«Maintenant, nous sommes quittes» ? Le «plan Marshall» de Heiko Maas pour reconstruire les États-Unis…

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Le « plan Marshall » de Heiko Maas pour reconstruire les États-Unis et sauver la démocratie
Tribune de l’historien David Engels

Ne cessera-t-on jamais de s’étonner ? L’Allemagne d’après-guerre, longtemps soucieuse de se concentrer sur ses affaires intérieures, avant tout économiques, et de faire preuve d’une certaine retenue dans toutes autres questions, surtout de politique étrangère, se place une fois de plus à la tête d’une « grande idée ». Maintenant, il ne s’agit de moins de rien que de la défense de la « démocratie », qui – on est fier d’avoir tiré les leçons de son histoire – ne peut évidemment être menacée que par la « droite ». Ainsi, depuis quelques années, et avec toute la minutie allemande, tout ce qui ressemble, de près ou de loin, à des idées conservatrices est désormais impitoyablement disqualifié d’antidémocratique et combattu avec un tel acharnement, qu’il faut se demander pourquoi la démocratie a encore besoin d’ennemis alors qu’elle a de tels défenseurs….

Le fait que ce soit précisément le parti « chrétien-démocrate » d’Angela Merkel qui s’est transformé en fer de lance de la mise en œuvre d’un programme que l’on ne peut qualifier que d’écolo-socialiste n’est guère dépourvu d’une certaine ironie : promotion de l’immigration de masse, banalisation de l’avortement et de l’euthanasie, transition énergétique mal conçue, lois de censure des médias sociaux, paranoïa climatique, lois sur l’islamophobie, promotion de l’agenda LGBTQ, démantèlement de sa propre industrie automobile, dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie, destruction de la classe moyenne, financement public croissant des principaux médias – il est stupéfiant de voir à quel point la CDU et, avec elle, une grande partie de la bourgeoisie allemande ont glissé vers la gauche. Et si l’on considère que nombre de ces mesures sont à la limite – ou devrais-je dire au-delà – de la légalité constitutionnelle (comme la révocation du président de l’Office pour la protection de la Constitution, le briefing régulier des principaux médias par la Chancellerie, les représailles permanentes contre l’AfD, la répétition d’élections démocratiques politiquement incorrectes comme en Thuringe, ou l’instrumentalisation du pouvoir judiciaire pour des raisons politiques), les critiques allemandes de l’état de la démocratie dans les pays Visegrad comme la Pologne ou la Hongrie paraissent quelque peu surréalistes.

Ces derniers jours, les événements aux États-Unis n’ont fait que renforcer ces tendances, et il est à craindre que les prochains mois – nous sommes, après tout, dans une année électorale cruciale pour l’Allemagne – verront un resserrement encore plus important de ce virage à gauche du gouvernement allemand et de sa lutte contre toutes les aspirations conservatrices, tant au niveau national qu’international. Il est difficile de trouver les mots pour décrire tout le mauvais goût dont l’ancien ministre de la Justice et actuel ministre des affaires étrangères, Heiko Maas, a fait preuve lorsque, ce 9 janvier 2021, il s’adressa, par Twitter interposé, au nouveau président américain Joe Biden avec les mots suivants : « Nous sommes prêts à travailler avec les États-Unis sur un plan Marshall commun pour la démocratie. » Le message est clair : à l’issue la Seconde Guerre Mondiale, les États-Unis ont aidé l’Allemagne dévastée économiquement et moralement à revenir dans le monde civilisé ; maintenant, en 2021, c’est à l’Allemagne et au nouveau « leader du monde libre », comme Obama avait désigné Angela Merkel, d’éduquer les États-Unis à la démocratie – ou, avec d’autres mots : « Maintenant, nous sommes quittes ! » Et après que l’arrogance stupéfiante de cette déclaration eût été prudemment critiquée même dans les médias allemands, Maas ajouta une couche supplémentaire d’oubli historique lorsque, deux jours plus tard, il compara implicitement les ruines de l’Europe dévastée par Hitler aux États-Unis après le départ de Donald Trump, en tweetant : « Joe Biden aura les mains pleines pour nettoyer les décombres laissées de Trump. Il est aussi dans l’intérêt de l’Europe que cela réussisse. Nous sommes prêts à apporter un soutien actif. »

