En Italie, les Gilets Oranges bravent les interdits du confinement et créent la polémique
Décryptage – Le Samedi 30 mai dans 29 villes italiennes le mouvement des Gilets Oranges a manifesté. Il s’agit d’un mouvement difficile à cerner qui n’est pas une réplique des Gilets Jaunes français. Son fondateur est un ancien général des Carabinieri. Il est à l’origine de plusieurs mouvements de contestations comme celui « des fourches » actif entre 2012 et 2013 en Italie.
Des milliers d’italiens sont descendus dans la rue samedi 30 mai 2020, pour participer aux manifestations des Gilet Arancioni, en français : Gilets Oranges. Parmi les rassemblements qui ont eu lieu dans vingt-neuf villes transalpines, celui de Milan a été le plus important grâce, notamment, à la présence du général Antonio Pappalardo.
Cet ancien officiel du corps des Carabinieri (plus ou moins l’équivalent de la Gendarmerie française, ndlr) a fondé le parti des Gilets Oranges en 2019, afin de participer aux élections régionales en Ombrie ainsi qu’aux élections européennes. Au cours de ces deux scrutins, le général n’a pas eu le succès espéré. En Ombrie, le parti du général Pappalardo a obtenu 524 voix (0,1% du total des voix). Et le parti n’a pas été autorisé à participer au scrutin européen du fait qu’il n’est pas parvenu à recueillir un nombre de signatures nécessaires pour se présenter.
Avant de quitter l’uniforme, le général Pappalardo avait été président du COCER, une sorte de syndicat des militaires italiens. Ensuite, entre 1992 et 1994, il a siégé au parlement italien, en tant que député élu dans le PSDI, l’ancien Parti Social-Démocrate Italien. Pendant une très courte période il a été même secrétaire d’Etat. Puis, il a plusieurs fois tenté de se présenter, sans succès. Au fil du temps il a fondé plusieurs partis éphémères jusqu’en 2019 avec la création des Gilet Arancioni.
Dans le parti, plusieurs instances protestataires ont fusionné. De façon générale le mouvement souhaite renforcer la démocratie directe en Italie. Selon le général Pappalardo, le parlement actuel est « illégitime » car il a été élu avec une loi électorale retoquée par la Cour Constitutionnelle de Rome.
Au-delà de la contestation de la légitimité du parlement italien, le fondateur des Gilets Oranges s’attaque aux mesures de confinement imposées pour lutter contre la diffusion du Covid-19. En répondant à un journaliste du quotidien Corriere della Sera, Antonio Pappalardo a déclaré : « le Covid-19 n’existe pas. C’est une invention. C’est un bluff organisé. Ils (le gouvernement, ndlr) veulent nous terroriser et nous enfermer chez nous afin d’instaurer un nouvel ordre mondial ». Dans la même interview, le général Pappalardo affirme avoir rencontré l’ex président de la Banque Centrale Européenne, Mario Draghi. Ce dernier lui aurait confirmé que l’Italie pourrait revenir à son ancienne monnaie.
En effet, l’autre ennemi juré des Gilets Orange est l’Euro. Le mouvement se bat pour que l’Italie quitte la monnaie commune européenne et revienne à la Lire avec un rapport d’échange 1 à 1.
Beaucoup de polémiques ont suivi à la manifestation de Milan car de nombreux participants ne portaient pas de masques et ne respectaient pas les mesures de distanciation sociale. Le maire de la ville lombarde, Giuseppe Sala a même annoncé de vouloir porter plainte contre les manifestants.
La presse italienne a souligné les propos incongrus tenus par le Antonio Pappalardo. Même Il Secolo d’Italia – le quotidien du parti d’extrême droite Fratelli D’Italia – a défini le fondateur des Gilets Orange comme « un expert » dans l’art de « chevaucher la rage sociale avec des mouvements qui durent quelques semaines, jusqu’à la naissance du prochaine mécontentement à exploiter ».
Le 2 juin 2020, journée de fête nationale en Italie, dédiée à la naissance de la République, les Gilets Oranges sont descendus à nouveau dans les rues. Les partis de centre-droit (à l’opposition) Ligue, Frères d’Italie et Forza Italia, avaient organisé une manifestation pour protester contre les gouvernement de Giuseppe Conte. Les leaders de ces partis, Matteo Salvini, Giorgia Meloni et Silvio Berlusconi, contestent les choix faites par l’exécutif italien pour relancer l’économie après la pandémie. Aux manifestants du centre-droit se sont ajoutés des Gilets Oranges. Parmi eux il y avait encore le général Pappalardo. Comme rapporté par l’agence de presse italienne AGI, les Gilets Oranges ont attaqué le Président de la République italienne, Sergio Mattarella et le Président du Conseil des Ministres, Giuseppe Conte. Selon l’agence de presse, des Gilets Oranges auraient crié « vous êtes des vendus. Nous protestons contre le système capitaliste libéral, vous êtes des salauds ».
Bien que les médias fassent preuve de condescendance vis-à-vis des Gilets Oranges, si l’on en juge par le nombre de personnes qui participent aux rassemblements, on pourrait penser qu’il contribuera encore pour quelques temps encore à animer la contestation contre le gouvernement et les institutions transalpines. Suite au Covid19, beaucoup d’Italiens se retrouvent dans la précarité absolue ou dans la misère. Tout cela alimente un climat qui rappelle celui qu’il y avait en France avant la pandémie.
(Photo à la Une – Capture d’écran de la page Facebook du général Antonio Pappalardo, fondateur des Gilet Arancioni)