Hélène, comment devient-on designer papier et textile ?
J’ai su que je voulais devenir designer textile assez tôt à 17 ans en visitant les magnifique portes ouvertes de l’école Duperré. J’y suis restée 4 ans, le temps d’explorer le textile et de développer ma créativité. Le travail sur le papier est venu assez naturellement en créant des vitrines sur Paris. C’était un matériaux pas cher et facile dans lequel j’ai commencé à découper.
Qu’est ce qui vous attiré dans cet art ? Pourquoi cette passion pour ce travail de précision ?
C’est tout le travail sur les ombres et les lumières qui m’ont attirée dans la découpe, cette impression de passer dans une autre dimension. J’aime bien la précision de la découpe, ce côté très « net » qui permet d’être graphique.
Sans entrer dans les détails, comment appréhendez-vous un livre comme New York Melody ou Océan? Comment avez-vous pensé Océan à travers ces découpes et ces animations ?
Je n’appréhende pas ces livres de la même façon. « New York Melody » ou « Paris s’envole » sont des fictions, des albums d’imagination. J’imagine l’histoire puis ensuite je réfléchis sur chaque double page qui possède 3 illustrations dont une découpe en intercalaire. C’est un vrai exercice afin que la découpe, autant que les illustrations, avant et après, se complètent ou créent des surprises.
Pour cette première série de livres, la gamme de couleur était volontairement restreinte (noir, blanc , gris) afin de donner beaucoup de force aux découpes.
Pour « Océan« , je commence par un gros travail de documentation pour savoir ce que j’ai envie de raconter sur les océans. Je construis une gamme colorée, je commence à faire des petits essais d’illustrations puis je propose un chemin de fer à mon éditrice. Nous parlons ensemble des animations, de découpe laser ou flap, en fonction du sujet mais aussi de la répartition dans le livre. Certaines sont évidentes dès le début. Par exemple je savais que je voulais faire une découpe sur le Corail car cela s’y prêtait mais l’animation était censée être beaucoup plus compliquée, avec de la découpe sur plusieurs plans.
Malheureusement d’un point de vue économique, ce n’était pas possible donc il a fallu faire plus simple. Mon point de départ sur Océans était la superposition de vagues dans un dégradé de bleu ou l’on découvrirait couche après couche la faune en fonction de la profondeur des océans.
Pour chaque page illustrée, je note les noms des espèces au fur et à mesure et je rédige une note pour l’auteur afin qu’elle sache ce que je veux raconter par le biais de cette illustration. J’ai découvert les textes à la toute fin. C’était une vraie surprise car l’auteur a su « traduire » mes illustrations tout en y ajoutant des anecdotes très intéressantes.
Quelle est votre marge de manœuvre artistique et vos contraintes sur un projet de ce type ?
Je suis très libre d’un point de vue artistique, c’est cela qui est formidable dans l’illustration jeunesse. D’un point de vue économique, j’ai de la chance de travailler avec des éditeurs qui sont prêts à tenter des choses techniquement parlant. Je pense notamment à mon livre « Anatomie » qui a une superposition très fines de 5 découpes laser pour les différents systèmes. Cela coûte cher, c’est fragile pour des enfants mais l’équipe de La Martinière a adoré et a tenté le coup.
Vous collaborez également avec des marques. En quoi consiste votre travail sur ces différents projets ? L’approche est-elle la même ?
L’approche est assez différente car il s’agit de développer un univers, une histoire en une ou quelques illustrations, la plupart sans texte. Mais les marques qui me contactent ont pour référence mes livres donc généralement, artistiquement je suis libre de proposer des choses.
Plus généralement, quel regard portez-vous sur la vitalité par la littérature jeunesse dans les années à venir ?
La littérature jeunesse est très riche, tellement de beaux livres sortent tous les ans ! Mais dans l’ensemble, et ce n’est que mon avis personnel , je pense que les éditeurs devraient éditer moins de livres, prendre le temps de travailler chaque ouvrage pour que chaque livre qui sortent soit de qualité. Même dans les livres, il faut consommer moins et mieux…
Si vous devez nous donner votre Putsch culturel ?
Mon dernier coup de coeur est pour l’exposition « espèce en voie d’illumination » qui était une balade nocturne au sein du Jardin des plantes. C’était véritablement magique, poétique et innatendue, un vrai moyen pour nous faire réfléchir sur l’extinction de centaines d’espèces.
Océans
La Martinière jeunesse
Hélène Druvert – Textes d’Emmanuelle Grundmann
Le site officiel d’Hélène Druvert
( Crédit photo Hélène Druvert D.R – Planches & images Crédit Hélène Druvert )