Le mouvement des Gilets Jaunes se propage au Canada

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Des Gilets Jaunes (Yellow Vests en anglais) de l’Ouest Canadien ont appelé à manifester partout dans le pays, les samedi 12 et dimanche 13 janvier. Le mouvement social, qui tente de s’établir au Canada depuis la fin 2018, est victime de propos racistes émanant de groupuscules d’extrême droite. Des menaces de mort ont aussi été proférées à l’encontre de Justin Trudeau, le Premier Ministre du Canada.

Un groupe Facebook en particulier fait beaucoup parler de lui : Yellow Vests Canada comptabilise plus de 105 000 membres depuis sa création le 5 décembre. Depuis quelques jours, des propos virulents et notamment des menaces de mort contre Justin Trudeau, ont été rapportés dans les médias. Ce dernier a tenu à calmer le jeu lors d’une conférence de presse tenue en Colombie-Britannique, jeudi 10 janvier : « Si des gens sont en désaccord avec ce que je fais, ou questionnent l’action du gouvernement, je veux pouvoir les entendre. Je veux pouvoir échanger avec eux et discuter pour voir comment avancer ensemble ».

Dans l’intervalle, la police fédérale a réagi rapidement : « Nous prenons très au sérieux les menaces contre le Premier Ministre », a expliqué Tania Vaughan, porte-parole de la Gendarmerie Royale du Canada (GRC). De son côté, Facebook a supprimé les commentaires haineux publiés sur le groupe, précisant qu’il ne tolérait pas le harcèlement sur la plateforme et qu’il prendrait toutes les mesures nécessaires.

Un compte Twitter appelé Yellow Vests Canada Exposed a été créé dans la foulée pour relayer les commentaires d’appel à la violence publiés sur la page du groupe, tout en tagguant les comptes officiels de la GRC et du Service canadien du renseignement de sécurité. Le but de cette initiative est de lutter contre la montée des extrémismes qui ronge le mouvement social, aussi bien en France qu’au Canada.

Des revendications contre l’establishment

En tête de liste, la taxe carbone imposée par le gouvernement Trudeau. Depuis le début du mois de janvier, le gouvernement canadien impose une taxe de 20 dollars par tonne de dioxyde de carbone émis par les carburants et produits pétroliers. Elle s’élèvera à 50 dollars en 2022. Le Canada est le 4ème producteur de pétrole dans le monde : les sables bitumineux de l’Alberta représentent la plus grande réserve de pétrole brut du pays, selon Ressources naturelles Canada. Le manque d’oléoducs dans la région, qui paralyse l’activité, et la mise en place récente de la taxe ont favorisé le mécontentement des travailleurs.

Pour faire entendre leur voix, un convoi de plus de 300 camions est d’ailleurs prévu le 14 février prochain, depuis Red Deer, en Alberta, jusqu’au Parlement à Ottawa, dans le but de sensibiliser les Canadiens à l’industrie du pétrole et du gaz dans leur pays. Deux campagnes de financement participatif ont été organisées pour financer l’opération, regroupant plus de 123 000 dollars canadiens, à ce jour.

Autres sources de protestation au sein des Gilets Jaunes canadiens : l’immigration (notamment la signature du Pacte de Marrakech), la politique de multiculturalisme ou encore les objectifs fixés par l’Agenda 2030 du développement durable, adopté par les États membres de l’ONU.

Un mouvement social terni par l’extrême droite

L’un des administrateurs du groupe Facebook Yellow Vests Canada, le torontois Tyler Malenfant, serait connu pour sa défense du nationalisme blanc, une information confirmée par Anti-Racist Canada (ARC), un organisme d’intérêt public qui surveille l’extrême droite au Canada. Ce dernier avait déjà dénoncé Mr Malenfant, en 2015, pour ses liens étroits avec Students for Western Civilisation, un groupe de suprématistes blancs qui faisait sa promotion sur les campus étudiants ontariens.

Contacté par le rédaction, Mark Friesen, à l’origine du groupe United Yellow Vest Canada (4 000 membres) qui se positionne comme le regroupement national des Gilets Jaunes au Canada, déplore les commentaires haineux, issus du groupe voisin : « Nous dénonçons toute forme de racisme, toute forme de violence. Nous protestons pacifiquement ». Interrogé sur Tyler Malenfant, Mark Friesan précise que son mouvement n’est, en aucun cas, affilié au personnage : « Les personnes associées à notre groupe ne sont pas des radicaux. Ce sont juste des canadiens ordinaires qui en ont marre des politiques dictées par l’ONU ».

Selon l’intéressé, le mouvement des Gilets Jaunes, dont il est l’un des représentants nationaux, est un collectif pacifique, sans leader identifié, regroupant des canadiens de tout horizon. Il déplore fermement la récupération de leurs revendications par des minorités de radicaux.

« Les personnes associées à notre groupe ne sont pas des radicaux. Ce sont juste des canadiens ordinaires qui en ont marre des politiques dictées par l’ONU »

 – Mark Friesen, coordinateur au niveau national des Gilets Jaunes

Interrogé sur les origines de la protestation, Nelson Wiseman, professeur de sciences politiques à l’Université de Toronto, est plus mitigé. Selon lui, il ne s’agit pas d’un réel mouvement : « Toronto est l’une des plus grandes villes d’Amérique du Nord et seulement une soixantaine de manifestants, dont certains avec des gilets jaunes, ont participé à une protestation ».

Ce dernier invite à ne pas faire d’amalgame entre les Gilets Jaunes français et canadiens : « Au-delà des manifestants albertains préoccupés par l’industrie pétrolière […], les seuls autres éléments identifiables dans ces manifestations ne concernent que quelques individus conservateurs […]. Une poignée de radicaux ont enfilé des gilets jaunes, pour atteindre le grand public et les médias, dans le seul but de faire valoir leurs opinions racistes ».

[…] Une poignée de radicaux ont enfilé des gilets jaunes, pour atteindre le grand public et les médias, dans le seul but de faire valoir leurs opinions racistes »

 – Nelson Wiseman, professeur de sciences politiques, Université de Toronto

 Conspirationnisme en marge du mouvement

Dès le début des protestations, des théories conspirationnistes sont apparues parmi les revendications. Jeff Yates, journaliste québécois, spécialisé en désinformation, en parlait déjà dans un article datant du 18 décembre dernier sur Radio-Canada. Il évoquait la présence de partisans QAnon, un mouvement conspirationniste américain, dans les manifestations canadiennes du mois de décembre, notamment à Edmonton, en Alberta.

Les prochaines élections fédérales au Canada sont prévues pour octobre 2019 et, pour certains, la campagne semble avoir déjà commencé…

 

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