Quartier lointain : l’adaptation brillante de Sam Garbarski

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Par Nicolas Vidal – bscnews.fr / Jirô Taniguchi est l’un des dessinateurs à l’honneur cette année pour cette 42ème édition du Festival international de la bande dessinée d’Angoulême 2015. Une grande exposition reprend plus de 300 documents retraçant le travail du célèbre mangaka japonais dans les salles de la Cité de la bande dessinée au pied de la ville.

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À cette occasion, le film de Sam Garbarski qui se définit comme une adaptation du manga à succès « Quartier lointain » a été diffusé, le jeudi 29 janvier, après une brève rencontre avec Jirô Taniguci qui a rapidement évoqué son rapport à ce film et sa relation intrinsèque cinématographique à son manga. On apprend d’ailleurs à cette occasion que Jiro Taniguchi a été convié sur le tournage par Sam Garbarski et qu’il a été fasciné par la beauté choisi par le réalisateur.

On sent immédiatement que le réalisateur a misé sur une libre d’inspiration du manga tant son film n’a que peu de points communs avec le manga : ni géographique, ni temporelle, ni culturelle. Garbarski a fait le choix de camper son film dans l’Ain au coeur d’un petit village français d’après-guerre pendant l’été. On peut contester ce choix mais il est difficilement opposable au réalisateur d’avoir travesti l’essence même de l’oeuvre de Jiro Taniguchi. Il y ajoute même le charme d’une France oubliée qui ressort à l’écran avec un certain brio et une poésie non dénuée d’intérêt. Un accent particulier a été fait décrire cette époque d’après-guerre où de nombreuses familles sont sorties bouleversées au plus profond de leur identité et de leur histoire tant par les pertes que les chamboulement dus à l’occupation. C’est l’immense défi dans lequel s’est engagé Sam Garbarski dans ce « Quartier lointain ».

Au-delà de l’indéniable force historique de l’après-guerre, l’histoire nous transporte avec intelligence dans une enfance vécue une seconde fois par un adulte qui tente de comprendre son histoire familiale. Pascal Greggory incarne Thomas, ce personnage adulte, dessinateur de bande dessinée, qui se retrouve coincé quelques heures à Nantua, le village de son enfance, après une erreur de train lors de son retour à Paris. Alors qu’il décide se recueillir sur la tombe de sa mère Anna, il est pris d’un malaise et se retrouve propulsé à ses 14 ans ( joué par Léo Legrand) dans ce même village quelques jours avant que son père ne disparaisse subitement le soir de son propre anniversaire.

Avec la même force que les mangas de Jirô Taniguchi qui portent en eux cette dimension universaliste ( dont l’auteur ne se réclame pas la paternité), le film de Sam Garbarski a cette puissance, empreinte de nostalgie : il nous transporte au plus profond de l’intimité de nos enfances et de leurs complexités. Le regard de Thomas adulte transposé dans ce corps de jeune adolescent est une ébouriffante chronique sociale et familiale, car s’y révèle tout ce qui est inaccessible pour les yeux d’un enfant de cet âge, partagé entre le confort cotonneux du cocon familial et les petites ou grandes tragédies qui s’y jouent à son insu. On comprend avec plus de force la réflexion suivante du narrateur : « J’ignorais combien de temps cette deuxième enfance allait durer mais je m’y sentais bien ».

Le film de Sam Garbarski est une adaptation très réussie du manga de Jirô Taniguchi autant qu’un film profond et passionnant à part entière, avec sa singularité et sa puissance historique. C’est peut-être là le tour de force d’un réalisateur qui a pris beaucoup de risques à tenter une transposition, finalement brillante.

Quartier lointain
Un film de Sam Garbarski
Avec Pascal Greggory, Jonathan Zaccaï, Leo Legrand, Alexandra Maria Lara, Audrey Martin
1H38 – 2010


Quartier lointain
Quartier lointain Bande-annonce VF

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