Claire Marin : « Ce qui me paraît vraiment alarmant, c’est que 40% des élèves issus de milieux défavorisés soient en difficulté scolaire »
Claire Marin est enseignante de philosophie dans un lycée de banlieue au sein d’une classe préparatoire de proximité. Elle connaît bien cet environnement, les élèves ainsi que le milieu scolaire au sein de ces quartiers. Elle vient de faire paraître un ouvrage « La Relève » qui donne à voir l’enseignement sous le prisme de cette enseignante philosophe qui ne manque ni de passion ni d’affection pour « ces jeunes de banlieues », expression qu’elle récuse en bloc. Une interview qui, a plus d’un titre, portera le débat sur l’éducation dans ces territoires.
Claire Marin, une première question : pourquoi avoir intitulé votre livre la Relève ? A quoi fait référence ce titre?
Pour évoquer l’idée d’un relais. Dans le métier de professeur, il y a l’ambition de transmettre, d’être passeur de savoir mais aussi de faire découvrir à chacun ses propres ressources, celles qui lui permettront d’être le plus autonome possible dans la direction de sa vie et de ses pensées. Mais il y a aussi en arrière-plan, la conviction que l’école peut aider des élèves à se relever, les porter ou les soutenir quand leur environnement familial est bancal. Je reste persuadée, malgré toutes les difficultés que l’école connaît en ce moment, qu’il y a des enfants qu’elle sauve.
« Je reste persuadée, malgré toutes les difficultés que l’école connaît en ce moment,qu’il y a des enfants qu’elle sauve »
Pourquoi avoir voulu apporter ce regard sur la jeunesse des banlieues ? Pourquoi ce choix de portraits ? N’appréhendiez-vous pas qu’on vous puisse vous reprocher de parler de destins individuels et délaisser ainsi une vision d’ensemble ?
Je crois qu’au contraire, on aurait eu raison de me reprocher d’en proposer une vision d’ensemble que précisément je n’ai pas. J’enseigne en banlieue parisienne depuis plus d’une dizaine d’années mais je n’y habite pas, Je n’y vis pas au quotidien. Je n’ai enseigné que dans deux lycées différents, j’ai beaucoup moins d’expérience de la banlieue que beaucoup de professeurs TZR (titulaires sur zone de remplacement) qui sont parachutés de lycée en lycée au fil des années ou des mois. Mais j’ai essayé de saisir des éléments qui sans doute se dupliquent d’une ville de banlieue à une autre.
Mon projet initial n’était d’ailleurs pas d’écrire sur la banlieue mais sur ce moment charnière de l’existence – les années de lycée et d’études – où l’on voit émerger et se …