Matthias Vincenot : « une rencontre d’arts et de regards »

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Par Eric Yung – bscnews.fr/ Aujourd’hui, la poésie semble mal aimée du grand public. Est-ce parce que chacun d’entre nous se remémore –plus ou moins- des souvenirs scolaires au temps où la récitation était au programme des classes primaires ?

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Est-ce parce que la poésie était synonyme d’angoisse tant il était rare d’échapper à son professeur pour déclamer debout, le corps raide, quelques strophes de Verlaine tels que celles ci : « Il pleure dans mon coeur, comme il pleut sur la ville ; Quelle est cette langueur qui pénètre mon coeur ? » ou celles d’un Baudelaire voyant par sa fenêtre une femme passer lorsque « la rue assourdissante autour de moi hurlait, Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse, Une femme passa, d’une main fastueuse, Soulevant, balançant le feston et l’ourlet »… Peut-être, sûrement même ! Mais était-ce une raison suffisante pour délaisser Erato, la muse des poètes ? Non, bien sûr. D’ailleurs, il semble bien que le sonnet, l’alexandrin ou et l’acrostiche attirent de nouveau une jeunesse qui est toujours en quête de merveilleux.

Ainsi Matthias Vincenot avec son recueil de poèmes intitulé « Les Choses qui Changent » nous parle avec talent « de ses paysages intérieurs », de ce phénomène qui nous trouble parfois et qui nous interroge pour savoir qui change… Est-ce « les choses » ou « nous » ? On se laisse emporter par ce petit livre publié chez « Mine de Rien », une maison corrézienne « qui édite de beaux livres » et qui, pour une fois, est sorti de son sentier battu pour faire paraître ces poésies illustrées par des photographies signées Pascal et Nicolas Rabot. « Les choses qui changent » est un ouvrage doucereux et si les poèmes qui y sont contenus nous emmènent, bien entendu, dans l’univers du poète Vincenot, il nous trimballe aussi dans les méandres de notre mémoire. Ainsi, moult objets que l’on croit connaître depuis toujours ne nous apparaissent plus tels qu’ils sont, les paysages se figent pareil à une photographie comme pour nous dire « souviens-toi de l’instant ». Le dernier recueil de Matthias Vincenot pourrait, sans aucun doute, s’appeler au bonheur des mots tant l’illogisme devient sensé comme seul c’est l’être un imaginaire de poète. Prenons, par exemple, « Fantaisie maritime » un poème illustré d’un cliché montrant une femme dont l’ombre de sa silhouette s’étire sur le sable… Pour en apprécier les strophes il convient de le lire à voix haute. Ainsi : « Tes yeux sont bleus Comme la mer Et la mer elle ressemble à ton chapeau, C’est énervant, la mer Ca bouge trop Et les bateaux C’est triste, sur le port A midi Et la mer Sans les bateaux, c’est triste, Aussi Mais tes yeux qui sont bleus ressemblent à la mer Alors, la mer je la regarde sur ton chapeau ». Ou encore, ce joli poème titré « Le train du hasard » et qui nous dit que « Des rails, Où parfois un train passe Ferraille Qui envahit l’espace qui n’a pas l’habitude Un train en cache un autre, mais ici pas souvent Il y a juste l’herbe caressée par le vent Et parfois Deux ou trois fois dans la semaine Peut-être moins Une carcasse fait son chemin C’était avant, c’était demain. » « Les choses qui changent » est (comme nous le dit la 4° de couverture) plus qu’un recueil de poésies : c’est « une rencontre d’arts et de regards ».

« LES CHOSES QUI CHANGENT »

de MATTHIAS VINCENOT / Editions Mines de Rien.

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