«Rebibbia» : un voyage initiatique au cœur de l’univers carcéral féminin

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Dans cette adaptation théâtrale du roman autobiographique de l’écrivaine Goliarda Sapienza – « L’université de Rebibbia » – on découvre, par le prisme de l’héroïne, l’univers carcéral féminin dans la prison de Rebibbia, située à Rome.

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L’obscurité laisse peu à peu la place à une lumière colorée qui apparaît par couches successives, au fil de rencontres qui nous livrent des portraits de femmes aussi tragiques, que lumineux, poétiques, émouvants ou drôles, mais surtout vivants.

Ombres et lumières

Tout commence dans le noir le plus total, on se saisit de l’angoisse de l’héroïne, de sa solitude surtout. Elle est seule en scène, avec pour unique compagnie le « non-bruit » terrifiant de la prison. Même lorsque la lumière paraît, celle-ci reste froide et n’éclaire que très faiblement… On découvre les états d’âme de Goliarda, incarnée par Prune Beuchat, au travers d’un long monologue. C’est la seule fois qu’elle parlera autant, car au fur et à mesure c’est elle qui se met à l’écoute des femmes qu’elle rencontre.

Quatre autres comédiennes (Magali Bonat, Nine de Montal, Pauline Vaubaillon, Charlotte Villalonga) investissent la scène en alternant les personnages : une jeune femme enceinte, une toxicomane, une intellectuelle, une starlette, une activiste… La prison n’est qu’un microcosme de la société mais devient du fait de l’enfermement un lieu d’observation privilégié.

Plus on découvre ces femmes dans leur intimité, plus la lumière se fait présente sur la scène, on découvre que ce monde n’est pas si sombre, car la vie reprend le dessus au cœur des chagrins, des tragédies et des drames. On devient les explorateurs des cœurs de ces femmes à la fois singulières et communes. Visuellement, les couleurs, absentes au début de la pièce, jaillissent progressivement jusqu’à se propager totalement sur la scène. Goliarda apprend au contact de ses compagnes d’infortune à colorer la grisaille de son existence.

 

Une mise en scène intimiste

Louise Vignaud fait le choix pour sa mise en scène d’une scénographie relativement épurée, avec un décor, à base d’échafaudages et de lavabos collectifs, qui suggère la prison plus qu’il ne la décrit véritablement.

Le son est travaillé précisément pour nous immerger dans l’ambiance d’un univers carcéral cinglant qu’il restitue parfaitement bien. Par intermèdes sont projetées des vidéos livrant les témoignages bouleversants de ces femmes de Rebibbia. Elle racontent leurs crimes mais surtout leurs histoires.

Ces femmes incarcérées se voient aussi contraintes de partager leur intimité, une scène en particulier illustre complètement cette impudeur forcée : toutes les comédiennes se dévêtissent entièrement au moment de faire leur toilette aux lavabos. Aucun voyeurisme, c’est une plongée au cœur de leur vulnérabilité.

« Rebibbia » est, si l’on se laisse porter, un voyage initiatique menant de la solitude à la rencontre, de l’enfermement à la liberté, des ténèbres à la lumière, de la souffrance à la résurrection. A découvrir avec beaucoup d’intérêt.


« Rebibbia »TNP – Théâtre National Populaire de      Villeurbanne-Lyon
8 place Lazare-Goujon 69627 Villeurbanne cedex
Du mercredi 14 au vendredi 30 novembre 2018

Mise en scène de Louise Vignaud
Avec Prune Beuchat, Magali Bonat, Nine de Montal, Pauline Vaubaillon, Charlotte Villalonga

D’après L’Université de Rebibbia de Goliarda Sapienza – Adaptation : Louise Vignaud et Alison Cosson – Ecriture : Alison Cosson – Scénographie : Irène Vignaud – Vidéo : Rohan Thomas – Son : Clément Rousseaux – Costumes : Cindy Lombardi – Lumières : Luc Michel – Production : Compagnie La Résolue – Coproduction : Théâtre National Populaire (Villeurbanne), Théâtre du Vellein (Villefontaine), Le Grand Angle (Voiron), Scène Nationale de Sète.

(Crédit photos : Rémi Blasquez)

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