Simon Helloco : « Le cinéma en ligne, c’est une alternative aux salles qui ferment et aux jeunes qui les désertent »

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Exclusivité. À l’occasion de la sortie du teaser de la 9ème édition de « MyFrenchFilmFestival », qui se déroulera du 18 janvier au 18 février prochain, Putsch s’est entretenu avec Simon Helloco, co-responsable du festival et en charge de la communication. Chaque année, ce festival propose le meilleur du jeune cinéma francophone depuis une cinquantaine de plateformes en ligne, accessible partout dans le monde.

propos recueillis par

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https://www.youtube.com/watch?v=adBPcLvwlhY

C’est quoi MyFrenchFilmFestival ? Comment ça marche ?

C’est le 1er festival de cinéma francophone en ligne, organisé par UniFrance (l’association qui promeut le cinéma français à l’étranger, ndlr). Il est disponible sur notre plateforme entièrement dédiée et sur une cinquantaine de plateformes partenaires, partout dans le monde (Itunes, Google, Amazon…etc.). Il a tout d’un festival « normal » avec des films en compétition, des exclusivités, des films de patrimoine, un jury de cinéastes, un public. Sauf qu’il est en ligne. Tout est dématérialisé. Il est donc disponible sur tous les outils numériques (portable, tablette, ordinateur, tv…). Le but, c’est d’amener le cinéma français chez l’internaute. Ce festival est né d’un constat : même si le cinéma français s’exporte bien (la France est le 2èmeexportateur mondial derrière les USA), il y a de moins en moins de salles dans le monde et les jeunes les désertent de plus en plus. Comment faire pour récupérer le public ? Proposer des films qui vont intéresser les jeunes, sur des outils utilisés par les jeunes. Nous voulons faire exister un cinéma français nouveau, frais et différent à destination de ce public-là. Techniquement, l’internaute peut aller sur notre plateforme dédiée s’il veut vivre l’expérience du festival. Il peut aussi se connecter via les plateformes partenaires, en fonction du territoire où il se situe. Le festival est entièrement gratuit en Amérique latine, Russie, Pologne, Roumanie, Afrique et en Inde. Ce sont principalement des pays où il n’y a pas une véritable habitude d’achat de films en ligne. Pour tous les autres territoires, les films sont à 1,99 euros. C’est 7,99 euros pour un accès total à l’ensemble du festival. En revanche, les courts métrages sont gratuits, partout dans le monde. Finalement, l’idée première de ce festival, c’est de donner accès aux films français, à un autre genre de films français. Des films plus exigeants et qui méritent une attention plus large.

 

« […] Il y a de moins en moins de salles dans le monde et les jeunes les désertent de plus en plus »

 

Lors de la précédente édition, vous avez atteint les 12 millions de vues, à travers 200 territoires, sur l’ensemble des plateformes. Du jamais vu depuis la création du festival. Comment expliquez-vous ce succès ?

Oui, c’est le double des deux dernières années (6,7 millions en 2017 et 6,5 millions en 2016). Quentin Deleau, co-responsable du festival et en charge du développement numérique, obtient chaque année de plus en plus de plateformes. Le festival gagne en notoriété : le jury, les réalisateurs, les films… L’habitude VOD explose partout dans le monde. Il y a de plus en plus de public. MyFrenchFilmFestival est donc de plus en plus adapté aux consommations contemporaines. Si nous avons doublé, c’est aussi parce que nous sommes revenus en Chine. Nous n’y existions plus à cause de problèmes de quota et de censure, indépendamment de notre volonté. Et il y a une vraie demande de consommer des films français. Une autre des raisons, c’est la multiplication des canaux de diffusion. Nous nous servons de Facebook, par exemple, comme une plateforme pour diffuser des films pendant 24h. Et ça, c’est exponentiel au vu du nombre de nos abonnés.

 

« […] On se sert de Facebook comme une plateforme pour diffuser des films pendant 24h »

 

D’après votre bilan 2018, disponible sur le site, le Mexique est l’un des deux pays, avec la Chine, comprenant le plus de visionnages. Comment l’expliquez-vous ? Qu’est-ce qui incite des spectateurs du monde entier à voir des films français ?