Ces déclarations et bien d’autres du même genre que l’establishment politique allemand s’est permises ces dernières années seraient en fait plus comiques que tragiques si elles n’avaient pas un effet immédiat sur la réalité politique ; et non seulement celle de l’Europe en général et de la Pologne et de la Hongrie en particulier, où l’ingérence allemande dans les affaires politiques intérieures a atteint un triste sommet depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Non, même en Allemagne, la possibilité de s’exprimer librement se trouve massivement restreinte non seulement par le contrôle quasi exclusif de la gauche et des écologistes sur une « presse de qualité » dépendant de plus en plus des subventions gouvernementales, mais aussi par des lois de censure et de dénonciation sans précédent depuis la chute de la RDA. Là aussi, Heiko Maas avait donné le « bon exemple » avec son intraduisible « Netzwerkdurchsetzungsgesetz » voté en 2017 : les opérateurs des médias sociaux sont désormais tenus pénalement responsables de la publication de prétendus « discours de haine » sur leurs plateformes et donc obligés de supprimer massivement les déclarations politiquement défavorables (ce qui signifie en clair que, depuis lors, les messages islamistes et d’extrême gauche ne sont pratiquement plus contestés, alors que ceux ayant un contenu conservateur sont systématiquement supprimés).

Cette loi fort controversée va maintenant être encore renforcée. Les commentaires dits « haineux » doivent non seulement être supprimés, mais aussi transmis à l’Office fédéral de police criminelle, qui doit alors pouvoir accéder aux données privées des auteurs afin d’engager des poursuites pénales. Cette loi de dénonciation avait été temporairement suspendue à l’été 2020, malgré son adoption par le Bundestag, en raison de sérieux doutes émis par la Cour constitutionnelle fédérale ; aujourd’hui, cependant, les chefs des groupes parlementaires CDU et SPD soulignent que son adoption serait plus urgente que jamais afin de défendre la démocratie allemande, compte tenu du prétendu « assaut » du Capitole américain – les problèmes constitutionnels devant être réglés « plus tard » au moyen d’une vague promesse de législation complémentaire (probablement après les élections…).
Ce que l’on entend par « discours de haine » est facile à deviner dans l’Allemagne actuelle : à savoir toutes les positions politiques qui se situent à droite de l’idéologie écolo-socialiste actuelle. Un autre événement de ces derniers jours a montré à quel point la banalisation de l’extrême-gauche a progressé entre-temps à l’est du Rhin. Le « Centre fédéral pour l’éducation politique », depuis de nombreuses années un rocher de solidité démocratique, explique désormais sur son site : « Extrémisme de gauche : derrière lui se cache une foule de positions et d’attitudes partiellement contradictoires. Contrairement à l’extrémisme de droite, les mouvements socialistes et communistes partagent les idées libérales de liberté, d’égalité, de fraternité – mais les réinterprètent à leur manière. » En d’autres termes, Lénine et Staline étaient en fait des libéraux dans l’âme, et le véritable danger pour les droits de l’homme ne peut venir que de la « droite ». Pas étonnant que le gouvernement allemand alloue maintenant 1 milliard d’euros (!) à la « lutte contre la droite ». On cherchera en vain des moyens même approximativement comparables pour la « lutte contre la gauche » dans son budget.

Considérant que la France expérimente actuellement une attaque de la liberté d’expression similaire, si l’on se souvient de la tristement célèbre et très critiquée « Loi Avia » d’été 2020, et que la Commission européenne accueille et approuve bien sûr ces « lois contre la haine » comme actes courageux pour la défense de la démocratie, on ne peut qu’envisager avec beaucoup de pessimisme l’avenir de la liberté d’expression dans une Europe où l’UE, les États-nations et les médias sociaux travaillent main dans la main non seulement pour supprimer, mais même pour criminaliser les positions conservatrices.
Le gouvernement polonais, en revanche, vient d’annoncer qu’il allait rendre la suppression intempestive de commentaires sur les médias sociaux punissable en tant que restriction de la liberté d’expression et créer son propre tribunal pour la liberté d’expression. Quel État voyou antidémocratique….

 

1 – https://www.tagesschau.de/investigativ/ndr-wdr/hasskriminalitaet-gesetz-101.html

2 – https://www.tagesschau.de/inland/deutschland-hass-kriminalitaet-101.html

3 – https://www.bpb.de/politik/extremismus/linksextremismus/

4 – https://www.bundesregierung.de/breg-de/aktuelles/kabinett-rechtsextremismus-1819828

5 – https://www.vie-publique.fr/loi/268070-loi-avia-lutte-contre-les-contenus-haineux-sur-internet

6 – https://www.heise.de/newsticker/meldung/Netz-DG-EU-Kommission-begruesst-deutsches-Vorgehen-gegen-Hate-Speech-3740069.html

7 – https://polandin.com/51388314/justice-minister-announces-online-freedom-of-speech-bill

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