« Hommes de l’avenir, souvenez-vous de moi » (*)

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Par Marc-Emile Baronheid – bscnews.fr/ Robert Sabatier (1923-2012) tenait chronique des travaux et des jours de sa vie. Orchestré par Jean-Claude Lamy, l’essentiel nous parvient comme un cadeau à retardement et console de bien des tombereaux de mesquineries posthumes. Ce qui frappe d’emblée : la parfaite adéquation entre l’homme et son œuvre, une entreprise au long cours où l’intuition poétique a tôt dépassé la spéculation philosophique.

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Un rêve vaut mieux que deux mirages. Ce sont les premières années de la vie d’un jeune homme, la rencontre de la déroutante Christiane Lesparre ( elle n’a pas « fréquenté » pour rien Ambrose Bierce), des connivences intellectuelles, des amitiés indéfectibles, un itinéraire professionnel, un cheminement humain, des drames, des bonheurs, des incertitudes, des aveux de timidité « En présence de jolies femmes, ma voix, sans que je le lui ordonne, prend des accents de violoncelle ». Nulle acrimonie dans ces pages. Le regret, parfois, de sympathies qui s’estompent. La douleur de perdre des compagnons de route. La douceur de Saint-Geniès, Capoue des Sabatier-Lesparre qui, comme à Paris, font bureau à part et oeuvrent dans une émulation farouche.
Robert Sabatier « pèse » quarante volumes, dont la suite connue sous le titre « Le roman d’Olivier », qui lui a valu notoriété et fortune. C’est aussi – surtout, dit-il – une prodigieuse Histoire de la poésie française, 9 volumes d’analyse et d’admiration, et une œuvre poétique considérable, à la réception de laquelle il était très sensible, au point de ressentir à chaque fois l’anxiété du néophyte. Il faut aller absolument à ces textes de facture limpide – on peut parler à leur propos de ligne claire de la poésie – qui portent un questionnement profond, angoissé, nimbé de ce sens du merveilleux qui irrigue sa production romanesque. Robert Sabatier ne s’est jamais consolé de la disparition de sa mère quand il avait onze ans. Il portait en lui une blessure si profonde que seule la littérature pouvait parfois la tenir en respect.
« Il y a si longtemps que je cours après moi-même ! Vais-je enfin me rattraper ? »
Au revoir l’Ami. Et merci …

«

Je vous quitte en vous embrassant bien fort – Mémoires »

, Robert Sabatier ; précédé d’une Lettre à Robert Sabatier, par Jean-Claude Lamy. Albin Michel, 29 euros
(*) Guillaume Apollinaire

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