Charles-Henri Gallois: « Les emprunts indexés sur l’inflation est un véritable scandale d’Etat pour garantir la rentabilité de sociétés financières privées! »

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Charles-Henri Gallois, Président de Génération Frexit dénonce un « scandale d’Etat » en ce qui concerne les emprunts indexés sur l’inflation, qui se sont accélérés sous le mandat d’Emmanuel Macron et qui plongent aujourd’hui la France dans une situation d’endettement de plus en plus difficile. Charles Henri Gallois, dans ce long entretien explique en détails en quoi cette stratégie semble délibérée.

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Pourquoi l’inflation augmente considérablement le coût de la dette pour la France ?
Le Trésor, sous le contrôle de Bercy, a eu la « bonne idée » d’émettre des emprunts indexés sur l’inflation (système d’obligation d’État indexées sur l’inflation). À l’époque le ministre de l’Économie était le socialiste Dominique Strauss-Kahn.
Cependant, les conditions économiques n’étaient pas du tout les mêmes. À l’époque, les taux fixes étaient bien plus élevés, de même que l’inflation (comparé au premier mandat d’Emmanuel Macron). Le gouvernement pouvait donc légitimement espérer obtenir un petit gain, bien qu’il soit toujours hasardeux de parier sur le niveau d’inflation à dix ans de là.
Avec le regain d’inflation, cela va amener un surcoût de plus de 15 milliards d’euros en 2022. C’est le chiffrage du journal les Echos et celui qui a circulé en Commission des finances. Ce chiffre est basé sur une inflation à 6 %. Nous sommes déjà à 6,8 % et il est fort à parier que la facture va encore s’alourdir. Quand on regarde au total et pas uniquement en 2022, la facture est de l’ordre de 40,5 milliards d’euros. Il s’agit des deux tiers des recettes annuelles de l’impôt sur les sociétés.
C’est d’autant plus rageant que la facture aurait pu être largement limitée. Lorsque l’on prend les titres à la valeur nominale, près de la moitié (112 milliards d’euros) ont été émis ou adjugés sous Macron président de la République.

Vous qualifiez cela de scandale d’État. Dans quelle mesure ?
C’est un scandale d’État dans la mesure où la perte pour l’État, et donc pour les Français, était assurée sous Macron.
Pendant tout le cours de son premier mandat, la France empruntait à un taux fixe de moins de 1 %, voire à taux nuls et parfois mêmes négatifs au cours de l’année 2020. Il était complètement irrationnel de continuer à souscrire à des emprunts indexés sur l’inflation, étant donné le niveau historiquement bas des taux fixes.
Si l’on pousse un peu plus l’analyse des données financières, on se rend compte que la perte était en effet quasi assurée pour l’État. Il suffit de regarder ce que l’on appelle en finance le point mort d’inflation. Cela revient à se demander sous quel niveau d’inflation l’État aurait pu être gagnant avec un tel système d’emprunt. Il s’avère que cela aurait pu marcher si l’inflation avait été cantonnée sous la limite de 1,5 % jusqu’à la fin de 2021 et ce pour les dix années à venir sous Macron. Problème : cette condition est si improbable qu’elle ne s’est réalisée que onze fois en cent onze ans si l’on considère l’historique de l’inflation annuelle en France.

 

« C’est un scandale d’État dans la mesure où la perte pour l’État, et donc pour les Français, était assurée sous Macron »

 

Un tel outil financier serait forcément à perte dans ces conditions sous Macron. Or non seulement son gouvernement a renouvelé ce type d’émissions mais il en a augmenté l’encours (c’est-à-dire le montant).
L’argument de la diversification ne tient pas la route non plus. Cela sous-tendrait que l’État serait obligé d’y avoir recours car il a dû mal à placer sa dette à taux fixe. C’est totalement faux car la demande des obligations à taux fixes a toujours été largement supérieure à l’offre sous Macron.
Pour résumer, cette stratégie est aberrante, n’importe qui un tant soit peu informé en conviendra. Imagine-t-on deux secondes un particulier qui souscrirait à un équivalent d’emprunt à taux variable sur 10, 15 ou 25 ans alors qu’il peut emprunter avec des taux fixes très bas ? Cette décision lunaire de l’État semble donc être délibérée.

Vous semblez dire que cette stratégie est délibérée ? Dans quel but ?
C’est délibéré dans la mesure où c’est totalement irrationnel et qu’on ne peut pas imaginer deux secondes que le Trésor ne sache pas comment marche ce type de titres et un taux d’intérêt.
Bruno Le Maire a d’ailleurs avoué à demi-mot le crime à l’Assemblée nationale. Le ministre de l’Économie a répondu aux députés Jean-Philippe Tanguy et Philippe Brun que ce type d’outil financier vient « d’une demande très précise des banques et assurances », pour assurer leur rentabilité !
L’État — et donc les contribuables — fait une perte assurée pour garantir la rentabilité de sociétés financières privées ! L’État fait un cadeau aux banques avec l’argent des français.
Cet argument est lunaire car ce n’est pas à l’État de faire cela.
Il n’y a pas d’autre mot que celui de scandale d’État. McKinsey et les cabinets de conseil, c’est un milliard d’euros. C’est de la rigolade au niveau des finances publiques si l’on compare à cette affaire !

