DAF Sade – quand la luxure se joue à Montmartre
Par Soisic Belin – bscnews.fr/ Donatien Alphonse François Marquis de Sade prend place au Ciné théâtre XIII dans les sommets reculés de Paris. Dans la petite salle de ce coquet théâtre, Pierre-Alain Leleu redonne vie à l’homme le plus sulfureux de France. Son nom résonne toujours comme un appel à la luxure…
Sade, le sadisme, et d’ailleurs aller voir cette pièce, en est-ce? Et bien non, loin de là. Un décor d’une sobriété toute monacale (assez paradoxale, je vous l’accorde) mais nous sommes en 1784 et le marquis vient d’être transféré à la Bastille après six années passées à la prison de Vincennes. La solitude le ronge et ce n’est pas pour plaire à son geôlier préposé Lossinote( Jacques Brunet): il est son seul rapport avec la réalité. Pierre Alain Leleu ,de par son texte et son interprétation, et Nicolas Briançon,de par sa mise en scène, nous donnent à voir ce qui se trame dans la tête du vil marquis. Son rapport avec le sexe est rigide, le plaisir ne doit se transmettre que par la souffrance, les rapports aux parents et aux rôles qu’ils sont censés jouer vis à vis de leur progéniture découlent de ce fait de la forme prise lors de l’acte sexuel. L’homme est actif, il devra dès lors recevoir un amour entier de la part de ses enfants, contrairement à la femme qui subit et ne pourra donc réclamer aucun amour légitime de la part de son fils ou de sa fille (y aurait-il du Freud avant Freud?). De son imagination, Sade nous livre une femme (tantôt Justine, tantôt Juliette), belle et endiablée (Dany Verissimo), elle est sa conscience et le jouet de son esprit fougueux. Sade était-il superstitieux? Celui de Nicolas Briançon est obsédé par les chiffres, calcul du nombre de barreau, du nombre de lignes dans les lettres qu’il reçoit… déduction hallucinante, paranoïa. La religion n’est jamais très loin de cet esprit dérangé mais intellectuel. Car que l’on aime ou pas les écrits du Marquis, il restera malgré tout une part incontestable de notre patrimoine littéraire, où la langue règne et joue de ses rondeurs pour parler de sexualité débridée. La reprise des textes de Sade n’a rien à envier au très médiatique Cinquante nuances de Grey*, et les jeux d’acteurs sont tout à fait corrects, pour ne pas bouder son plaisir et venir découvrir cette pièce qui se la joue modeste.
* roman (sous forme de trilogie) parut aux Éditions Lattès.
D.A.F Marquis de Sade
Une pièce de Nicolas Briançon
Au Ciné 13 Théâtre1, avenue Junot 75018 Paris
Du mercredi au samedi à 21h30
Le dimanche à 17h30
Relâche : lundi et mardi.
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