La folie Sganarelle : le plaisir de la farce et le génie de Molière
Par Julie Cadilhac – bscnews.fr/ Crédit-photo: Pierre François/Toujours le même étonnement ravi lorsqu’on entend vibrer les mots de Molière! Génie incontestable des caractères burlesques, des situations tordantes et des jeux de mots hilarants, il invite le spectateur à rire de tout et d’abord de soi-même.
De la farce traditionnelle française, Molière a gardé les coups de bâton, les disputes conjugales, les jurons fleuris mais y a ajouté une langue spirituelle qui caricature à plaisir nos faiblesses, nos excès, nos ridicules. Dans le triptyque mis en scène par Claude Buchvald ( L’amour médecin – Le Mariage forcé- La Jalousie du barbouillé), on entend aussi battre le coeur d’un autre genre populaire dont masques, tréteaux et improvisation constituaient les ingrédients sacrés, celui de la Commedia dell’arte: l’on reconnaît en Sganarelle un Pantalone amoureux d’une lolita écervelée, en Pancrace ou le sceptique Marphurius le Docteur Bolonais faisant rebondir des théories sur chaque mot prononcé par son interlocuteur, en Lucinde et Clitandre des Amoureux malmenés par l’autorité d’un père,en Lisette une Colombine qui sait jouer la comédie et manipuler son maître et enfin en Champagne un Zanni niais mais fidèle. Rire de bon coeur, jouir de la vélocité d’une langue brillante et recevoir une leçon de dramaturgie comique, voilà ce que nous offre Molière. La touche personnelle du metteur en scène Claude Buchvald est pertinente car elle respecte l’essence de la farce et les singularités qu’y a insèrées le dramaturge, sa direction d’acteurs est pointilleuse et se soucie à toute minute de communiquer l’énergie qui sous-tend le texte. Claude Buchvald, entourée d’une troupe de comédiens de qualité, s’empare de ces textes à l’humour subversif en préservant l’oralité du théâtre improvisé et la liberté propre aux troupes itinérantes: le plateau est vide à l’exception d’une petite maison-tour sur roues, les corps vibrent et s’expriment à coeur joie et dès l’entrée des protagonistes sur scène,on sent bien s’imposer un théâtre du Verbe.
L’ajout d’un intermède improvisé où deux bonimenteurs tentent de vendre au public un remède miracle est d’une espièglerie attrayante, la scène des devineresses égyptiennes crée une note éthérée et onirique aussi juste qu’originale, la juxtaposition des trois farces, enfin, est un mariage réussi où l’on finit même par oublier qu’elles sont distinctes tant des éléments récurrents (comme la satire des médecins et des savants) tissent des liens forts entre chaque acte. On finira par applaudir la performance de Mouss Zouheyri qui interprète un Pancrace atteint d’hystérie philosophique et de diarrhée verbale d’une drôlerie extrême et de façon générale, on félicitera l’ensemble des comédiens qui nous offre un heureux moment avec Molière!
Titre: La folie Sganarelle
Auteur: Molière
Mise en scène: Claude Buchvald
Avec Benjamin Abitan, Laurent Claret, Cécile Duval, Régis Kermorvant, Claude Merlin, Aurélia Poirier, Stéphanie Schwartzbrod, Céline Vacher, Mouss Zouheyri
Durée: 1h45 sans entracte.
Les représentations:
En Mars 2012 – Tournée régionale organisée par: Théâtre Sortie Ouest de Béziers(34)
– 1er mars 2012 Pezenas à l’Illustre Théâtre
– 2 mars 2012 Portiragnes
– 4 mars 2012 Bedarieux
– 6 mars 2012 Capestang
– 8 mars 2012 Lésignan Corbières
– 9 mars 2012 Minervois
Du 13 au 17 mars 2012 : Théâtre du Gymnase – Marseille (13)
Du 20 au 24 mars 2012 : Théâtre de Sète – Scène Nationale (34)
– 27 mars 2012 Uzes
– 29 mars 2012: Lodève
– 30 mars 2012 Abeilhan
Photo : Mouss Zouheyri ; Cécile Duval ; Laurent Claret