 

« Bruno Le Maire a d’ailleurs avoué à demi-mot le crime à l’Assemblée nationale. Le ministre de l’Économie a répondu aux députés Jean-Philippe Tanguy et Philippe Brun que ce type d’outil financier vient « d’une demande très précise des banques et assurances », pour assurer leur rentabilité ! »

 

Est-ce une stratégie censée sécuriser les investisseurs ?
Plus que les investisseurs, c’est bien un cadeau aux banques et sociétés d’assurance.
Pour ne pas l’exprimer tel quel, et que sa justification paraisse acceptable, Bruno Le Maire évoque le besoin de préserver la rentabilité des assurances-vie, du livret A et du livret d’épargne populaire (LEP). Mais cette pirouette ne doit tromper personne. Ce n’est pas non plus à l’État ni aux contribuables de garantir la rentabilité des épargnants par des pertes assurées.
Cela est d’autant plus scandaleux qu’une partie de ces titres est détenue à l’étranger.
Que Bruno Le Maire ose évoquer le livret A (1 % de rémunération actuellement et qui passera à 2 %) ou le LEP (2,2 % actuellement et qui passera à 4,6 %) dont les taux sont précisément largement inférieurs à l’inflation (6,5 % en juin) montre tout le cynisme et l’incompétence du personnage !
Cet outil n’a aucun sens d’un point de vue de l’État, qui pouvait placer des obligations à taux fixes sans aucun problème, a fortiori depuis le gros assouplissement quantitatif de 2015

Pourtant Emmanuel Macron a été qualifié de Mozart de la Finance au début de son premier mandat. Au vu de la situation générale actuelle, on peut sérieusement en douter. Comment l’analysez-vous ?
Emmanuel Macron a déjà fait grossir la dette de 600 milliards d’euros malgré un stratagème de cavalerie financière là aussi complètement dingue. Celui de la prime d’émission.
Cette pratique consiste à faire baisser artificiellement la dette à court terme (100 milliards d’euros planqués) mais elle va l’augmenter à moyen ou long terme. Encore une fois, une telle pratique est ahurissante et aura un coût sensible pour les finances publiques. La manipulation consiste à vendre une dette qui vaut 100 à 150 mais à payer des intérêts prohibitifs dessus. De telle sorte qu’à terme, au lieu de payer 102, vous paierez peut-être 160.
Cette pratique malhonnête a explosé sous Macron et elle mérite également de faire l’objet d’une commission d’enquête parlementaire. Plus que le Mozart de la finance, Macron est le Beethoven de la dette qui ruine la France !

 

« Emmanuel Macron a déjà fait grossir la dette de 600 milliards d’euros malgré un stratagème de cavalerie financière là aussi complètement dingue. Celui de la prime d’émission »

 

Quelles seraient les mesures à prendre sur le projet de loi de finances rectificative à venir ?
Le mal est déjà fait. Il faudrait en revanche arrêter immédiatement d’émettre ce genre de titres, comme cela aurait dû être fait depuis a minima 2015. Le Trésor a encore émis pour deux milliards d’euros de ce type de titres le 25 juillet 2022 et a émis récemment pour la première fois de l’histoire des obligations vertes indexées sur l’inflation. À ce niveau-là, on ne sait même plus quoi dire…

Dans les perspectives très sombres que vous dénoncez, quel sera l’avenir économique de la France et surtout des Français ?
L’avenir est relativement sombre. Nous sommes dans une période de stagflation avec une forte inflation et une croissance ridicule, proche de la récession. Le prix de certaines matières premières commence à baisser mais le souci est que l’impact est très souvent décalé et surtout nous les payons en dollars alors que l’euro s’est effondré. C’est la baisse de la demande et le cadre récessioniste qui fait baisser les prix. Dans ce contexte, les mesures de pouvoir d’achat du gouvernement sont insuffisantes et nous assistons à une baisse du pouvoir d’achat des Français. En d’autres termes, à un appauvrissement généralisé. Le gouvernement ne cesse de se jeter des fleurs mais la réalité est qu’au premier semestre 2022, le revenu réel des Français est celui qui a le plus chuté parmi les membres de l’OCDE (-1,9 %).

 

« La France devrait impérativement reprendre le contrôle de sa politique monétaire pour avoir une politique crédible contre l’inflation, qui touche avant tout les plus pauvres. C’est un impôt déguisé »

La France devrait impérativement reprendre le contrôle de sa politique monétaire pour avoir une politique crédible contre l’inflation, qui touche avant tout les plus pauvres. C’est un impôt déguisé. On nous avait dit que l’euro amènerait plus de croissance et moins de chômage. Tout le monde a pu constater que c’était faux. Le dernier argument consistait à dire que l’euro nous protégeait de l’inflation. La réalité est que ce n’est même plus le cas du fait de politiques monétaires stupides (assouplissement quantitatif) et dans des proportions inconsidérées pour sauver l’euro. Ces politiques couplées aux sanctions contreproductives contre la Russie nous amènent dans le mur.
Il faut aussi que les responsables, Bruno Le Maire et Emmanuel Macron rendent des comptes. Quand Jérôme Kerviel a fait une bourde à 4,9 milliards d’euros, il a été viré et a été condamné à rembourser une partie de la perte.

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