Fred Vargas : Connaissez-vous Jean-Baptiste Adamsberg ?

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Pour qu’un polar apparaisse dans la première sélection du jury Renaudot, il fallait qu’il soit drôlement fortiche. C’est le cas. Même Fred Vargas peine à suivre les méandres de son flic préféré.

En littérature, les unions durent plus longtemps que dans le showbiz. Témoin, le couple Vargas-Adamsberg : l’inspiratrice madrée et le commissaire imprévisible. La première arrache le second à la quiétude de son commissariat parisien, pour l’envoyer à Combourg, dans cette Bretagne qu’il connaît bien mal. En principe pour un banal aller-retour, dont la relation nécessitera tout de même plus de 500 pages.
Un boiteux, un chat noir, un descendant du vicomte François-René de Chateaubriand et un homicide, voilà qui devrait aimanter le visiteur et lui permettre de décontenancer ceux qui vont enquêter sous ses ordres. Il sera question d’un tueur en série et, pour parvenir à le neutraliser, d’une course contre la montre, inopérante en dépit d’un impressionnant dispositif policier. La réputation flatteuse qui précède Adamsberg est-elle surfaite ? N’aurait-il pas mieux à faire qu’à « marcher de son pas lent, laissant les idées de toutes sortes/…/flotter au rythme de sa marche tanguante, se croiser, s’entrechoquer, s’agglomérer, se disperser, en bref les laisser agir à leur guise » ? Il n’est pas un émule de Maigret mais un intuitif. Alors que les victimes se multiplient, le sort d’un hérisson blessé le préoccupe davantage que l’impatience d’un vague secrétaire de cabinet ministériel. Pas question, donc, de se précipiter tête baissée. Le lecteur attendra d’autant bon gré que l’écriture tendue de Fred Vargas incline à savourer l’heureuse maitrise de la langue, le choix avisé du terme propre, la satisfaction du mot bon plutôt que le succès facile d’un bon mot. On croit que Jean-Baptiste s’égare, on le cherche ? Il est parti faire le tri de ses idées vaseuses sur la dalle d’un dolmen, lequel est à l’intelligence du monde breton ce que le divan incarne pour les névrosés germanopratins.
Osez goûter la première bolée de Vargas. Vous n’en reviendrez pas.

« Sur la dalle », Fred Vargas, Flammarion, 23 €

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