Ce soir, je vais au théâtre

par
Partagez l'article !

Le Bal de Kafka

de Thimoty Daly
Mise en scène de Isabelle Starkier
Du 13 février au 15 mars 2008 à 20h30, (relâche lundi et mardi), dimanche à 17h
Théâtre de l’Opprimé, 78 rue du Charolais Paris 12
Réservations : 01 43 40 44 44

Partagez l'article !
Voilà un petit moment de bonheur théâtral accessible à tous et c’est rare. Isabelle Starkier a su tisser dans la dentelle l’imprégnation des différents niveaux de l’imaginaire et de la réalité d’un écrivain. La pièce de l’auteur australien Thimoty Daly raconte de manière originale et ingénieuse la courte vie de Franz Kafka, rongé de l’intérieur dès 1917 par une pneumonie. Il raconte l’incomunicabilité de l’artiste avec sa famille, les fiancailles presque incongrues avec Felice Bauer. Franz lui aurait dit que si elle voulait partager le reste de sa vie avec lui ce serait une vie monastique avec un homme agité, mélancolique, silencieux, insatisfait et maladif. Il s’est d’ailleurs fiancé avec elle à deux reprises, avant de rompre définitivement. Si Thimoty Daly a dédoublé le récit de la vie de Kafka en faisant vivre alternativement à Franz des scènes de ce qui aurait pu être son quotidien, retransposant ensuite ces morceaux de vie dans les « conventions » du théâtre Yiddish, Isabelle Starkier a eu l’idée géniale d’ajouter une dimension supplémentaire en faisant écrire, réécrire, redire, lire par Franz à ses parents « La Métamorphose ». Kafka est ainsi cerné par son imaginaire, fuyant de tous côtés le bon sens bête de sa famille et de sa fiancée, poussant jusqu’à l’extrême la description de la vermine intérieure qui le ronge au travers de son célèbre roman et retrouvant dans l’apprentissage des règles du théâtre Yiddish un doux et sincère retour à des sentiments plus simples, exprimés directement, visuellement. Le masque amplifie d’ailleurs cette impression. Grâce à la vision que donne Isabelle Starkier du théâtre Yiddish, on ne sombre jamais dans la caricature mais bel et bien dans la respiration, dans l’apaisement du malheureux Kafka, paquet de souffrance et de désir, éberlué en permanence par son propre destin. Le décor lui-même est un « pousse à l’imaginaire » des spectateurs. Il s’agit tour à tour d’une table immense, d’un tréteau de théâtre, d’une rue, d’un passage, d’un intérieur ou d’un extérieur. La forme en perspective désaxée tourne d’une scène à l’autre nous transportant tout naturellement dans toutes ces dimensions. On ne sait plus où est le réel. Le spectateur est donc confronté à l’art de la transposition. Rien n’est imaginaire. Tout est vie, vision intime que nous grossissons ou amoindrissons à la loupe de nos sensations. Les comédiens, aussi bien Sébastien Desjours dans le rôle de Kafka que Anne Mauberret en petite soeur, Erika Vandelet en maman, Philippe Millat-Carus en père et Anne Leguernec en fiancée (bien plus jolie que la véritable fiancée de Kafka), sont sincères, même, quand ils jouent les acteurs qui jouent…

FLORENCE CAMOIN

Laissez votre commentaire

Il vous reste

0 article à lire

M'abonner à