Jean-Michel Gravier : le plaisir de retrouver les années 70-80
Par Laurence Biava – bscnews.fr/ Jean-Michel Gravier est revenu malgré lui sur le devant de la scène au printemps dernier avec la publication de toutes ses chroniques éditées aux Editions Ecriture par Arnaud le Guern. Jean-Michel Gravier était un personnage inclassable. Il était journaliste, écrivain de pièces de théâtre, très touche à tout, électron libre, et surtout talentueux. Dans sa rubrique au Matin de Paris, le quotidien socialiste de l’époque, il racontait dans « elle court, elle court, la nuit » tout ce qu’il voyait, tout ce qu’il vivait. Avant, il y avait moins de contrôle, moins d’interdit. On pouvait écrire tout ce qu’on voulait. Avec ce livre, on retrouve cette époque des années 70-80, dont nous sommes, tous imprégnés. Un charme nostalgique des années 80 rode ici, et toute cette effervescence du night-clubbing d’antan est bien traduite avec ce Monsieur Gravier qui écrit comme il parle.C’était l’époque où tout le monde sortait avec tout le monde.C’est le récit somptueux d’une époque, d’une nuit parisienne. Ses chroniques deviennent vite cultissimes, tout le monde en parlait, on se téléphonait pour les commenter. Jean-Michel Gravier racontait le continent disparu de notre jeunesse insouciante.
Ce n’est pas tant le côté paparazzi mais c’est une plume, un instantané de cette période des années 70/80. On peut le déplorer : cette rencontre n’existe plus, cette nuit n’existe plus, tout le monde s’entremêlait, tout le monde se cotoyait sans barrières. Cet art d’écrire aussi, a changé. De fin 1978 à 1982, Jean-Michel Gravier signe chaque semaine la chronique la plus drôle et la plus classieuse de toute la presse : « Elle court, elle court, la nuit » dans laquelle il expose ses agacements et ses emballements. Les papiers sont piquants et piqués au vif, emballants, aériens, alertes, sans façon, et aussi mondains. Au fil de ses quatre colonnes, défile tout le show-biz et le gratin d’une époque : Lagerfeld, Deneuve, Johnny, Adjani, Gainsbourg, Sagan, Dewaere, Coluche, Vartan, Berger, Caroline de Monaco….Pour être in en août à Paris, il suffit parfois de venir travailler pour que la rubrique se remplisse. Lundi dernier, c’était grande révolution rue Hérold : Claire Clouzot tournait chez nous (chez elle), une scène importante de son premier film : L’amour avec deux M – , produit par un tout nouveau producteur, Edouard de Blanzy. Ce tournage, c’est déjà un événement. L’autre scoop, c’est que Françoise Lebrun, ex-héroïne intello/Sciences-Po du cinéma français, s’est faite un nouveau look aussi sophistiqué que populaire. Oui, la dame en photo, lèvres sang et pâleur tonique, c’est l’ancienne héroïne trouble des films de Jean Eustache.
Elle court, elle court, la nuit
Jean-Michel Gravier
Editions Ecritures
364 pages- 23,00 EUROS
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