Et le FC Géopolitics joue les premiers rôles avec cette idée et pour la qualité de ces éclairages. Rencontre avec Kevin Veyssière.
D’où vous est venue cette idée de parler de foot en vous attaquant à l’aspect géopolitique ?
Je suis depuis longtemps un grand passionné de football, d’histoire et de géographie. Ce lien entre ces différentes passions je l’ai retrouvé à travers les Coupes du Monde et les Euros, avec bien sûr le Mondial 98 en France. Ces compétitions internationales sont un moyen idéal pour s’intéresser aux différents pays qui y participent, tout comme les Jeux Olympiques.
J’avais créé plusieurs blogs par le passé autour des Coupes du Monde de football, de leur histoire et aussi avec des interviews de joueurs français expatriés à l’étranger. Bien que cela fut intéressant je voyais bien que mes sujets n’étaient pas si différents de ce que je pouvais lire dans la presse sportive. A force de lecture (Histoire Populaire du football de Mickael Correia et Géopolitique du sport de Pascal Boniface notamment) mon intérêt pour la géopolitique du sport est allé crescendo, et c’est en lisant un article de France Football en octobre 2019 sur les liens entre la chute du Mur de Berlin et le football que j’ai eu l’étincelle. J’ai lancé le FC Geopolitics dans la foulée, avec un premier article sur le Dynamo Berlin, le club de football central voulu par le régime de la RDA.
« J’ai lancé le FC Geopolitics dans la foulée, avec un premier article sur le Dynamo Berlin, le club de football central voulu par le régime de la RDA »
Est-ce votre fonction de collaborateur parlementaire qui vous a donné envie de lier politique et football ?
Non. J’ai toujours eu intérêt pour la politique, et cela peut sans doute m’aider à appréhender différents sujets, mais chaque sujet que je choisi au premier abord c’est avant tout le choix d’un passionné de football et de géographie.
Les sujets sont nombreux, complexes et passionnants. Comment sont-ils choisis, appréhendés et traités ?
Il y a disons deux types de sujets. Il y a sujets, comme ceux pour Berlin au tout début ou bien sur le Groenland ou l’île de Paques, qui m’intéressent et pour lequel j’ai envie de pousser la réflexion un peu plus loin. Montrer tous les enjeux extérieurs au football, que ce sport n’est pas qu’une question de 22 gars qui courent derrière un ballon.
C’est notamment le cas avec des sujets comme le match entre le Honduras et Salvador en 1969, un match qui fut nommé à tort La Guerre du Football, ou bien sur la victoire de l’Afrique du Sud en Coupe d’Afrique des Nations en 1996, finalement bien plus symbolique pour la population du pays que la victoire en Coupe du Monde de rugby des Springboks en 1995. Ensuite il y a un autre type de sujet, lié plus à l’actualité. Des sujets peut-être plus économiques que géopolitiques même si les deux ne sont jamais très éloignés. C’est notamment un sujet sur les conséquences du Brexit sur le football qui m’a permis d’avoir mon premier relai médiatique important, avec un passage dans l’émission de Gilbert Brisbois, l’After Foot RMC. D’autres sujets comme la reprise du Championnat de Biélorussie malgré l’épidémie de Covid-19 ont aussi permis d’avoir d’autres relais et ainsi faire connaître mon travail autour du FC Geopolitics au plus grand nombre. Maintenant que je suis suivi par une grande communauté, je fais aussi en sorte de leur demander si ils ont des idées de sujets en particulier.
« Montrer tous les enjeux extérieurs au football, que ce sport n’est pas qu’une question de 22 gars qui courent derrière un ballon »
Une fois que le sujet est choisi, j’épluche livres, articles, travail de synthèse et j’essaye d’en faire un plan avec mon idée principale derrière. L’idée est vraiment de vulgariser le sujet sans faire de raccourcis, que le sujet soit un article facile à lire et à comprendre en une dizaine de minutes. Le fait que le FC Geopolitics ait une plus grande notoriété m’oblige désormais à véritablement fouiller mes sujets et je n’hésite pas à passer directement par des spécialistes pour que mes sujets soient le plus sourcés possible. Je pense que la crédibilité du FC Geopolitics passe aussi par là, que les sources pour les articles soient citées et partagées. Mes articles restent avant tout des portes d’entrée, des introductions, pour pousser le sujets un peu plus loin pour ceux qui le souhaitent.
« Le fait que le FC Geopolitics ait une plus grande notoriété m’oblige désormais à véritablement fouiller mes sujets et je n’hésite pas à passer directement par des spécialistes pour que mes sujets soient le plus sourcés possible »
Comment vulgariser ces sujets qui sont au premier abord hermétique ?
J’ai toujours été un grand fan des Dessous des Cartes, des Atlas et des atlas géopolitique de Pascal Boniface et Hubert Védrine. Ceux sont ce genre de livres et reportages qui m’ont donné le goût des cartes et de la géopolitique, donc j’essaie de rendre chaque sujet visuel. Pour moi la compréhension d’un sujet mêlant ballon rond, histoire, politique, économie, faits sociaux passe avant tout par la compréhension du monde qui nous entoure. Et quoi de mieux que les cartes, les graphiques pour illustrer une idée. Je suis le premier à ne pas continuer la lecture d’un livre historique ou de géographie si il n’y a pas de carte. Donc je tente de rendre le sujet le plus « graphique » possible, tout en y associant des images ou des photos marquantes de football pour nous faire revivre les grands moments de football.
