Franz Bartelt : cinquante nuances de Guy

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Par Marc Emile Baronheid – Un maître-queux sybarite propose cette salve époustouflante de nouvelles mitonnées dans la volupté, servies avec un accompagnement carnassier.

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Avez-vous déjà approché une femme pratiquant les dissipations compensatoires ? Celle-ci se prénomme Musette. Guy, son mari, pique du nez dès qu’il rentre d’une de ces journées harassantes qui sont le lot des commis-voyageurs consciencieux. Comme Musette n’a pas la vocation de femme au foyer, même à la mode de Landru, elle s’offre une vie en accordéon et orchestre le bal des prétendants. Puis on apprend que le brave représentant de commerce est un culbuteur de première, attendu comme le facteur étalon dans chaque vestibule rural. Un camelot de la littérature friponne y verrait matière à cinquante nuances de Guy. Bartelt trousse l’histoire en une poignée de pages allègres, édifiantes, plaisamment ciselées, d’une tendreté acquise au bain-marie subreptice de la narquoiserie considérée comme un des beaux-arts.
Les treize nouvelles du recueil sont à l’avenant, solidaires des petites gens mais pas du monde qui tire leurs ficelles, dignes du programme d’une primaire pré-présidentielle : marivaudage pour tous, scandaleux partage des richesses, éloge de la fraternité (« ce con, il ne se doute pas que je vais le bouffer tout cru ! »), doux chants pour les sourds. Avec cette critique métaphysique de la déraison pure, Franz B rappelle que son arbre généalogique compte quelques-unes des branches maîtresses de l’ironie flibustière. On le lit allègrement, sans se mettre Bartelt en tête. Et si quelque pisse-froid reprochait à sa prose de ne pas avoir les vertus laxatives des prévisions de Christine Boutin, gageons qu’il répondrait I would prefer not to. Quelque chose en nous de Barteltby…

« Comment vivre sans lui ? », Franz Bartelt, Gallimard, 18 euros

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