Perthus: l’envol des fils, le désarroi des mères

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Par Julie CadilhacBscnews.fr/ Deux fils, deux mères : quatre hommes pour interprêter les rôles de Marianne, Irène, Jean-Louis et Paul. Quatre acteurs aussi touchants que justes. « Nous avons fait une première lecture avec deux actrices dans le rôle des mères. Et puis nous avons essayé de faire jouer les mères par des hommes. Paradoxalement, c’était plus réaliste.  » ( Gilbert Désveaux).

Dans une petite ville de province, se rencontrent deux femmes par l’intermédiaire des seuls sujets qui leur apportent satisfaction et consolation : leurs fils. Deux mères éprouvées par les changements qui s’opèrent au lycée pour leurs progénitures. Marianne, ayant accepté de fermer les yeux sur les escapades de son mari pour des raisons de confort bourgeois, répond en mère traditionnelle en réprimant l’homosexualité naissante de son fils Jean-louis. Irène, dont le conjoint s’ébat quotidiennement avec sa secrétaire, se comporte en mère moderne et compréhensive qui accepte l’amour de son fils Paul pour ce Jean-Louis prodige. A l’heure des amitiés amoureuses, des enfantillages, deux garçons se heurtent à la question de grandir et ,forcément ,de choisir. Sur le plateau, simplement des chaises, étranges par leur format atypique. Des chaises en bois qui rappellent les bancs d’école mais en même temps des sièges trop grands pour les personnages, des sièges qui mettent dans l’inconfort les adultes aussi bien que les enfants.

Si le texte de Jean-Marie Besset nous touche, c’est qu’il aborde avec subtilité les tabous familiaux. Les personnages brossés ne sont pas caricaturés et on ne blâme pas Marianne de vouloir faire de son fils une désolante réplique de son père, carriériste et désintéressé de son épouse. Non, Marianne n’est pas montré du doigt comme l’intolérante ou l’égoïste qu’il faut accabler. C’est une écriture qui ôte le poids de la culpabilité même si elle montre les responsables…peut-être parce que les coupables sont aussi des victimes et que dans le cercle vicieux des héritages familiaux, on ne sait plus quand la machine a commencé à dérailler…Perthus est un morceau de destin, vivant, qui vibre, rit, pleure sous nos yeux et respire dans l’amour fervent du délicat Paul pour Jean-Louis. Perthus parle à chacun de nous, au delà des différences, et les problèmes des quatre protagonistes s’universalisent, ne s’appellent plus simplement : accepter l’homosexualité de son fils, supporter l’infidélité de son mari, tolérer la perversité d’une mère, comprendre la trahison d’une soeur….non, Perthus nous parle de compromis, d’aveuglement, de renoncement, de lâcher prise, de lâcheté(?) -qui n’est peut-être, en définitive, que le nom sali que la société actuelle donne au courage de pardonner-. Perthus montre la vie dans tout ce qu’elle a d’insupportable et pourtant, on en sort plutôt léger tellement les êtres vivants arrivent à force de solidarité, d’amour et d’humour à la rendre supportable. Savoir montrer avec des mots simples cette réalité-là est déjà l’empreinte d’un texte dramaturgique à saluer. On regrettera simplement la présence des deux premiers monologues de Marianne et Irène ,un peu factices, où l’on se dit que le spectateur n’a pas besoin de ce portrait de deux femmes dont il a déjà compris les préoccupations. La pièce offre cependant de délicieux dialogues où s’orchestrent en consonances charmantes humour et tendresse, franchise et pudeur, anecdotes historiques et déclarations amoureuses. La mise en scène porte toute l’attention sur le jeu des comédiens et en applaudissant la direction d’acteurs , on félicitera également Alain Marcel, Laurent Spielvogel, Sylvain Dieuaide et Brice Hillairet pour leur interprétation pertinente et sensible.

Perthus.Une pièce où l’on aurait tort de ne voir qu’une croisade pour la tolérance et contre l’homophobie. Une pièce qui parle de la difficulté de devenir un être adulte, un être qui s’assume avec ses complexités et ses différences et tâche d’accepter l’autre tel qu’il est.

Titre: Perthus

Auteur: Jean-Marie Besset

Mise en scène: gilbert Désveaux

Avec Alain Marcel, Laurent Spielvogel, Sylvain Dieuaide, Brice Hillairet

Durée: 1h40

Au Théâtre des 13 vents du lundi 7/02 au vendredi 11/02 : Réservez ici!

Le 11 février à 20h30, une grande soirée de théâtre au profit de l’association Le Refuge, seule structure en France, conventionnée par l’Etat, à proposer un hébergement temporaire et un accompagnement social, médical et psychologique aux jeunes majeurs victimes d’homophobie. Prix de la place: 30 euros pour contribuer au développement des structures du Refuge.

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