Übü Kiràly : l’humour gras, l’absurde et la provocation ceints de finnois et de papier

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Par Julie Cadilhac – bscnews.fr /Crédit-photo : Biro Istvan / Übü Kiràly est une version hongroise d’Ubu Roi d’Alfred Jarry qui ne manque pas d’originalité et d’humeur rigolarde : créée en décembre 2011 au Théâtre hongrois de Cluj, on a le plaisir d’entendre le texte dans cette langue finno-ougrienne qui charme l’oreille du spectateur tant sa typologie agglutinante et son harmonie vocalique enrichissent encore de sens le texte – même si l’on n’en connaît pas un mot puisque le spectacle est surtitré en français!

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Alain Timàr a imaginé une version inventive ,à l’esprit potache, de l’histoire de cet Ubu, veule et cruel, qui, aux côtés de son épouse arriviste et manipulatrice, fait un coup d’Etat, prend la place du roi et lance à tout va des mesures arbitraires dont l’objectif satisfait le plus souvent sa vénalité. La pièce d’Alfred Jarry, même pour un spectateur qui ne conçoit plus qu’un tyran puisse un jour régner avec un « machine à décervelage » et une « pompe à phynances », produit toujours un rire jaune et étonnamment, l’épouvantable famille Ubu inquiète, même lorsqu’elle est grimée de franche rigolade et de distanciation. Aussi, en dépit de la volonté esthétique du metteur en scène de briser l’illusion en montrant sur scène les humeurs des comédiens, la confection des costumes et des décors, le mal ne quitte pas le plateau et ,au milieu des rires, ne lâche pas son flambeau, comme une menace. On applaudira d’abord l’extraordinaire inventivité des costumes de papier qui sont créés sous nos yeux : froissées, coupées, tordues, on reste épaté de ce qu’il est possible de faire avec un justaucorps et de grandes bandes de papier! On saluera ensuite l’énergie qui règne sur le plateau et les trouvailles de mise en scène drolatiques qui insistent sur les rapports scabreux qui lient les protagonistes principaux. On dira cependant que la pièce pourrait faire l’économie de quelques minutes car il y a des flottements inutiles – notamment dans les déplacements – ou des intermèdes musicaux qui finissent par lasser quand on n’est pas adeptes des cuivres. De plus, la nymphomanie de Mère Ubu et l’explosion de testostérone du Capitaine Bordure, par trop d’insistance, perdent à la fin de l’intérêt. Il aurait été plus intéressant , semble-t-il, que les « défauts » de Mère Ubu se volent la vedette à qui mieux mieux au cours de la pièce. On en garde cependant une impression globalement positive, beaucoup d’acteurs sont truculents et l’on conseille la pièce pour sa singularité attrayante et son impressionnant défilé de costumes éphémères!

Ubu roi d’Alfred Jarry


Mise en scène et scénographie: Alain Timár
Version hongroise sur-titrée
Avec 
Pères Ubu : Bogdán Zsolt , Dimény Áron , Farkas Loránd , Keresztes Sándor ,Szűcs Ervin ,Váta Loránd

Avec Mères Ubu : Albert Csilla , Györgyjakab Enikő , Kató Emőke , Laczó Júlia , Skovrán Tünde , Varga Csilla
Régie technique : Kerezsy Imola, Györffy Zsolt
Vidéo : Captation vidéo réalisée par CASPEVI, le site de diffusion d’extraits vidéos du spectacle vivan
Crédit photo : © Istán Biro
Co-production : Théâtre Hongrois de Cluj (Teatrul Maghiar de Stat Cluj) – Roumanie / Théâtre des Halles – Avignon – France 
Coréalisation : Athénée Théâtre Louis Jouvet

– Au Festival d’Avignon Off 2013 Du 6 au 28 juillet 2013 – Relâche le 17 au Théâtre des Halles – Salle du Chapitre à 
11h – Durée 1h50

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