Christian Page (SDF) : «Covid19 ou pas, la rue tue tout le monde»

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Depuis le 17 mars, les Français se retrouvent confinés chez eux pour ralentir la propagation du coronavirus. Qu’en est-il des personnes qui sont dans la rue ? Deux SDF, Ervé et Christian témoignent.

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Par Sofien Murat – « La situation est catastrophique ! Nous sommes oubliés par les pouvoirs publics ». Ervé ne mâche pas ses mots. Depuis plus de vingt ans, cet enfant de la DDASS connaît la rue et ses galères. Depuis son compte Twitter @croisepatte, qui compte plus de 7 000 abonnés, il commente l’actualité et s’en sert comme un moyen efficace de trouver des petits boulots et du réconfort.

Face à la situation qui touche le pays, Ervé se montre fataliste quant aux sorts des sans abris : «Déjà en temps normal, c’est compliqué, mais là, il s’agit d’une crise sanitaire gravissime. Ajoute à ça à une situation urgente, déjà existante et tu imagines bien les dégâts. Je prévois une hécatombe. Le collectif, les Morts de la Rue qui a recensé 569 personnes décédées en 2019, va avoir du pain sur la planche du cercueil

SDF le plus connu de France grâce à son activité sur Twitter (@Pagechris75), Christian Page, tire lui aussi la sonnette d’alarme : « Covid19 ou pas la rue tue tous les jours et tout le monde .» Même s’il a retrouvé un logement par Emmaüs, il continue à venir en aide a ses compagnons d’infortunes. « Les copains ne se demandent pas s’ils risquent de chopper le coronavirus mais quand ils vont le choper, c’est un peu le jeu de la roulette russe pour eux d’autant qu’ils ne bénéficient d’aucun moyen efficace pour se protéger. »

Difficile également de se nourrir quand on ne peut plus effectuer la manche

En effet Christian rappelle que « beaucoup sont obligés de se rabattre sur les associations pour manger alors que celui qui fait la manche a généralement de quoi se payer de la nourriture
Ervé poursuit : « Les maraudes sont en stand-by. Beaucoup de magasins ou de boutiques solidaires sont fermés. À part l’entraide où les mobilisations citoyennes, rien de neuf à l’horizon qui se confine de plus en plus mais pas pour tous

Pas de solution pérenne pour les sans abris.

Face à cette situation inédite, l’État a annoncé une enveloppe de 65 millions d’euros d’urgence pour les sans-abris, 7 800 nouvelles places dans les hôtels ont été ouvertes ces derniers jours, 73 sites spécialisés sont par ailleurs ouverts, dédiés aux SDF malades du Covid-19 mais ne relevant pas d’une hospitalisation, et 60 000 chèques-services vont être distribués en aide.

Un coup de communication pour Christian : « Le compte n’y est pas en fonction du nombre de personnes SDF recensées dans la rue » (NDLR – Près de 200 000 en France selon les associations).

Des « mesurettes » qui font «rire jaune », Ervé. « Les fameuses chambres d’hôtels coûtent un pognon de dingue et ne sont en rien sanitarisées et ne représentent pas de solution pérenne.Quant aux chèques-services, on n’a toujours rien vu. ».

Christian se montre également inquiet sur les risques sanitaires :« Quand les gens vont sortir du confinement, il va y avoir un risque de contamination car les sans-abris n‘auront pas été confinés.» Finalement nos deux compères ne souhaitent qu’une chose : la mise en place d’un plan national pour sortir les sans-abris de la rue. « Bien sûr, il y aura toujours une infirme minorité qui souhaiteront continuer à vivre dehors mais il est plus que jamais nécessaire de pouvoir avoir accès à un logement décent pour tous », conclut Ervé.

En partenariat avec Sofien Murat – L@gence2 presse des quartiers de Villiers-le-Bel 

(Crédit Photos – DR )

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