
Nathalie Garraud et Olivier Saccomano : « Il y a des moments où l’on mesure concrètement comment un théâtre peut apporter ses forces aux batailles du temps »
Les deux directeurs évoquent leur première saison à la tête du Théâtre des 13 Vents, le Centre Dramatique National de Montpellier qui a repris son nom d’origine après l’ère « Humain Trop Humain » de Rodrigo Garcia. Interview.
C’est votre première saison à la tête du CDN de Montpellier. Quel est votre état d’esprit ? Pourquoi avoir accepté cette mission ?
Notre état d’esprit s’est forgé au cours des dix années précédentes, celui d’une expérience de troupe, où de nombreuses décisions – concernant d’abord la création, mais aussi la production et le travail sur le territoire – ont été réfléchies et organisées collectivement. Durant toutes ces années, nous n’avions pas de lieu de résidence fixe, nous avons donc connu les joies et les difficultés du nomadisme, différentes conditions d’accueil, et nous nous sommes peu à peu forgés une idée de ce que pourrait ou devrait être un lieu de théâtre. Tout part donc d’une expérience d’artistes, et cela nous semble fondamental que des outils de théâtre soient encore pensés, pratiqués, dirigés, et transformés par des travailleurs de l’art. Alors cette « mission », nous l’avons accepté à partir de cette idée de ce que pourrait être un théâtre. Puis il nous a aussi semblé que le moment était historiquement favorable pour se ressaisir de ces outils. Dans une période incertaine où nombre de politiques publiques semblent hésiter sur leurs missions, c’était l’opportunité de développer une hypothèse, de la partager avec d’autres, de faire en quelque sorte une expérience dans l’institution, qui a une durée déterminée – c’est une très bonne chose – et dont les résultats peuvent valoir pour d’autres que nous.
Comment dirige-t-on un CDN à deux ? Avez-vous une répartition particulière des rôles ?
Ce qui est intéressant, dans la direction à deux, c’est qu’elle remet en cause certaines représentations – et certaines pratiques – du pouvoir qu’on attribue à la fonction. Bien sûr, nous sommes garants de la direction (au sens de l’orientation) du lieu, mais cette direction, quand elle ne s’incarne pas en une seule personne, devient plus …