Le Mexique, avec ses 2 millions de vues, est un cas intéressant. Si nous mettons de côté la Chine (6,2 millions de vues), les pays qui enregistrent le plus grand nombre de vues sont des pays d’Amérique latine : le Mexique, le Brésil et la Colombie. Sur ces territoires, le festival y est entièrement gratuit. Nous avons aussi beaucoup de partenariats (avec des médias et des plateformes), nous travaillions avec l’Institut Français… Nous y sommes donc très implantés. Ce qui incite les gens, c’est le cinéma français en tant que tel : c’est la 2èmecinématographie étrangère, peu importe où l’on se situe dans le monde. En fonction des territoires, il y a plusieurs styles de cinéma français qui s’exportent : les productions Besson, par exemple, sont des films d’action et de science-fiction qui marchent, partout dans le monde. Ce que propose MyFrenchFilmFestival, c’est un autre cinéma, un cinéma qui ne sort pas forcément dans les salles du monde entier. C’est ça l’objectif artistique du festival : proposer une sélection de qualité, des films qui méritent d’être vus par un public qui en demande.

 

« C’est ça l’objectif artistique du festival : proposer une sélection de qualité, des films qui méritent d’être vus par un public qui en demande »

 

Pour cette 9èmeédition, 20 films français sont attendus, sous-titrés en 11 langues. A quoi devons-nous nous attendre ? Quelles seront les nouveautés ?

Oui, ce sont dix longs et dix courts métrages en compétition (la programmation sera dévoilée en janvier prochain, lors d’une conférence de presse, nldr). Nous proposons aussi des films hors compétition : un court métrage et un long métrage canadiens (grâce à une entente avec Téléfilm Canada), un film belge, des films de patrimoine et deux ou trois exclusivités. Concernant les nouveautés, nous allons continuer à faire ce que nous faisions l’an dernier, en diffusant les courts métrages sur Facebook. Nous utilisons le réseau social comme une vraie plateforme de visionnage. Aussi, nous souhaitons garder l’idée novatrice des débuts de MyFrenchFilmFestival en proposant notamment une œuvre de réalité virtuelle, un jeu vidéo interactif avec le clip de Naïve New Beaters. Et pour la première fois, nous diffuserons une série française très réputée chez nous.

 

Vous diffusez les films de la sélection sur la plateforme en ligne, en salle (dans le réseau diplomatique français) et dans les vols long-courriers de plusieurs compagnies aériennes pour les films lauréats. Vous avez développé un réseau de plus de 50 plateformes partenaires dans le monde. Quel est l’enjeu derrière une telle diffusion ?

Le but, c’est d’affirmer certaines relations à long terme. C’est un argument pour consolider des liens entre le cinéma français et les plateformes. Par exemple, à l’occasion de la Semaine du Cinéma Français en Italie, nous proposerons, à des plateformes italiennes, des films français. Selon moi, le cinéma en ligne n’apparait pas en opposition à la salle mais plutôt en complément. Les films choisis par MyFrenchFilmFestival sont majoritairement des films sur la fin de leur circuit salle : nous leur donnons donc une deuxième vie plutôt que de les laisser sur des étagères virtuelles. Plus globalement, puisque les plateformes sont devenues aussi importantes car elles régulent l’activité culturelle des gens et sont au centre des préoccupations des industries culturelles, il faut pouvoir les alimenter à l’année et créer des relations solides. Ça permet de faire exister le cinéma français autrement : le cinéma en ligne, c’est une alternative aux salles qui ferment et aux jeunes qui les désertent.

 

« Selon moi, le cinéma en ligne n’apparait pas en opposition à la salle mais plutôt en complément »

 

Vous êtes le premier festival de cinéma français en ligne, en termes d’audience. Qu’est-ce que cela nous dit sur les nouvelles pratiques de consommation du cinéma ? Le choix du streaming et de la VOD est-il révélateur d’une tendance qui continue de s’affirmer ?

