
Tatiana de Rosnay : « J’espère que les livres ne deviendront jamais que des objets de décoration »
Tatiana de Rosnay, romancière à succès depuis « Elle s’appelait Sarah » et cofondatrice du Prix de la Closerie des lilas, a publié « Les Fleurs de l’ombre » au début du confinement. Elle nous confie comment elle a vécu ce moment de tristesse, mais aussi ce qui l’a aidé à le surmonter. La fille de Joël de Rosnay – il vient de faire paraître un formidable « Petit éloge du surf » chez François Bourin -, s’est inspirée de ses conversations avec son père pour écrire ce roman d’anticipation.
2034. Pollution, attentats, montée des eaux, chaleur, robots : l’auteure décrit un monde apocalyptique, une manière de s’engager pour la protection de la planète et contre les dérives de l’intelligence artificielle. Elle rend pourtant son récit profondément humain grâce à son héroïne qui pourrait être son double, Clarissa Katsef, une amoureuse de Virginia Woolf et de Romain Gary. Lorsque cette femme fragile et un peu parano quitte son mari pour s’installer à CASA, une résidence d’artistes ultra connectée, l’angoisse monte… Un roman sensible et passionnant où l’on retrouve les thèmes chers à l’auteure ferait une formidable série télé.
Votre roman est sorti début mars, au moment du confinement, comment avez-vous vécu cette terrible déception ?
Un grand moment de tristesse. Tout a été annulé, toutes mes dédicaces, une bonne vingtaine, toutes mes rencontres. Un coup dur pour une auteure qui aime tant aller à la rencontre de ses lecteurs. J’ai été très découragée dans un premier temps, puis je me suis dit que vu ce qui se passait autour de nous, je n’avais pas le droit de me plaindre. Des amis ont perdu leurs parents du Covid-19. La peur rôdait autour de nous. J’étais hébétée, sidérée. Je me suis forcée à faire le deuil de ce livre. Mon livre, ce n’est rien, ou pas grand-chose, face à cette pandémie.
Peu à peu, vous avez retrouvé de l’énergie, en partie grâce à cette correspondance via Instagram avec Frédérique Deghelt ? Que vous a-t-elle apporté ?
Ce qui m’a d’abord aidée, c’était de me remettre à écrire. Je n’avais pas du tout prévu de le faire aussi tôt, mais c’était bien la seule issue pour moi. Les auteurs connaissent bien le confinement, mais moins ceux qui nous sont imposés. Puis avec Frédérique, nous avons commencé à détourner des vidéos incroyables sur Instagram, en racontant une histoire avec une suite, comme une sorte de cadavre exquis qui ferait ping-pong …