L’affaire de la rue de Lourcine? Un vaudeville qui trempe « drôlement » dans le quiproquo

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Par Florence G.Yérémian – bscnews.fr/ Suite à une belle nuit d’ivresse, le rentier Lenglumé se réveille avec un inconnu bien éméché dormant dans son lit. D’abord apeuré, il tente de se rappeler les évènements de la veille mais c’est peine perdue: plus rien ne lui revient de sa beuverie nocturne si ce n’est la perte de son parapluie.

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Le second larron ouvre les yeux: il se nomme J. Mistingue, chef cuisinier. Les deux hommes se sont rencontrés au repas organisé par l’institution Labadens dont ils étaient jadis élèves. Tandis qu’ils échangent de fausses politesses, les deux compères se rendent soudain compte que d’énormes taches de charbon couvrent leurs mains. La femme de Lenglumé fait alors irruption avec un article de journal annonçant: « Ce matin, rue de Lourcine, le cadavre d’une jeune charbonnière a été trouvé horriblement mutilé… Les meurtriers, en état d’ébriété, ont laissé sur place un parapluie vert et un mouchoir gravé J.M ». Pris de panique, Mistingue et Lenglumé courent se laver les mains: sont-ils vraiment les coupables de cet assassinat? Pour l’instant, rien ne le prouve…

Cette comédie d’Eugène Labiche est entièrement basée sur une suite d’abracadabrants quiproquos. Menée comme une enquête frénétique, elle enchaine les pièces à convictions et les accusations fallacieuses. Persuadés d’être les auteurs du meurtre de la charbonnière, Mistingue et Lenglumé vont s’employer à faire disparaître toute trace de ce crime quitte à tuer quelques quidam supplémentaires.
La mise en scène de ce puzzle théâtral signé Yann Dacosta se déploie autour d’un immense lit circulaire. Au fil de la représentation, cette alcôve va se changer en salle à manger pour finalement laisser place à une véritable fontaine d’eau propice à laver les pêchers des deux principaux protagonistes.
C’est à Guillaume Marquet que revient le rôle du frêle Mistingue. Aussi soupçonneux que naïf, ce pique-assiette ne cesse d’arpenter la scène en se cachant derrière ses bretelles. Dans un registre beaucoup plus corpulent, le comédien Benjamin Guillard incarne avec excès le personnage de Lenglumé: transpirant d’angoisse dans son beau costume de satin, il s’agite, vocifère et offre aux spectateurs une performance très physique. Autour de ce grand guignol fiévreux déambule aussi Justin, son domestique (Pierre Delmotte). Arborant une peau aussi blanche que son veston est noir, ce serviteur geignard a l’allure d’un oiseau de mauvais augure. Apparaissant et disparaissant derrière les multiples portes du plateau, il demeure impassible face au branle-bas de combat qui anime l’hôtel particulier de son maître. Il en va de même pour Norine, l’épouse de Lenglumé: interprétée avec vivacité par Hélène Francisci, elle fait preuve d’une sublime étourderie et semble ne rien comprendre à tout ce qui se trame chez elle. Bien trop préoccupée par ses bigoudis ou son épilation, cette grande bourgeoise apporte une petite tornade d’effronterie et de fraicheur féminine au sein de cette maison du crime. Reste enfin Potard (Jean-Pascal Abribat), le brave cousin de famille: froussard comme pas deux, il est craquant de bêtise et n’hésite pas à parader en petite culotte ou dans un ridicule costume vert.
Vous l’avez compris, l’ensemble de ces comédiens ont décidé d’aborder ce désopilant vaudeville sur le mode le plus burlesque possible. Au fil de leurs complots et de leurs jérémiades, ils parviennent à entretenir un suspense morbide tout en faisant rire les spectateurs. Sur fond de meurtre et d’alcool, une étrange paranoïa se répand ainsi dans toute la salle au point de rendre complètement fous les deux supposés assassins. Leur psychose finit d’ailleurs par en faire de véritables frères ennemis prêts à s’étriper: sortant les haches et les couteaux, ils termineront leur prestation en pataugeant hystériquement au milieu de la fontaine.
L’affaire de la rue de Lourcine? Une pièce chantante et frénétique portée par de talentueux musiciens et un beau duo de scélérats!

L’affaire de la rue de Lourcine
Texte d’Eugène Labiche
Mise en scène: Yann Dacosta
Avec Jean-Pascal Abribat, Pierre Delmotte, Hélène Francisci, Benjamin Guillard, Guillaume Marquet et les musiciens Pauline Denize et Pablo Elcoq.

– Au Théâtre 13 / Seine
30 rue du Chevaleret – Paris 13e
M° Bibliothèque F. Mitterrand

Jusqu’au 15 février 2015
Mardi, jeudi et samedi à 19h30
Mercredi et vendredi à 20h30
Dimanche à 15h30
Réservations: 0145886222

1H15 sans entracte
Conseillé à partir de 8 ans

Tournée :

– 2 avril 2015: Théâtre Roger Barat – Herblay (95)
– 9 et 10 avril 2015 : La Gallia Théâtre – Saintes (17)
– 21 avril 2015: Le Rive Gauche – Saint-Etienne du Rouvray (76)
– 19 mai 2015 : Théâtre des Chalands – Val-de-Rueil (27)

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