Quand Ettore Scola raconte Federico Fellini: un hommage nostalgique d’un maître à l’autre

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Par Florence Gopikian Yérémian – bscnews.fr/ Cela fait déjà vingt ans que Federico Fellini est mort. En cette date anniversaire, Ettore Scola est repassé derrière la caméra afin de rendre un hommage cinématographique à son ami et mentor. Le temps d’un film, il retrace avec une tendre ironie le parcours du grand maître depuis son premier emploi dans un journal satyrique jusqu’à son cinquième Oscar hollywoodien, en 1993.

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L’histoire débute dans les années 40, sous l’aspect d’un documentaire tourné en noir et blanc. Federico Fellini vient de quitter sa ville natale de Rimini et débarque à Rome en quête de carrière. Ses premiers pas le mènent devant la porte du grand hebdomadaire Marc Aurelio qui l’engage comme dessinateur humoriste. En pleine période mussolinienne, cette équipe éditoriale évite toute allusion politique afin de ne pas s’attirer des ennuis avec le Duce. Derrière leurs hypocrites « saluts romains », les journalistes ne se privent cependant pas de croquer le monde et ses défauts avec beaucoup de cynisme. C’est dans ce contexte ouvert à la création et à la pertinence que Fellini fait la connaissance du jeune Ettore Scola. De huit ans son cadet, il est également humoriste et s’intéresse beaucoup aux coulisses du 7e art. De cette rencontre nait alors une très grande amitié qui durera près de cinquante années.
En se basant sur ses souvenirs personnels, Ettore Scola passe en revue ces décennies pleines de complicités et d’exubérances. Avec tendresse et nostalgie, il pose un regard poétique sur la fantaisie de Fellini et nous fait partager les fugues nocturnes du Maestro au sein de sa grosse voiture : curieux du monde et des petites gens, Federico y ramassait des prostitués et toutes sortes d’âmes à la dérive afin de converser avec elles et oublier ainsi ses insomnies. De ces rencontres étranges sont certainement nés la plupart des extravagants personnages des ses films : ambulants, miséreux, artistes itinérants… Cette mosaïque humaine est sans nul doute sortie de l’imagination du cinéaste mais elle émane surtout de la vie de bohème et de l’humus quotidien dont il s’est nourri. En mettant cela en avant, Ettore Scola porte non seulement une très belle réflexion sur la création artistique mais il le fait avec beaucoup de poésie. L’une des scènes du film met ainsi en scène un jeune peintre de rue dessinant au sol un splendide Saint Nicolas. Lorsque l’on demande à cet artiste d’où vient ce dessin et s’il n’a pas peur que la pluie efface tout son travail, il explique avec ferveur que l’art ne doit se concevoir que comme un besoin vital et que l’inspiration peut quant à elle, provenir de partout… A l’exemple de ce peintre, la créativité de Fellini n’a jamais eu de règle, il est capable de chercher sa muse dans la rue, dans l’alcool, auprès des femmes… En véritable vagabond baroque, il aime mélanger le rêve à la réalité, les décors de stuc aux paysages naturels… Si ses films ont eu tant de succès c’est qu’il a osé y parler de tout sans aucun tabou : le sexe y côtoie la religion, la beauté se mêle au difforme, le lyrisme au burlesque et l’ensemble de son oeuvre foisonne à la fois d’allégresse et de mélancolie. Fellini est un mensonge à lui seul, voilà pourquoi on le nomme encore aujourd’hui « le Grand Pinocchio » du cinéma italien!
Le film de Scola possède un peu de cette démesure extravagante propre aux réalisations de Federico. A travers cette myriade de documents d’archive, d’extraits de la Strada ou de conversations avec Marcello Mastroianni, on a l’impression d’avoir soudain retrouvé l’ambiance du carnaval Fellinien et l’on se rend compte, qu’à nous aussi, il nous avait manqué!

Qu’il est étrange de s’appeler Federico: Scola raconte Fellini
(Titre original: Che strano chiamarsi Federico: Scola racconta Fellini)
Un film d’Ettore Scola assisté de Paola et Silvia Scola
2013 – Italie, 96 min
Avec: Tommaso Lazotti, Giulio Forges Davanzati, Maurizio de Santis, Giacomo Lazotti

Au cinéma le 9 juillet 2014

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