En pleine polémique sur sa nomination, Fiona Scott Morton renonce à son poste clé au sein de la commission européenne

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Une américaine nommée « chief economist » à la DG de la concurrence de la Commission Européenne : vous avez dit « souveraineté européenne » ?
 Voilà une affaire qui a pris de l’ampleur au fil des heures, jusqu’à déboucher sur une polémique de premier plan. On apprend ce mercredi 19 juillet que la vice-présidente de la commission européenne chargée de la concurrence, Margrethe Vestager a annoncé via son compter Twitter qu’elle venait de recevoir un courrier de renoncement de la part de Fiona Scott Morton.

 

Mais revenons sur cette nomination qui, même avortée, jette encore davantage le trouble sur la prétendue souveraineté européenne dont raffole Emmanuel Macron, qui lui même s’est dit « dubitatif » au sujet de cette nomination.

Le 11 juillet dernier Ursula Von Der Lyen, appuyé par la commissaire européenne à la concurrence Margrethe Vestager, a choisi de nommer à ce poste stratégique Fiona Scott Morton, une américaine ancienne professeure à Yale, mais pas seulement. 

Washington aurait disposé donc désormais d’une interlocutrice privilégiée au cœur du dispositif de gouvernance économique de l’UE. La Commission ayant déclaré qu’elle était « la meilleure candidate » pour occuper le poste, omettant volontairement le fait qu’elle n’est ni citoyenne, ni résidente, de l’un des États membres. Mais au delà de ce simple fait, c’est aussi son parcours et les conditions de sa nomination, et le contexte dans lequel elle intervient, qui posaient des questions.
Un choix idéologique

Issue d’une formation économique à Yale, où elle enseigne dès 1999, puis au MIT, Fiona Scott Morton prends d’abord congé congé de ses engagements universitaires pour occuper un poste de procureure au sein du département antitrust du ministère de la Justice américaine, sous Obama de 2011 à 2012. Elle fût également une « conseillère indépendante », selon ses propres dires, auprès de certains GAFAM parmi lesquelles Amazon, Microsoft et Apple. Pourfendeuse des monopoles, ce qui lui a d’ailleurs valu sa nomination au sein de l’administration Obama, il semble que ce soit principalement ses positions sur le sujet qui aient motivé le choix de la présidente de la Commission. L’UE étant obsédé par l’idée d’une concurrence libre et non faussée entre les entreprises, comme établie dans le Traité sur le Fonctionnement de l’UE et son ensemble de règles qui « visent à prévenir les restrictions et les distorsions de la concurrence sur le marché intérieur. Plus précisément, il interdit les accords faussant la concurrence entre les entreprises ainsi que les abus de position dominante sur le marché, qui pourraient nuire aux échanges entre les États membres » comme on peut le lire sur le site du Parlement Européen.
Difficile de croire que Mme Scott Morton appuiera la création de champions européens promis depuis des années par les élites française, tel Emmanuel Macron qui appelait, le 16 juin 2021, à la création de 10 géants de la Tech en Europe d’ici 2030. Le statut de l’économiste, ancienne croisée des géants de la Tech américains, entre en total contradiction avec ces ambitions et laisse craindre des cas de conflits d’intérêts privés.

 

 

Passage en force et sens du timing

Une contradiction que le gouvernement français a tenté d’effacer, appuyé par le Medef et les quatre principaux groupes du Parlement Européen (PPE, S&D, Verts, centristes et libéraux), en adressant une demande de reconsidération aussitôt rejetée par la Commission qui « ne voit pas de raison de reconsidérer » ce recrutement controversé. Comme à son habitude, l’exécutif européen passe en force, et passe outre le désaccord de la deuxième puissance de l’Union et des seuls responsables élus au sein des institutions communautaires.
Le timing de la nomination de l’ancienne professeure interroge également. Alors qu’Ursula Von Der Lyen verra son mandat prendre fin dans moins d’un an, et qu’elle a fait du contrôle du numérique et de la protection des données européennes l’un des grands combats de sa présidence, il s’agit là d’un grave faux pas.
Il faut également souligner que la nomination de Mme Scott Morton est une preuve de plus que l’une des grandes promesses inhérentes à l’unification des États européens (en plus de celle d’assurer une paix durable), à savoir l’indépendance vis-à-vis des grandes puissances, est fausse, au vue de la nationalité de la nouvelle économiste en chef, qui laisse craindre des conflits d’intérêts d’ordre plus politique. Ainsi va l’Europe, une américaine nommée à un poste clé et une Commission qui n’y voit pas d’inconvénients, de quoi contrecarrer les grands projets d’Emmanuel Macron, au premier rang desquelles sa fameuse ‘‘souveraineté européenne’’. Vous avez dit ‘‘souveraineté européenne’’ ?

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