La loterie : Miles Hyman ou l’Amérique profonde

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Par Boris Henry – Miles Hyman adapte une nouvelle de Shirley Jackson, sa grand-mère paternelle. Son dessin qui évoque la peinture d’un Edward Hopper colle à l’apparente banalité de l’histoire et permet de conduire, sans crier gare et donc avec grande efficacité, à la terrible chute.

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Aux États-Unis, dans un petit village de Nouvelle-Angleterre, comme chaque année, a lieu en juin une loterie à laquelle tout habitant se doit de participer. Des préparatifs en amont au déroulement le jour J, des discussions entre villageois au tirage au sort et à ses conséquences… cet événement est suivi de très près.

Pour qui ne connaît pas Shirley Jackson et n’a jamais lu l’une de ses histoires, cette bande dessinée devrait faire l’effet d’une déflagration.
Miles Hyman place peu de cases par page et s’attache très précisément à chaque action, donnant l’impression de lui accorder davantage d’importance qu’elle ne le mérite, de s’arrêter plus qu’il ne le faut sur tout et, ainsi, de figer la dynamique du récit. En fait, sa façon de procéder tient plutôt du leurre : elle n’en est que plus efficace. En mettant l’accent sur des éléments manifestement anodins, Miles Hyman conduit le lecteur à ne voir dans cette histoire qu’une chronique villageoise de l’Amérique profonde comme il y en a tant. Ce parti pris rend la chute d’autant plus inattendue, violente et impressionnante. La beauté un peu figée du dessin représente donc celle des apparences : elle agit comme un cache qui dissimule l’horreur intégrale nichée dans les conventions sociales.
En fin d’ouvrage, un texte éclairant et passionnant de Miles Hyman revient sur sa grand-mère, la nouvelle adaptée et les effets de sa parution dans The New Yorker Magazine.

La loterie
Éditions Casterman
Scénario, dessins et couleurs de Miles Hyman, d’après Shirley Jackson
140 pages en couleurs
23,00 euros

> Le site officiel de Miles Hyman

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