Sport : au bout de soi-même avec trois livres
Par Pascal Baronheid – bscnews.fr / Courir est mon plaisir. Courir est un besoin. Courir est une liberté insolente. Mais attention ! Courir peut rendre prisonnier. Ce sont quelques éléments de cette ode à l’effort, d’un voyage historique depuis la bataille de Marathon dans les coulisses d’une des courses parmi les plus fabuleuses. L’auteur, journaliste, a couru près de 20 marathons dans le monde. Il n’a donc pas son pareil pour inciter à la rencontre de ces merveilleux fous gambadant, suant avec le sourire, ahanant avec un rictus inquiétant.
Contrairement à la course de fond du roman, le marathon ne tolère ni le plagiat, ni les méandres sournois dits de l’intertextualité. L’angoisse de la page blanche du coureur, c’est le mur de la défaillance « Le mollet, lourd comme un âne mort, n’en peut plus, n’en veut plus. Ce n’est pas une sensation de crampe. Plutôt un raidissement général. » Une affaire d’hommes, de vrais ? Pensez-vous ! Alors que les jeux panhelléniques leur étaient interdits, sous peine de mort, les femmes y ont fameusement acquis droit de cité. Avec en plus cette grâce, cette légèreté qui nous font envie. Mais en retour, leur souffrance apparente est plus spectaculaire, sinon démesurée. A travers son héros, Thomasson emmène le lecteur sur le parcours mythique du marathon de Paris. Les 42 kilomètres sont autant de stations d’un chemin de croix pour les téméraires, les impréparés, les sans grade, les obscurs, ou les jalons d’un sentier de la gloire pour les collectionneurs de médailles, les héros et divas des podiums. Un roman qui, paradoxe éclatant, se lit au sprint (ah les performances dans un fauteuil…) !
Le sport spectacle étant devenu une course à l’armement financier, les nations symbolisant l’impuissance économique n’ont plus guère voix au chapitre. Et donc, elles cultivent la nostalgie, si leur passé le permet. La Belgique : une terre d’élection en la matière.
Francorchamps, 1954. Un garçonnet de neuf ans attend le moment de remettre des fleurs à Juan Manuel Fangio, vainqueur du Grand prix de Belgique. Le déclic d’un destin d’exception ? Il s’appelle Jacky Ickx et possèdera un des palmarès les plus éclectiques de l’histoire du sport automobile : trente saisons de sports mécaniques, deux fois vice-champion du monde de Formule 1 (et 8 victoires), une cinquantaine de succès dans les épreuves d’endurance et le titre de « pilote du siècle » dans la discipline, en plus du surnom « Monsieur Le Mans », champion Can-Am aux Etats-Unis, vainqueur d’un Paris-Dakar, etc…
Son contemporain capital : Eddy Merckx, alias le Cannibale, le plus beau palmarès cycliste de tous les temps avec 525 victoires, dont son premier Tour de France le 20 juillet 1969, jour où Neil Armstrong posa le pied sur la lune. Jacky et Eddy ont droit l’un et l’autre à un album retraçant leur vie, leur carrière, leurs prodiges. Des photographies spectaculaires, rares ou précieuses, agrémentées de commentaires éclairés balisent leurs exploits et rappellent à quel point ils imposèrent leur emprise au monde entier. Aussi des parcours tout de fair-play, de classe, de talent, de volonté. A l’occasion de leur 70 ans, une exposition montre à Bruxelles ce que sacrifier et dominer impliquent. L’un chatoie désormais sur le Rocher de Monaco ; l’autre a appris à maîtriser le peloton des pétrodollars, pour amplifier le rayonnement international de son sport.
« 42 km 195 », Bernard Thomasson, Flammarion, 18 €
« Jacky Ickx », texte Pierre Van Vliet, Racine, 35 €
« Eddy Merckx 69 », Tonny Strouken et Jan Maes, Racine, 39,95 €
Exposition “70 ans Eddy Merckx – Jacky Ickx”, Trade Mart Brussels (www.merckx-ickx.be)
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