mais bondée et chaleureuse. Bien plus chaleureuse que les températures actuelles et les informations télévisuelles. Soudainement, les lumières se tamisent, une tête décoiffée et souriante sort du rideau rouge puis disparait. Quelques secondes plus tard, il apparait en entier, seul sur scène, à quelques centimètres du public : David Saada. Et directement, on ne voit que lui. Costaud et grand. On n’écoute que lui. Sa voix puissante et son éloquence.

Il n’y a ni blagues ni rires mais beaucoup de silence et de poésie. Dans ses mots, ses expressions et ses gestes. Encore plus, dans ses messages. David ne perd pas de temps : rapidement, il parle de la beauté et la cruauté de la vie mais surtout de la fragilité des sentiments et de la dureté d’un chagrin d’amour.  Il parle de cet amour qui manque comme on manque d’air, de son absence omniprésente qui prend l’espace de la pièce et de toute cette peine qu’il laisse.  Ecrasante, viscérale, lancinante et brutale.

Un chagrin d’amour et une quête d’identité  racontés avec poésie, gravité et délicatesse

Avec une sincérité déconcertante et un investissement sans borne, David retrace sa propre vie, via le personnage D. : son enfance, son adolescence, sa scolarité, son entrée dans la vie active, son job de prof de sport, sa quête d’identité, son premier amour… et puis le dernier en date. Celui qui est parti violemment, avec perte et fracas, celui qui a soudainement claqué la porte, comme on claque des doigts. Le laissant alors seul dans un appartement trop grand, seul dans un monde manquant de sens. Seul mais pas vraiment… il est accompagné de sa conscience et plus précisément par trois petites voix qui cohabitent difficilement ensemble : la solitude, puis la colère et enfin la suspicion. Quelques étapes d’un chagrin d’amour qui s’apparentent, parfois, à celles d’un deuil. Le deuil de l’être aimé. Le deuil du couple. Le deuil d’un futur qui n’arrivera jamais.

Un scénario émouvant et une mise en scène brillante nommés  aux P’tits Molières

Le scénario est bien ficelé, avec une chronologie précise et des flash-backs aussi pertinents que réussis. Toutes les scènes s’imbriquent entre elles, justes et fluides. Les émotions et les pensées aussi. Alors, c’est à juste titre, que ce spectacle est nommé dans 3 catégories des P’tits molières : « Meilleur seul en scène », « Meilleur auteur » et « Spectacle coup de coeur ».

Avec élégance et pudeur, D. nous invite dans sa vie, dans son intimité, au centre de son chagrin d’amour. Il le fait à cœur ouvert. A découvert. Et parfois, D. n’arrive plus trop à vivre, à supporter et à porter sa douleur alors il se met en retrait et il observe les autres. Dans ces moments-là, qui ponctuent régulièrement le spectacle, la mise en scène est incroyablement bien pensée et puissante : l’éclairage de la salle se tamise, David Saada est éclairé par une simple lumière rouge, il bombe le torse, met sa tête en arrière et s’immobilise. Le spectateur n’entend alors plus que sa respiration et sa voix en fond sonore, enregistrée en amont, qui décrit la vie de ses voisins. Des secondes poignantes, percutantes où le public retient son souffle, ne cligne plus des yeux et écoute avec attention.

Sans conteste, David Saada a un excellent jeu d’acteur. Avec une innocence proche de la naïveté, il sait transmettre ses émotions, ses opinions, ses états d’âme et ses messages. Son but premier n’est pas de faire rire mais de s’exprimer. D’exprimer sa douleur. Son but premier n’est pas de briller sous les projecteurs mais d’exister. Et à travers son existence, grâce à son expérience, de toucher les autres. De les réveiller. De les soutenir. De les secouer. De les prévenir. Oui la vie est belle mais parfois douloureuse, oui l’amour est vital mais peut vous flinguer en plein vol, oui il est possible d’être à bout de souffle au point de penser sauter par la fenêtre mais non ça n’en vaut pas le coup ou pas la peine. Surtout que la peine finit par passer, grâce au temps, grâce aux proches et à ses propres forces. Surtout que la joie de vivre finit par l’emporter sur tous les chagrins, même d’amour.

 


« Une vie qui s’envole »
One man show de David Saada.
A la Comédie des 3 bornes
32 rue des trois bornes – 75011 Paris

tous les dimanches à 20h15.

 

 

 

 


(Crédit photo : Liliana Helena et David Ken)

 

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