François Morel : un bourgeois félé à la cour zélée
Par Julie Cadilhac – bscnews.fr/ Monsieur Jourdain est aussi « félé » que fat et les mises en scène contemporaines lui rendent honneur à cet égard. « Monsieur Jourdain est un naïf au caractère enfantin. Il est aussi autoritaire et vaniteux » ; en sa compagnie, on perçoit tout le ridicule du bourgeois à prétentions mais également la férocité du monde à l’égard des sots car « l’artifice ( final) aura raison de lui ». Dans une mise en scène loufoque et pertinente, Catherine Hiegel a mêlé la substantifique saveur du théâtre du XVIIème, l’indémodable « classique » – costumes, décors, notes de Lully- à une espièglerie toute contemporaine.
Côté distribution? François Morel et son indéfectible air de plaisantin incorrigible donne au personnage du marchand de tissus toute sa dimension cocasse. Alain Pralon est un excellent maître de philosophie. L’épouse et la fille, dont le jeu véhicule l’image classique de la femme soumise malgré quelques rebuffades, convainquent moins un public du XXIème habitué aux femmes plus libérées. Quant aux maîtres de musique, de dan(che) et d’armes, ils sont plaisants ; Covielle et Nicole forment un couple complémentaire qui fonctionne, Cléonte séduit par sa jeunesse et la vigueur de ses emportements.
Avant l’entracte, un manque de rythme parasite certaines scènes; la disparité de portée des voix fatigue la concentration et fait palir le jeu de certains interprètes. Tout tarde à se mettre en place, les effets de comique sont parfois avortés, la diction s’avère souvent empressée (et donc inaudible); les déplacements enfin sont un peu brouillons, dans les scènes de danse notamment. A l’entracte, on sort ainsi hésitant, charmé à la fois par certaines trouvailles charmantes de mise en scène, les costumes et masques de nez, ou encore la présence du « Maître Deschien » mais un peu sur notre faim… Mais dans la seconde partie, la pièce, alors truffée de clins d’oeil à l’Histoire du théâtre, éclate dans une folie contagieuse. Nos premières impressions sont balayées avec la présence notamment d’une marquise délicieusement idiote, de comiques de situation empruntées à la Commedia dell’arte, de décors splendides où l’on retrouve avec émerveillement le système des machineries à l’ancienne et des décors de nuage…Du banquet en l’honneur de la marquise à la fameuse cérémonie d’intronisation, on rit de la farce grotesque dont Monsieur Jourdain est le dindon. Dès lors que les Turcs débarquent, le bourgeois exulte et François Morel, au milieu de ce sacre farfelu, joue une partition qu’il maîtrise à la perfection, celle du ravi satisfait, roi d’une fête des fous hystérique. Il semble alors que ce qui n’étaient que répétitions et tatonnements dans la première partie triomphent dans le ballet final du grand Mamamouchi. On nous sert , comme l’avait commandé le Roi Louis XIV à Versailles, un spectacle exotique et fastueux! Une conclusion jubilatoire dont on se souviendra!
Le Bourgeois Gentilhomme , une comédie-ballet de Molière et Jean-Baptiste Lully
Mise en scène : Catherine Hiegel
Avec François Morel et Alain Pralon, Marie-Armelle Deguy, Camille Pélicier, Gilian Petrovski, Héloïse Wagner, Emmanuel Noblet, David Migeot, Géraldine Roguez
Musiciens en alternance
: Stéphan Dudermel, Benjamin Chénier, Olivier Briand, Bérengère Maillard, Isabelle Lucas, Florence Bolton, Claire Gratton, Bertrand Cuiller, Jean-Luc Ho, Benjamin Perrot, Thibault Roussel.
Danseurs: Joss Castalat , Romain Panassié, Olivier Bioret, Frédéric Verschoore, Julien Azilazian
Chanteurs :
Eugénie Lefebvre, Stéphen Collardelle, Anicet Castel
Décor : Goury /
Costumes : Patrice Cauchetier/
Lumières : Dominique Borrini
/ Chorégraphie: Cécile Bon /
Direction musicale: Benjamin Perrot
/ Assistante à la mise en scène : Natacha Garange / Coiffures et maquillages : Véronique Soulier-Nguyen
Production Cado Orléans, Loiret – Théâtre de la Porte Saint-Martin.
© Cosimo Mirco Magglioca – ATA
Dates des représentations:
– Les 30 et 31 octobre 2012 au Théâtre de Nîmes
– Les 14 et 15 novembre 2012 au Théâtre Municipal de Grenoble
– Le 28 novembre 2012 au Théâtre de Fos Sur Mer (13)
– Du 29 novembre au 1 décembre 2012 au Théâtre des Salins à Martigues ( 13)
– Du 5 au 8 décembre 2012 au CDN de Lorient (56)
– Les 11 et 12 décembre 2012 à la Scène Nationale de Narbonne ( 11)
– Les 27 et 28 décembre 2012 au Théâtre Charles Dullin à Le Grand Quevilly ( 76)
– Le 6 janvier 2013 au Centre culturel La Passerelle à Florange (57)
– Le 20 janvier 2013 au Centre de Congrès Les Atlantes à Les Sables d’Olonne (85)
– Le 22 janvier 2013 à l’Espace Jacques Prévert- Aulnay Sous Bois (93)
– Du 25 au 27 janvier 2013 au Radiant – Caluire et Cuire ( 69)