L’italienne de Jean-François Sivadier : la Traviata comme si vous étiez, ou presque !
Le metteur en scène nous immerge – littéralement – au cœur d’une répétition grandeur nature de la Traviata. Jubilatoire !
Passons de l’autre côté du miroir pour nous retrouver sur la scène puis dans la fosse d’un opéra : c’est dans ces lieux d’habitude inaccessibles au quidam que nous sommes invités à « vivre » cette Italienne, scène et orchestre. Et le public joue un rôle majeur : il est tour à tour chœur et orchestre pendant les répétitions d’une improbable et délirante Traviata. « Italienne », dans le jargon de l’opéra, c’est la toute première rencontre sur scène entre ces deux groupes, piliers du processus créatif.
Au « Printemps des Comédiens », le spectacle était joué dans le magnifique écrin de l’Opéra Comédie de Montpellier : d’emblée, nous pénétrons dans le terrier et suivons ce lapin blanc personnifié par un ensemble de comédiens foutraques que l’on croirait sortis du conte de Lewis Caroll ! En suivant le dédale qui mène aux répétitions – et donc au spectacle – nos yeux s’écarquillent. L’Opéra d’or et de velours nous apparaît sous un jour nouveau. Entrent en scène d’inénarrables personnages avec qui nous faisons rapidement connaissance. Nicolas Bouchaud dans le rôle du metteur en scène a bel et bien des allures de chapelier fou. Sans chapeau certes, mais c’est un compliment !
Car cet Italienne de Jean-François Sivadier doit aussi sa réussite à une écriture ciselée et à des comédiens malicieux qui nous prennent à témoin de répétitions tournant au vinaigre. Dès lors, les comiques de situation, qu’ils soient liés aux incidents techniques ou aux comportements des personnages, s’enchaînent sans temps morts. De la neige (bleue !) tombe sur scène comme une fiente de pigeon ; l’actrice-technicienne, toujours éberluée, fait des chutes trop « jouées » ; la diva collectionne les accoutrements improbables et les exigences douteuses ; la pianiste est d’une désinvolture désopilante : l’hilarité prend ses quartiers du début à la fin. Et tenir 3h30 de représentation à ce niveau est assez remarquable.
Le spectacle lui-même a été créé il y a vingt ans : s’il est peu joué, c’est que la jauge est limitée et que l’on imagine la mise en place du dispositif loin d’être aisée. D’où, aussi, une certaine sensation de privilège de pouvoir s’en délecter. Par son association de textes enlevés, de prestations pimentées et de décors gourmets, Italienne scène et orchestre est absolument délicieux.
Italienne scène et orchestre
Texte et mise en scène : Jean-François Sivadier
Avec : Nicolas Bouchaud, Marie Cariès, Charlotte Clamens, Vincent Guédon, Jean-François Sivadier, Nadia Vonderheyden
Collaboration artistique : Véronique Timsit
Son : Jean-Louis Imbert
Lumière : Jean-Jacques Beaudouin
Régisseur général : Laurent Lecoq
Production de la création : Théâtre National de Bretagne – Rennes et Compagnie Italienne avec Orchestre | Avec le soutien de l’Adami | Production de la reprise : MC93 – Maison de la Culture de Seine-Saint-Denis et Compagnie Italienne avec Orchestre | Coproduction : Festival Printemps des Comédiens – Montpellier, Festival Paris l’été | Avec le soutien du Ministère de la culture et de la communication | Les textes « Italienne avec Orchestre » et « Italienne scène et orchestre » sont publiés aux Éditions Les Solitaires Intempestifs.
Prochaines dates :
Du 9 au 28 juillet 2018 au MC93 à Bobigny dans le cadre du Festival Paris l’été
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(Photos : ©Alain Dugas)