L’insoutenable légèreté de l’Etat
Tribune du Général(2S) Bertrand Soubelet , Vice-président d’Objectif-France
Il semblerait que la crise sanitaire monopolise toute l’énergie, les capacités d’analyse et de décision de l’exécutif de notre pays. Pour toutes les autres questions, nous n’avons droit qu’à une sorte de tétanie et des annonces dont la mise en œuvre est sujette à caution. Aucune stratégie, aucune anticipation, que de la communication.
L’actualité parfois dramatique nous en donne des exemples.
Le premier, qui a choqué à la fois les forces armées de notre pays, les familles des militaires morts en opérations et interpellé beaucoup de Français concerne le retour de madame Pétronin « retenue » pendant 4 ans au Mali. Par pudeur je préfère ne pas employer le terme d’otage. En réalité la France n’a pas participé aux négociations pour son « retour », terme plus adapté que celui de libération. La France a été consultée à la marge pour les prisonniers maliens issus des opérations de la force Barkhane qui furent une condition mineure de l’accord.
La mise en scène de cette pseudo-réussite ne reflète en rien la réalité de cette négociation qui visait essentiellement à libérer Soumaïla Cissé, député malien et deux ressortissants italiens dont un prêtre.
Sophie Pétronin, convertie à l’Islam a déjà annoncé son prochain retour au Mali.
Tout cela n’est que de l’agitation et l’exploitation d’évènements pour essayer de (re)crédibiliser l’exécutif.
Ce sont de bien mauvaises méthodes qui ne grandissent pas la France.
Bilan: peu de résultat, que de la com…
« La libération de Sophie Pétronin est la mise en scène de cette pseudo-réussite qui ne reflète en rien la réalité de cette négociation qui visait essentiellement à libérer Soumaïla Cissé, député malien et deux ressortissants italiens dont un prêtre »
Deuxième exemple
Le plan contre la pauvreté annoncé par le premier Ministre ou comment dépenser des centaines de millions en pure perte.
Cette fâcheuse habitude du vieux monde politique perdure. Elle consiste à saupoudrer des centaines voire des milliards d’euros sans traiter les problèmes de fond.
120 millions d’euros pour les quartiers prioritaires en faveur de l’emploi. Cette fameuse politique de la ville, gouffre qui nous a coûté plus de 90 milliards d’euros en 25 ans et qui a produit les zones de non droit.
En résumé, après leur suppression en 2017, c’est le retour aux emplois aidés à destination des collectivités territoriales et des associations. Et comme on connait depuis longtemps les pratiques clientélistes de certains maires et la nature peu fiable de beaucoup d’associations de ces quartiers, cela ressemble à une nouvelle campagne d’achat de la paix sociale.
« Comme on connait depuis longtemps les pratiques clientélistes de certains maires et la nature peu fiable de beaucoup d’associations de ces quartiers, cela ressemble à une nouvelle campagne d’achat de la paix sociale »
150 millions d’euros pour l’insertion professionnelle avec la création de 30 000 postes supplémentaires dans les structures de l’insertion par l’activité économique (IAE) au moment où les petites entreprises sont en grande difficulté et ne pourront pas en profiter.
Sans oublier une aide ponctuelle aux jeunes, allocataires de l’APL, qui rappelle la suppression des 5 euros en 2017…. Où sont les mesures pour réformer le logement d’urgence et le logement tout court qui coûte plus de 40 milliards d’euros par an pour le résultat qu’on connaît ?
Bilan : de la com pour justifier 700 millions de dépenses dont on doute déjà de la pertinence.
Autre exemple : le plan de relance
Une partie du plan de relance du projet de loi de finances pour 2021 repose sur la baisse de 20 milliards d’euros des impôts de production des entreprises par le biais de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Or ce dispositif ne bénéficiera pas aux PME ET TPE (artisans et commerçants) qui ne paient pas ou peu de CVAE. Sur les 570000 entreprises, la moitié ne touchera que 125 euros…
Le plan de relance touchera donc essentiellement les grandes entreprises qui ne sont pas les plus touchées par la crise. Ainsi la présentation n’est pas l’exact reflet de la réalité : encore de la com
Dernier exemple : les annonces du ministre de l’intérieur.
Seront-elles suivies d’effets? Rien n’est moins sûr.
La fermeture de la mosquée de Pantin pour six mois fait l’objet d’un appel devant le tribunal administratif (TA) de Montreuil. Nous allons voir cette semaine si l’Etat est désavoué par sa propre justice. Ça ne sera pas la première fois qu’une décision administrative est « retoquée » pour des raisons purement formelles ou sur des attendus qui confinent à la malhonnêteté intellectuelle. Un certain nombre de préfets ont vu leurs arrêtés de reconduite à la frontière annulés par le TA sous des prétextes ubuesques.
Nous allons expérimenter dans les semaines et les mois qui viennent les conséquences du comportement d’apprenti sorcier des parlementaires qui depuis 20 ans ont favorisé une législation soucieuse de tout sauf de l’intérêt de notre collectivité nationale. Cette législation qui trop souvent empêche de protéger les Français.
« Nous allons expérimenter dans les semaines et les mois qui viennent les conséquences du comportement d’apprenti sorcier des parlementaires qui, depuis 20 ans, ont favorisé une législation soucieuse de tout sauf de l’intérêt de notre collectivité nationale »
La fermeture de la mosquée de Pantin et la dissolution du CCIF ne sont pas acquises et les résultats concrets pourraient ne pas être à la hauteur des annonces martiales qui se succèdent depuis la tragédie de l’assassinat de Samuel Paty. Voilà encore une illustration de cette politique de pacotille à grands coups de média et de déclarations solennelles.
Lorsqu’on gouverne il y a des règles incontournables :
A l’agitation privilégier la discrétion
Aux déclarations préférer l’action
En toutes circonstances rester mesuré et exemplaire.
Le gouffre abyssal qui existe entre la communication de l’exécutif et le « réel » continue de détruire la confiance des Français. Que la confiance envers les membres du gouvernement et le président Macron soit inexistante c’est une conséquence logique de la gouvernance que nous observons depuis 2017.
« Cette situation provoquée par une gouvernance chaotique est passée sous silence par tous les analystes et ses conséquences funestes devront être assumées devant l’histoire »
Mais la responsabilité des ces femmes et de ces hommes dont certains ont déjà quitté le navire est immense. Ils sont parvenus, par leur incurie, après leurs prédécesseurs, mais avec une efficacité redoutable à discréditer nos institutions et à ébranler la confiance des Français dans notre régime et plus généralement dans la démocratie.
Cette situation provoquée par une gouvernance chaotique est passée sous silence par tous les analystes et ses conséquences funestes devront être assumées devant l’histoire.
Avec, hélas, des effets sur les Français et surtout les plus jeunes.
Voilà résumée l’insoutenable légèreté de l’Etat.
Général(2S) Bertrand Soubelet
Vice-président d’Objectif-France