Festival de Cannes : Everybody Knows, un thriller familial en ouverture

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En compétition officielle, le nouveau film du réalisateur iranien Asghar Farhadi (Une Séparation, Le Passé, Le Client) parle avec subtilité de conflits intérieurs et de dette sociale.

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Un clocher, le cadran brisé de l’horloge qui laisse s’envoler les colombes, un tic-tac aussi lourd que son mécanisme… Dans les pierres apparentes sont gravées des initiales, éternelles marques d’un amour adolescent. Un premier plan magnifique, qui teinte de mystère l’histoire qui va suivre. Le Temps est probablement le fil conducteur du film : il se fige dans les heures d’un drame, s’arrête sur un secret ; il file lors de retrouvailles festives ou quand le regard se pose sur des enfants que l’on a pas vu grandir. Le Temps est douloureux et il obsède. Dans Everybody Knows (Todos Lo Saben), il est toujours lancinant.

Laura (Penélope Cruz) revient dans son village d’enfance pour assister au mariage de l’une de ses sœurs. Elle y retrouve toute sa famille y compris son ancien amant, Paco (Javier Bardem). Ashar Farhadi filme à merveille la réunion familiale, les aller-retour entre espaces privés et espaces publics : on est complètement immergés. Le réalisateur s’attarde sur les regards plutôt que sur les longues tirades. On cerne immédiatement les relations entre les protagonistes, coincés dans un passé qui n’est pas enterré comme semblent le faire croire les sourires de façade. Penélope Cruz convainc en femme à la lisière de la coutume et de l’émancipation quand Javier Bardem offre à son personnage une saisissante profondeur d’homme torturé.

Après la fête, un drame va se jouer avec la disparition de la fille de Laura. Cet événement va précipiter le film dans un thriller familial dont l’objet n’est pas moins la recherche de l’adolescente que tous les secrets que cet acte va révéler. « L’enquête » n’est donc pas ce qui fait battre le film, certains rebondissements apparaissant trop forcés. Bien plus réussis sont les personnages, leurs interactions et leurs actions qui illustrent une société tiraillée entre tradition et modernité ou d’une humanité toujours complexe. Les seconds rôles crèvent l’écran, Alejandro (Ricardo Darín) et Béa (Bárbara Lennie), respectivement mari et femme de Laura et Paco, sont les pions d’une ligne temporelle dans laquelle ils se retrouvent coincés, entre conflits intérieurs et dette sociale.

Everybody Knows tient en haleine par la grande diversité de ses personnages, leur complexité et leur imprévisibilité. Ashar Farhadi sait parfaitement abolir les frontières : celle entre emprisonnement et liberté, entre liens du sang et liens du cœur, à cheval entre un Temps à la fois abstrait et concret.

Everybody Knows
Réalisé par Ashar Farhadi
Avec : Penélope Cruz, Javier Bardem, Ricardo Darín, Eduard Fernández, Bárbara Lennie
Sortie nationale : le 9 mai 2018

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