Rentrée littéraire : des jongleurs de mots pour oublier sa morosité

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Par Marc Emile Baronheid – Ironiques, délicieux, cinglants, rosses, équilibristes, humoureux transis, les jongleurs de mots rivalisent d’audace, d’originalité, pour apparaître comme antidotes à la morosité d’une récente rentrée littéraire oubliable.

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Même Diogène, apôtre redouté du cynisme, ne dédaignait le plaisir gratuit du bon mot. On en trouve quelques exemples dans un volume d’inédits, « petit livre fait pour tenir dans la poche d’un vagabond », mais qui évoque le fond de tiroir (1).
François Fillon n’a pas son pareil pour remettre à leur place les caricatures consternantes de l’humour belge et susciter une floraison de calicots « je ne suis pas Charline ». En revanche, une incursion dans le monde de Bruno Coppens est vivement conseillée. Virtuose de la rosserie, lanceur d’alertes cinglantes, observateur de la foire aux vanités, il est l’auteur d’ exercices de salubrité éthique (sur la réforme de l’orthographe, la maladie du colon, BHL et son visagiste belge, …) et fourbisseur de sentences (cougar : dérèglement de la mature ; Lévy (Marc) : cancer de la prose tarte). (2)
Briller dans les dîners en ville, mais pas à n’importe quel prix. Daniel Lacotte flatte les apprentis cuistres en distinguant la zénana d’ une chanson de Ferré, ferre les gourmands par le lexique de la séduction tarifée et dévoile sans s’outer son amour des homos (-nymes, -phones, -graphes). Plutôt pour les amoureux de la langue, version quai de Conti, qu’à l’intention des inconditionnels de Bérurier (3).
Plus indispensable encore, la collection « Le Goût des mots » a récemment rappelé les nuances vitales de la ponctuation (avec la collaboration éclairée de Sartre en matière de « guilles »), la primauté de l’orthographe (par le truchement de dictées agrémentées de leçons de grammaire parfaitement exactes mais joliment absurdes), un enfilage jubilatoire de perles potachières (néologisme forgé par paresse), une collecte d’aphorismes et autres fantaisies littéraires au titre énigmatique fleurant bon le pangramme (cela signifie qu’il vaut son pesant de lettres de l’alphabet). On y découvre notamment un trait commun à Proust et Bob Marley… (4)
Qui veut détendre l’atmosphère, faire rire, voire lancer autour de la table des sujets de discorde, ira plutôt vers Alain Bouteiller (5), un coffret de citations d’humour (6) ou un abécédaire « joyeusement moderne » du féminisme, grâce auquel Girl Power, Masculinisme, Riot Grrrl n’auront plus de secret pour quiconque est soucieux de vivre avec son temps. Et que dire de la friend zone , notion qui « perpétue le sale mythe selon lequel le sexe serait une rétribution que les femmes devraient aux hommes » (7).

(1) « Diogène le Cynique – fragments inédits », textes présentés et traduits par Adeline Baldacchino, Autrement, 13 euros
(2) « Ludictionnaire », Bruno Coppens, Racine, 2 vol., 14,95 euros/vol.
(3) « Dico des mots pour briller en société », Daniel Lacotte, Hatier. 17,95 euros
(4) voir en Points Seuil, cette collection dynamique, constamment enrichie – « L’art de la ponctuation », « Les dictées loufoques du professeur Rollin », « LOL est aussi un palindrome », « Bâcher la queue du wagon-taxi avec les pyjamas du fakir ». Chaque titre est vendu 5,40 euros, sauf « L’art de la ponctuation » : 6,80 euros
(5) « Les 500 histoires drôles qui font vraiment rire », Alain Bouteiller, le cherche midi. 12,50 euros
(6) « La boîte à citations d’humour », coffret de 4 volumes : Animaux, Famille, Métiers, Sports, le cherche midi. 14,95 euros
(7) « Les gros mots – abécédaire joyeusement moderne du féminisme », Clarence Edgard-Rosa, Hugo. 14,95 euros

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