Mac Beth sous les soleils des printemps arabes
Par Laurence Biava – bscnews.fr/ Le Tarmac dans le 20ème arrondissement de Paris, le 28 janvier avait fait salle comble pour la première représentation de Mac Beth de Shakespeare, librement adapté par Lofti Achour metteur en scène tunisien. Avec lui, Shakespeare a trouvé un étrange écho sous les soleils des printemps arabes. Mac Beth et sa lady sont devenus Ben Ali et sa Leila, une triste commère de Tunis, mégère bien mal apprivoisée. Tous deux forment un couple diabolique enfermé dans sa déraison mais contrairement à leurs aînés élisabethains, nullement torturés par les remords.
« La meilleure façon de respecter Shakespeare, cet immense novateur, était de le trahir et de chercher notre propre voie » dit le metteur en scène.. En effet, le projet d’adaptation semble plus lié à la notion de pouvoir et rien d’autre. Donc, trahir l’œuvre Mac Beth. Mais tout en en gardant ce qui fait sa singularité : sorcières « fatalité » de son propre destin, parts irrationnelles, sang, fantômes, enfermement et solitude du pouvoir. Toutes ces choses liées au pouvoir et sa folie à toutes les époques, même les plus rationnelles en apparence, comme la nôtre.
On sait combien l’auteur anglais compte pour Lofti Achour. C’est le seul auteur qui lui a donné l’impression quand il l’a découvert, qu’il s’adressait au plus profond de lui, et ce, au-delà de toute spécificité culturelle. On parle beaucoup d’universalité dans le monde de l’art de la littérature, mais c’est rarement aussi vrai et incarné que dans l’œuvre de Shakespeare. Et en travaillant une œuvre de cet auteur et en essayant de l’adapter à la langue arabe, Lofti Achour, qui ne s’est pas posé la question du lien entre l’Angleterre et la Tunisie, ni entre les époques, confesse avoir été sidéré par la proximité des deux langues, et notamment leur capacité à être, toutes deux au même moment, à la fois dans le plus poétique et le plus trivial.
Cet aspect du texte avait d’ailleurs beaucoup touché le public tunisien, qui aime en général que le théâtre soit constamment à double niveau de sens. Tout comme le public parisien également très touché ce soir-là par ce trio d’artistes tunisiens, « enfants de la médina de Tunis », investis d’une mission souveraine, dérangeurs et dérangeants, par leur théâtre musical, cette comédie des horreurs, où se sont mêlés les mots et les notes. Une belle réflexion sur le pouvoir, et un travail intéressant sur la « confiscation » originale de Shakespeare.
Une belle réussite, une grande performance d’acteurs. Encore bravo !
Mac Beth
– Shakespeare
Spectacle musical et théâtral d’après Macbeth de Shakespeare
Mise en scène : Lotfi Achour
Adaptation : Lotfi Achour, Anissa Daoud, Jawhar Basti
Direction musicale et chansons : Jawhar Basti
Avec Moncef Ajengui, Jawhar Basti, Anissa Daoud, Noomen Hamda, Riadh Larousse, Mariem Sayeh, Walid Soltan
Dates des représentations:
Du 28 janvier au 7 février 2014 au Tarmac – Paris 20ème
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