La vie rêvée des profs : une caricature tout juste distrayante
Par Mélina Hoffmann – bscnews.fr/ C’est bientôt l’heure de la rentrée des classes au collège Pablo Neruda de Sucy-en Brie. Sept professeurs se retrouvent dans la salle des profs pour la fameuse réunion de pré-rentrée où s’apprête à être discuté LE problème crucial de ce début d’année, à savoir : faut-il commander des criteriums avec ou sans gomme…!
Il faut dire que le ton était déjà donné avec l’affiche de la pièce et sa boîte (d’1 kilo !) de ‘Medoxil’ (toute ressemblance avec un anxyolitique bien connu n’étant absolument pas fortuite) en guise de pot à crayons (crayons aux mines cassées et stylos aux capuchons machouillés précisons-le). Vous l’aurez compris (ou ça ne saurait tarder), il y a de la caricature dans l’air… Aussi, si vous êtes prof et/ou que votre sens de l’autodérision est limité, mieux vaut passer votre chemin et sécher cette réunion. Car, dans cette salle de classe ou nous nous trouvons infiltrés comme nous en avons souvent rêvé enfant, les professeurs ne sont pas franchement montrés sous leur meilleur jour. Le proviseur aux manières bourgeoises nourrit secrètement des rêves de livres à succès et de prix littéraires tandis que le prof de sport arrive en survêtement, chronomètre autour du cou et esprit un peu borné. La prof d’arts plastiques est une charmante jeune femme aux airs un peu bohème dont est plus ou moins secrètement (et finalement plutôt moins que plus) amoureux le professeur de physique chimie… Il y aussi le nouvel assistant brésilien avec sa verve métaphorique, son énergie débordante et ses blagues douteuses. Quant à la prof de français et de latin, de retour après deux ans d’arrêt maladie, n’en parlons pas ! Ou plutôt si, parlons-en, car s’il est bien un personnage qui sort du lot et capte notre attention d’un bout à l’autre de la pièce, c’est celui-ci ! Psychologiquement fragile et bourrée de tics, elle incarne à elle seule, et avec beaucoup de drôlerie, les clichés les plus courants à l’égard des profs…Mention spéciale à la comédienne Solène Rossignol donc, qui nous offre ici une interprétation particulièrement travaillée et sincère de son personnage, au point qu’on en vient même à se demander si les tics gestuels qu’elle lui prête ne sont pas vraiment les siens !
Au fur et à mesure que la réunion progresse et malgré les efforts de chacun pour communiquer dans le respect et la courtoisie, les tensions commencent à apparaître, les fantasmes émergent, les failles et névroses de chacun se révèlent d’une façon parfois surprenante et déroutante, et le malaise grandit…
Au final, une pièce assez déjantée, drôle et taquine, dans laquelle les comédiens s’amusent au fil des changements de rythmes qui peuvent parfois perdre un peu le spectateur. Une sorte d’arrêt sur image plutôt qu’une pièce d’ailleurs, car il n’y a pas vraiment d’histoire, de trame. Le spectateur se retrouve simplement dans les coulisses d’une réunion de pré-rentrée. Dommage que certains personnages ne soient pas davantage creusés, comme celui du prof de maths androgyne dont la présence en devient presque obsolète. De même, certaines scènes traînent en longueur sans apporter d’intérêt particulier à la pièce – voire même en suscitant un léger malaise – notamment dans la seconde moitié du spectacle. On ne s’ennuie pas dans cette salle des profs, mais pas sûr qu’on en garde un souvenir impérissable.
La vie rêvée des profs
Par Les Soirées Plaisantes
Avec Moustafa Benaïbout, Louise Coldefy, Johann Cuny, Guarani Feitosa, Roman Kossowksi, Julien Lecannellier et Solène Rossignol.
Au Théâtre la Boussole
Du mercredi au samedi à 21h ; le dimanche à 18h
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