MyFrenchFilmFestival est arrivé il y a 9 ans, au moment même où le cinéma en ligne commençait à vraiment exister. Il y avait plus de craintes et de réticences à l’époque. La sélection de films était plus difficile à faire. Aujourd’hui, on nous propose des films de haute stature pour pouvoir les faire exister plus longtemps. En revanche, le streaming n’est pas l’avenir du cinéma. C’est un complément. Je suis un fétichiste de la salle : rien ne pourra la remplacer. Être assis dans le noir, à côté d’inconnus, devant un immense écran, c’est une expérience unique. Même un salon avec un bon système son ne fait pas l’affaire ! Et puis, il y a l’idée d’aller au cinéma, de se déplacer, de se mettre dans une condition particulière… Plutôt que de ne pas être vus, de prendre la poussière sur des étagères, il faut pouvoir continuer de faire exister les films plus longtemps, différemment, et de manière plus large. Et la réponse, c’est le cinéma en ligne ! C’est sûr, au début, il y avait beaucoup de téléchargement et de streaming illégal. Il y a eu une vraie prise de conscience et aujourd’hui, les producteurs et exportateurs travaillent conjointement avec les plateformes. Par exemple, plutôt que de sortir un film indépendant, qui peut avoir un bon bouche-à-oreille, sur trois territoires et dans dix salles, ils essaient de le sortir sur une plateforme type Netflix, pour le diffuser partout dans le monde. Oui, il y a un petit regret de ne pas le voir en salle mais le but d’un film, c’est d’être vu non ?

 

« Être assis dans le noir, à côté d’inconnus, devant un immense écran, c’est une expérience unique »

 

Pour l’affiche du film, vous avez fait appel aux services de Little White Lies, un magazine bimensuel spécialisé dans le cinéma et basé à Londres. Pourquoi ce choix?

Pour un festival sur le web, il y a très peu d’impression d’affiches. Nous en envoyons évidemment aux Instituts Français, partout dans le monde, mais avec un festival global et mondial comme le nôtre, nous ne pouvons pas nous permettre d’avoir une campagne d’affichage imprimée partout, dans les abribus du monde entier. Il faut donc une affiche qui marche sur le web, et ce qui fonctionne bien, ce sont les choses graphiques, les couleurs vives. C’est justement ce que fait Little White Lies. Nous avons gardé l’idée d’une caméra classique mais formée d’un téléphone, d’un ordinateur… Du cinéma adapté aux codes de notre époque ! On voulait aussi jouer avec l’hier et aujourd’hui.

Affiche de « MyFrenchFilmFestival » 2019 (© Little White Lies/UniFrance) 

 

Pour le teaser du festival, que vous nous dévoilez ici en exclusivité, vous avez choisi Noée Abita (Ava) et Félix Maritaud (120 battements par minute, Sauvage, Un couteau dans le coeur). Pourquoi ? Que représentent-ils, selon vous ?

Pour nous, ce sont les visages de ce que le cinéma français peut proposer de mieux aujourd’hui, deux espoirs à suivre de près. Avec MyFrenchFilmFestival, nous avons envie de représenter tout ce que le cinéma français peut faire de mieux : ils sont donc les meilleurs étendards du festival. Nous voulions les mettre en avant dans un clip qui représente l’amour fou. L’objectif de ce teaser, c’est de montrer que les plus belles histoires peuvent être vécues depuis chez soi. C’est aussi ça MyFrenchFilmFestival : vous êtes à la maison, tranquillement installé dans votre canapé, avec qui vous voulez, et les belles histoires arrivent directement chez vous, de manière légale.

 


Infos pratiquesMyFrenchFilmFestival – Du 18 janvier au 18 février 201920 films en compétition, 11 langues disponibles : français, anglais, italien, allemand, espagnol, portugais, polonais, russe, japonais, coréen et chinois.Retrouvez la programmation de l’édition précédente ici(Crédit photo : Jean-Baptiste Le Mercier/UniFrance)

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