« Cendres Vives » : le nouveau thriller paranoïaque de Serge Brussolo

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L’auteur confie pour la première fois un texte à l’éditeur montpelliérain H&O étranger au sérail des grandes maisons parisiennes. Une épopée haletante sur fond de complotisme et de folie humaine.

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Dans la tête de Jérémie. Dans « Cendres Vives », ce dernier nous relate une enfance sur les bords de l’Amazone, une halte à l’université de Los Angeles, en passant par une mystérieuse école censée lui mettre du plomb dans la tête ou entre les mains… Un enchaînement d’événements suite à la disparition de son frère, sacrifié au nom de Dieux Aztèques…

En bon thriller, « Cendres Vives » sait savamment manier son suspense. Il tire néanmoins sa force d’un humour noir et débridé nappé d’une bonne dose de faux-semblants inextricables. La vérité restera ailleurs. Les histoires s’imbriquent comme des poupées russes sans qu’on ne sache jamais vraiment le côté pile de la face cachée des personnages.

Le plus intriguant et peut-être aussi le plus réussi, c’est Jérémie lui-même. Racontant son histoire à la première personne, nous sondons l’esprit de ce jeune homme énigmatique sans jamais savoir qui il est vraiment : est-il fou, paranoïaque, dépressif, les trois à la fois ? « De temps à autre, il m’arrive de m’’interroger : ces souvenirs sont-ils les réels ? Sont-ils les miens ? Ne suis-je pas en train de tout mélanger, ma vraie vie et certaines de mes lectures enfantines ? Comment savoir ? »

Sur les cendres de sa vie, Jérémie essaie de raviver sa flamme intérieure sans pour autant perdre son cynisme et ses désillusions. Si son parcours reste flou, la lucidité le rattrape parfois quand il met un pied dans le « vrai » monde. Le système universitaire par exemple, il s’en sert plus qu’il ne le cautionne : « La jalousie et les insinuations perfides sont les deux mamelles de la vie universitaire, autant s’y habituer. » En son for intérieur, il sait que quelque chose ne tourne pas rond, dans le monde, dans sa vie, dans sa tête. Il va puiser sa (relative) force de ses tourments : « J’étais comme anesthésié au niveau des sentiments. Je suppose que les sociopathes fonctionnent ainsi. D’une certaine manière, ce détachement n’est pas désagréable, c’est une protection efficace contre les aléas de la vie. »

Cette frémissante histoire est solidement ancrée dans la réalité de ce 21ème siècle bipolaire, son complotisme et ses fake news. Le frère de Jérémie affirmant lui-même des vérités en extrapolant sur des théories brumeuses : «Des créatures d’un autre monde ont pris contact avec les Aztèques, les Mayas, les Toltèques… C’est une réalité historique (…) Ils sont venus, et leur technologie a permis à des sauvages cul nu incapables d’inventer la roue, de bâtir des monuments titanesques qui ont défié le temps… » Jérémie doute de tout et en particulier de lui-même. Mais qui le blâmerait avec un pédigrée tout aussi fragmenté ? Dans une société schizophrène, doit-on s’étonner que la normalité n’ait aucune définition et que les combats soient au final tous légitimes ? Tout est question de pouvoir et ceux qui savent le manier font leur beurre sur ce qui reste des autres. On est happé du début à la fin. Le livre se conjugue au présent pas si dystopique. « Le passé est obsolète, on ne veut plus en entendre parler. »

 

 


Serge Brussolo et H&O éditions

L’auteur se dit ravi de publier « loin du climat morose de l’édition française ». Et d’ajouter : « Je rencontre assez souvent les éditeurs, et certains d’entre eux me donnent, hélas !, l’impression d’avoir laissé s’éteindre le feu sacré qui leur avait fait choisir cette profession. Ce qui aurait tendance à me démotiver. Les gens de chez H&O, eux, m’ont fait l’effet d’un remède de cheval. Leur vitalité m’a rassuré et redonné espoir. Je me suis surpris à penser : ah ! Les zombies n’ont pas encore gagné. Il y a encore quelqu’un qui s’avance gaillardement au milieu des ruines et des cendres. Pourquoi ne pas lui emboîter le pas ? »


Cendres Vives
de Serge Brussolo
H&O éditions
320 pages – 8,90 euros

 


(A la une : la couverture du livre « Cendres Vives » – © H&O Éditions)

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