« Je tente de rendre le sujet le plus « graphique » possible, tout en y associant des images ou des photos marquantes de football pour nous faire revivre les grands moments de football »
Vous avez notamment développé les thread sur Twitter pour développer les sujets traités. Est-ce que cela a contribué à votre notoriété ?
Au début, j’avais vraiment pour projet avec le FC Geopolitics de faire un sujet par semaine, en mode article. C’est en le déclinant en forme de thread que j’ai vu que cela était plus lu et plus partagé. Je me suis donc petit à petit orienté vers ce format-là, étant encore peu utilisé pour parler de géopolitique et de football. C’est notamment en lisant les threads de Jules Grandin (journaliste cartographe Les Echos) que je me suis dit qu’un article pouvait tout à fait être écrit sous ce format là en y associant des cartes. Nous avons tous des dizaine d’articles à lire par jour, donc proposer un nouveau format de lecture avec des illustrations pour parler de géopolitique et de football me semblait cohérent avec ce que moi-même je recherchais. J’essaie avant tout de faire un sujet qui me plaise à moi, pour continuer à avoir le plaisir de créer et expliquer des sujets, et ensuite les remarques des abonnés ne sont que du bonus pour améliorer le traitement des sujets.
Et comment sélectionner l’info pour construire ce genre d’articles sans oublier ou omettre des éléments importants ?
Pour des sujets vastes, je n’hésite pas à limiter le périmètre de mon sujet. Et si il y a des omissions, en général les abonnés n’hésitent pas à me le dire si je fais une erreur ou , étant suivi par quelques spécialistes des sujets que je traite. J’essaye d’avoir le maximum de source possible et de synthétiser au maximum. Si parfois la synthèse n’est pas possible ou trop caricaturale, je renvoie vers des articles plus complets ou des reportages. Comme ce fut le cas pour le sujet que j’avais fait sur le match entre le Dinamo Zagreb et l’Etoile Rouge de Belgrade au Stade Maksimir le 13 mai 1990. Je ne peux pas résumer dans un sujet avec une vingtaine, trentaine de tweets l’ensemble des raisons qui ont entraîné l’éclatement de la Yougoslavie. Je me concentre sur le périmètre de mon sujet et pour le reste j’ouvre vers d’autres sources.
Quel est votre regard notamment sur QSI et le PSG, politiquement ou diplomatique parlant ?
Ce qu’a réussi à faire le Qatar, via QSI, avec le PSG est une belle réussite économique, politique et sportive, encore plus si le PSG remporte sa première Ligue des Champions. Le PSG est une vitrine pour le Qatar, et le club est un participant de premier plan à une stratégie plus globale de l’émirat autour de la diplomatie du sport. Une stratégie basée autour d’importants investissements sportifs et l’organisation de grands évènements comme la Coupe du Monde 2022. Le Qatar cherche avant tout à exister internationalement via le sport, notamment pour préparer son économie à l’après pétrole et aussi à être reconnu internationalement pour éviter que son intégrité soit mise en danger par son voisin et rival, l’Arabie Saoudite. On voit d’ailleurs que l’Etat saoudien cherche à « copier » cette stratégie depuis 2015 et depuis que Mohammed Ben Salman, prince héritier d’Arabie Saoudite, est aux manettes. Pour l’instant les investissements saoudiens dans le sport se limitent à l’organisation de nombreuses compétitions sportives, mais nul doute que leur prochain objectif sera d’avoir un club comme vaisseau amiral de leur diplomatie sportive. Mais pour l’instant c’est un constat d’échec, puisque les rachats des clubs de Premier League Manchester United ou bien Newcastle ont capoté.
« Le Qatar cherche avant tout à exister internationalement via le sport, notamment pour préparer son économie à l’après pétrole et aussi à être reconnu internationalement pour éviter que son intégrité soit mise en danger par son voisin et rival, l’Arabie Saoudite »
Aujourd’hui FCGeopolitics a agrégé une audience intéressante de passionnés. Quels sont vos objectifs pour pérenniser le site et le concept ?
Continuer à proposer un contenu de qualité. Pour moi il vaut mieux faire un bon article en une semaine que trois ou quatre qui ne tiennent pas la route en terme de cohérence intellectuel. Maintenant que le format Thread est connu et apprécié je vais essayer de me dégager du temps pour proposer d’autres types de contenus à savoir les podcats ou les vidéos. Des formats dont je ne maîtrise pas encore tous les codes mais avec toujours le même intérêt pour rendre la géopolitique du ballon rond et du sport plus compréhensible. Je vais également développer d’autres sujets, axés géopolitique du sport. J’avais en tête de faire quelque chose pour les Jeux Olympiques de Tokyo, mais avec son report c’est une occasion ratée. A la rentrée je vais donc proposer quelques sujets autour de la géopolitique du cyclisme avec le début du Tour de France.
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