Chat en poche: un vaudeville à miauler de rire!
Par Florence Gopikian Yeremian – bscnews.fr/ L’hiver dernier, le metteur en scène Henri Lazarini nous avait régalés d’un succulent Feydeau au Théâtre 14 (Occupe-toi d’Amélie). Pour ce printemps, c’est au tour de sa sœur, Anne-Marie Lazarini de nous offrir un vaudeville un brin plus pondéré du même auteur: Chat en poche.
Comme toujours avec Feydeau, l’intrigue est simple mais efficace : Pascarel, un commerçant parisien bouffi d’orgueil souhaite voir briller son nom en haut de l’affiche. Pour ce faire, il invite chez lui le ténor bordelais le plus couru du moment afin que ce dernier interprète un opéra composé par sa fille. L’artiste flatté, prend ses aises dans la demeure de son amphitryon qui lui propose même un salaire régulier de 3500 francs! Seulement voilà : il y a erreur sur la personne car Pascarel a payé son ténor « chat en poche » ! L’invité est bien de Bordeaux mais il ne sait absolument pas chanter ! Il s’agit, en fait, du jeune Dufausset, le fils d’un ami venu faire ses études dans la capitale…Le malentendu s’installe : non content de profiter des biens de son hôte, ce benêt de Dufausset s’entiche aussi de Marthe, sa séduisante épouse. Il faut dire que cette bourgeoise esseulée ne cesse d’affrioler le jeune homme avec ses sourires en coin et ses yeux de biche. A ses côtés, une amie de longue date nommée Amandine croit aussi être l’objet des désirs de Dufausset. Laissant jaillir ses frustrations amoureuses de vieille rombière, l’obtuse Amandine ne fait qu’amplifier l’intrigue qui gagne merveilleusement en verve et en saveur !
A l’exemple de l’étonnant décor penché de François Cabanat, tout va de travers dans cette maison de fous ! Les dialogues sont à la limite du non sens, les mensonges s’accumulent à chaque réplique et les personnages vont de méprise en méprise. La mécanique d’Anne-Marie Lazarini est parfaitement rodée et servie par un beau plateau de comédiens. Professionnels et généreux, ils se laissent vivre sur scène et sont d’une décontraction contagieuse. Égal à lui-même, Cédric Colas (Dufausset) s’amuse à jouer les naïfs impertinents. Souple et onctueux comme une guimauve exquise, il se coule parfaitement dans son rôle d’étudiant fumiste et profiteur. Face à cet attachant nigaud amoureux, la belle Frédérique Lazarini (Marthe) a déployé son irrésistible arsenal de séductrice. Cheveux lâchés et regard de braise, elle se régale à interpréter les fausses ingénues. Sensuellement burlesque comme une chatte en mal d’amour, elle séduit toute l’assistance en ronronnant la bouche en cœur et le popotin vaillant. A côté de cette simili-prude, Sylvie Pascaud (Amandine) est d’un contraste détonnant. Aussi opulente que la colonne Vendôme dont elle ne cesse de parler, elle fait preuve d’une autodérision et d’une gaucherie savoureuse! Pas farouche pour un sou, elle est en permanence à côté de la plaque et nous offre une caricature tonitruante de vieille rombière libertine !
Les époux de ces dames manquent un peu d’entrain, quant aux jeunes de la pièce, ils possèdent un phrasé et un comportement trop modernes pour des amoureux du XIXe siècle. Quoi qu’il en soit, l’ambiance est aussi pétillante et acidulée que le mobilier de cette demeure de doux dingues où, à défaut de pouvoir pousser un contre Ut, le jeune Dufausset finira par épouser la fille de la famille.
Une folie douce aux entrechats encore un peu timides. Nul doute qu’au fil des représentations, la troupe gagnera en audace et fera exploser ce joli coup de Ténor!
Chat en poche
De Georges Feydeau
Mise en scène : Anne-Marie Lazarini
Avec : Jacques Bondoux, Cédric Colas, Giulia Deline, David Fernandez, Frédérique Lazarini, Sylvie Pascaud et Dimitri Radochévitch
Théâtre Artistic Athevains
45bis, rue Richard Lenoir – Paris 11ème
M° Voltaire
À partir du 4 mars 2014
Mardi 20h30, jeudi 19h, vendredi et samedi 20h30
Samedi 16h et dimanche 15h
Réservations: 0143563832
Du 10 novembre 2015 au 23 janvier 2016
Au Théâtre Artistic Athévains
45 bis, rue Richard Lenoir
Paris 11e
Métro Voltaire
Reprise du 14 novembre au 31 décembre 2014
A lire aussi:
BASH : un triptyque de la violence ordinaire
La maladie de la mort : une quête hautement métaphorique où le numérique prend une place de taille
La tragédie du belge ou l’amour absurde
Un barrage contre le Pacifique : Marguerite Duras ad nauseam