Edward Hopper: une réalité seconde derrière le jeu des apparences

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Par Albine Dufouleur – Bscnews.fr/ Edward Hopper, le génie du paradoxe. Ses toiles témoignent d’une construction méticuleuse de l’image tout en exposant un vide saillant, un espace immense et terrifiant.

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Bien qu’inondées d’une lumière éclatante, elles laissent deviner un paysage obscur, une réalité seconde que le spectateur décode derrière le jeu des apparences. La présence de personnages n’empêche pas l’irruption d’un silence pesant qui tonne la désillusion de la vie. Ils restent immobiles, encastrés dans la représentation sociale qui leur est assignée. Les airs mélancoliques qui figent les visages des différents protagonistes font contraste avec les gammes de couleurs si vives. Le réalisme devient noir et l’isolement des personnages certain. Dans « Shop Suey» de 1929, la communication semble comme étouffée entre ces deux femmes nostalgiques qui siègent pourtant dans un café, lieu d’échanges, de vie, de débats. Le couple, l’enfermement, la liberté et le temps sont autant de thèmes qui nourrissent les toiles ici exposées.
Illustrateur, graveur et aquarelliste, Edward Hopper est un artiste aux influences diverses. Ses multiples séjours parisiens expliquent sa fascination pour les grands maîtres que sont Rembrandt et Watteau ainsi que pour le mouvement impressionniste d’Albert Marquet. Très tôt, son professeur, Robert Henri, l’avait également initié aux techniques réalistes dérivées de l’impressionnisme d’Edouard Manet lorsqu’il étudiait à la New-York School of Art en 1900. Avant de se consacrer aux mutations sociales qui traversent les Etats-Unis, Hopper est un inconditionnel admirateur des paysages européens ou des scènes parisiennes qui donneront lieu à diverses aquarelles comme « Lighthouse hill » en 1929. L’Europe restera longtemps dans l’esprit de l’artiste une niche d’inspiration exaltante, qui n’a rien à envier au continent américain : « A mon retour, tout m’apparaissait terriblement grossier et vulgaire. Il m’aura fallu dix ans pour me défaire de l’Europe ». Une exposition ficelée, cohérente qui éclaire le parcours inédit de ce peintre et rassemble ses principales huiles sur toile, témoins d’une époque, reflets d’une société aliénée par un individualisme féroce. La dernière toile que le visiteur observe « Sun in an empty room », créée en 1963, est saisissante : Hopper s’efface et laisse le soleil inonder cette chambre vide, d’une netteté aussi fascinante que glaciale. Un chef d’œuvre.

Edward Hopper ( 1882-1967) – Exposition présentée au Grand Palais – Paris

Du 10 octobre 2012 au 28 janvier 2013

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