Gipsy Song : l’Andalousie, havre d’une fille-mère américaine

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Par Felicia Sideris – bscnews.fr/ Kenzie a 18 ans ; elle est américaine et va bientôt faire sa rentrée à l’université. Après le décès de son père cependant, celle-ci se réfugie dans les bras de son petit ami et tombe enceinte. Malgré le renoncement de son copain à devenir père et les recommandations de sa mère, Kenzie refuse d’avorter. Effrayée par la mauvaise réputation qu’aura sa fille dans le quartier, la mère l’oblige alors à s’exiler en Andalousie jusqu’à l’accouchement, où elle devra ensuite faire adopter son enfant.

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Ce roman est le parcours de cette jeune femme à travers des contrées inconnues, de son isolement jusqu’à sa délivrance. Dans une première partie, Kenzie en veut au monde entier pour ce qui lui arrive et les dialogues avec les habitants se résument à quelques banalités. Mais peu à peu, elle va enfin avoir le courage de faire ses propres choix, d’assumer qui elle est et ce qu’elle veut. C’est une histoire qui ne moralise pas et ne donne pas de leçons, juste un parcours aux allures de voyage initiatique, pour toute adolescente enceinte.
Le roman commence dans les rues de Séville. L’auteur, Beth Kephart, nous plonge directement dans la canicule espagnole qui envahit aussi bien la ville que le ranch dans lequel la protagoniste va vivre durant cinq mois. L’histoire se met en marche tout de suite, avec tous les personnages présentés dès les premiers chapitres : Estela, la vieille cuisinière, Esteban, le mystérieux orphelin qui s’occupe des chevaux et Miguel le propriétaire et l’éleveur fier de ses taureaux. Le lecteur fait connaissance, grâce à des flash-backs, avec la mère avec qui les relations sont coléreuses et avec le père tant aimé. Mais surtout, grâce à un récit à la première personne, on découvre des monologues intérieurs de la jeune fille adressés à son futur enfant, seul lien qui la rattache aux Etats-Unis et à sa vie d’avant, il est autant sa force que sa faiblesse. Les paroles qu’elle lui adresse sont remplies d’émotions, de douceur, et le lecteur compatit pour cette jeune maman perdue et sans emprise sur les événements. Kenzie va évoluer au fur et à mesure que les jours passent, s’ouvrir à ces gens si différents et grandir, loin de chez elle. Avec une lecture rythmée par les sons du flamenco et les mélodies des guitares grattées par les gitans festifs, l’auteur embrasse l’Andalousie en nous offrant un panorama de sa culture et de ses traditions. On est ainsi agréablement surpris par l’image et les sensations que la lecture provoque. Ce n’est pas une description touristique, mais bien un voyage à travers les contrées du Sud de l’Espagne que propose l’écrivaine. On se retrouve plongée dans une chaleur écrasante dans laquelle les rues ombragées de Séville permettent aussi bien au lecteur qu’à Kenzie de prendre un moment de répit. C’est à travers les rencontres et la découverte de la culture espagnole, que l’adolescente va grandir, mûrir, jusqu’à être une femme complète et capable de choix et fermeté. Pourtant, le lecteur n’évolue pas avec elle. On n’arrive pas à s’attacher à cette femme dont on ne sait rien. Elle fait de la peine, car elle est enceinte, on l’aime bien car elle est humaine et sensible mais à aucun moment donné on ne s’identifie à elle. Sauf pour les lecteurs qui ont déjà eu un enfant, très probablement une minorité puisque le roman est à destination des adolescents, aucun caractère de sa personnalité ne pousse à sympathiser avec elle. Kenzie apparait comme une « femme porteuse » sans profondeur psychologique. Malgré le fait qu’elle semble très sensible, on ne sait rien de ses passions et de ses loisirs, ce qui tend à la rendre fade, à faire disparaître son humanité qui était pourtant agréablement mise en place lors de ses discussions avec son foetus. On ne sait rien non plus des protagonistes qu’elle rencontre, on s’attend à ce que le mystère se lève mais les révélations sont moindres. Ils sont uniquement des prétextes culturels, médias d’une leçon de connaissances hispaniques.
Tandis que le début offre un agréable voyage dans l’ambiance du sud de l’Espagne, la fin échappe à l’auteur qui donne l’impression d’avoir survolé l’histoire. Dommage.

Gipsy Song : Le choix de Kenzie
De Beth Kephart
Date de parution : Février 2014
Editeur : La Martinière Jeunesse
Prix : 13,90 €
Dès 15 ans

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