Green Room : Thriller horrifique jubilatoire par Jeremy Saulnier

par
Partagez l'article !

Par Jonathan Rodriguez – Lors de l’été 2014, Jeremy Saulnier se dévoilait à l’hexagone avec Blue Ruin, oeuvre prometteuse et saisissante, lui octroyant des allures d’auteur indépendant confirmé et multitâches – réalisation, scénario, directeur photo – avec une identité singulière. Deux ans plus tard, il revient avec Green Room – petite sensation cannoise – une plongée dans l’univers des punks où un groupe de musique va se retrouver à la merci de Skinheads et autres néo-nazis. Un cocktail détonnant et déroutant.

Partagez l'article !

Un bar perdu dans les montagnes de l’Oregon. Les murs sont noirs, la lumière verte, l’atmosphère malsaine. Le décor est planté, et le cinéaste sait l’utiliser à bon escient. En orchestrant ce petit jeu de massacre jubilatoire et violent, il se réaproprie un genre semble-t-il à bout de souffle, kitsch et qui nécessitait un sacré dépoussiérage.

En plus d’être un auteur singulier, Saulnier sait être esthète. Son image est soignée, sa lumière sombre donne un réel ton à l’oeuvre. Ses ralentis envoûtants ne sont jamais surfaits et apportent un réel caché. De sorte que le film bénéficie d’une véritable ambiance tendue et horrifique, remplissant son cahier des charges tout en offrant un point de vue très personnel. C’est d’ailleurs l’un des meilleurs du genre de ces dernières années. Car l’américain évite tous les écueils et les facilités inhérentes aux thrillers horrifiques. On reste constamment surpris par la tournure d’un film qui se veut déstabilisant et efficace. En s’inscrivant d’abord dans un postulat réaliste – comment réagirait-on dans cette situation ? – le réalisateur américain prend le contre-pied en livrant un jeu pervers, macabre et machiavélique auquel on se laisse prendre volontiers. Un ton à la fois décalé et drôle qui laisse également la place à une violence furieuse. Blue Ruin répondait à cette même dualité humour-violence, avec plus de subtilité peut-être. Même si l’enjeu est tout autre ici, ses deux films démontrent d’une patte et d’une identité des plus enthousiasmantes.

À l’instar d’un Nicholas Winding Refn, la violence est un véritable exutoire, jouissive et jusqu’au-boutiste. Il faut avouer qu’il est plaisant de voir ce genre de cinéaste assumer un tel propos sans tomber dans le voyeurisme malsain. Le seul regret, étranger au film lui-même, est la censure des scènes les plus « trash » dans les copies françaises – afin sûrement de répondre à un impératif d’audience plus large. Ces retraits atténuent, en effet, un propos qui s’avérait séduisant initialement. La vraie bonne nouvelle, c’est qu’un nouveau cinéaste tout droit venu du cinéma indépendant américain est à suivre. Il n’y en a jamais trop.

Green Room
De Jeremy Saulnier
Avec Anton Yelchin, Imogen Poots, Patrick Stewart
Thriller-Horreur – 1h36
Sorti le 27 avril 2016

À lire aussi dans cinéma :

Everybody wants some : Portrait groovy des 80’s par Linklater

Les Habitants : le regard attendri et avisé de Depardon

Mandarines : réflexion douce et saisissante sur la guerre

Démolition: un film qui s’enlise dans la métaphore

Laissez votre commentaire

Il vous reste

2 articles à lire

M'abonner à