Perrichon voyage toujours et… fait escale à Saint Barth!
Par Florence Gopikian Yeremian – bscnews.fr/ Perrichon possède une très jolie fille nommée Pauline. Tandis qu’il passe de tranquilles vacances à ses côtés, deux garçons forts ambitieux commencent à compter fleurette à sa séduisante progéniture. Aussi rusés que perspicaces, les deux jeunes coqs comprennent très vite que pour gagner la main de la belle, il va falloir séduire le père… Une compétition s’installe alors entre l’intellectuel Armand Desroches et l’hypocrite Daniel Savary. L’affaire s’annonce cependant moins simple qu’il n’y parait car le joyeux Perrichon semble être aussi stupide que borné…
C’est avec humour et fantaisie que Gérald Sibleyras réadapte la pièce d’Eugène Labiche: bousculant les lieux et les personnages originels, il rebaptise Henriette du nom de Pauline et lui fait quitter sa capitale parisienne pour aller la déposer sur une plage de Saint Barth. Dans un décor kitsch parsemé de transats et de cocotiers évolue donc la caricaturale famille Perrichon. Avec son crâne dégarni et sa nervosité suante, le gentil papounet est aussi trouillard que naïf: c’est avec un magnifique enthousiasme que le comédien Gilles Gaston-Dreyfus se complait dans la bêtise et la mauvaise foi de son personnage. Jouant les beauf avec beaucoup d’authenticité, il pousse même le ridicule jusqu’à parader sur scène avec des palmes et un bonnet rouge. A ses côtés, Arthur Fenwick incarne flegmatiquement le premier prétendant, Armand Desroches: archétype même de l’énarque, il est agaçant de perfection et de savoir. Paré de son parfait petit polo rouge, il affiche sans cesse une supériorité naturelle que Perrichon abhorre au plus haut point. Dans un style beaucoup plus décontracté, Charles Templon joue la figure du jeune bonimenteur Daniel Savary. Avec ses mensonges et ses simagrées, ce Tartuffe contemporain parvient à embobiner le pauvre Perrichon au point de convaincre ce dernier de lui offrir sa fille Pauline! Le rôle de cette lolita revient justement à la trop sage Linda Massoz : bien que sa partition théâtrale soit courte, cette charmante comédienne devrait d’avantage l’agrémenter car elle demeure trop en retrait par rapport aux autres acteurs. Saluons enfin la mère un brin godiche qui passe son temps à bronzer (Christiane Bopp) ainsi qu’un inattendu juge d’instruction venant burlesquement ponctuer la pièce de ses crises existentielles (Excellent Jean-Luc Porraz!).
Traitant d’orgueil et de vanité humaine, cette comédie de Labiche n’a nullement perdu son propos. En réactualisant sa mise en scène, Philippe Uchan nous livre ici un Perrichon à mi-chemin entre la mesquinerie du Corniaud et la bouffonnerie de Monsieur Jourdain. On regrette cependant que la pièce manque de rythme et ne « démarre » vraiment qu’au deuxième acte : d’avantage de mordant et de causticité rendrait ce spectacle bien plus amusant.
Perrichon voyage toujours? Un léger divertissement qui vous chatouille l’esprit comme une brise insulaire…
Perrichon voyage toujours
De Gérald Sibleyras
D’après Eugène Labiche
Mise en scène Philippe Uchan assisté de Gersende Michel
Avec Arthur Fenwick, Linda Massoz, Charles Templon, Gilles Gaston-Dreyfus, Christiane Bopp, Jean-Luc Porraz
Théâtre La Bruyère
5, rue La Bruyère – Paris 9ème
Du mardi au vendredi à 19h
Samedi en mâtinée à 15h
Réservations: 0148747699
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