Paloma : l’émergence de nouveaux artistes au sein d’une SMAC
Par Amélie Coispel – bscnews.fr / Paloma est une Scène de Musiques Actuelles (SMAC) à Nîmes. Par conséquent, elle programme de nombreux groupes, sans souci d’élitisme, du petit groupe local à l’artiste de renommée internationale. En tant que SMAC, elle se doit de diffuser les musiques actuelles, mais aussi de les accompagner, notamment avec les nouveaux projets qui fleurissent.
Cette mission, Paloma l’a très à coeur et cherche à devenir un acteur majeur dans l’émergence de la scène nîmoise. Entretien avec Céline Rousseau, responsable de la communication de Paloma qui revient pour nous sur la réussite de cette SMAC situé dans le sud de la France.
Vous êtes très présents pour les musiciens amateurs, qui débutent tout juste. D’abord, vous laissez à disposition un studio de répétition, qui est aussi un studio d’enregistrement. Expliquez-nous, comment il fonctionne ?
Ce n’est pas vraiment une mise à disposition, nous louons des espaces de répétitions effectivement. Nous sommes un établissement public, nous avons vocation à soutenir les musiciens au niveau local. Aujourd’hui, nous avons plus de 200 groupes inscrits dans les studios de répétitions de Paloma. Ceux-ci sont loués plus ou moins 8 euros de l’heure, cela dépend des forfaits (forfait 20h ou 100h). Ce sont donc des prix extrêmement compétitifs car pour ce prix, on propose une sonorisation, une batterie, des amplis guitare, des amplis basses, des micros etc. C’est une activité importante. En parallèle, nous avons aussi un grand studio, « le studio blanc », qui sert pour les résidences. C’est un espace de temps de travail proposé à des groupes locaux ou non, soit issus de notre pépinière, dans laquelle nous avons sélectionné un certain nombre d’artistes qui sont dans un projet de professionnalisation et que l’on aide à émerger à un niveau national, soit des groupes locaux qui veulent perfectionner leur technique ou leur set. Dans ce cas, cela fait l’objet d’une véritable mise en projet, ce n’est pas une vocation accessible à tous les groupes. Cela fait partie d’une demande de projet, de soutien et d’accompagnement bien spécifique par Paloma.
Vous avez dans votre programmation des grands noms : Les Wampas, Moriarty, Asa, Benjamin Clementine, the Dandy Warhols ou encore Hubert-Félix Thiéfaine, mais aussi des formations moins connues, c’est très éclectique à la fois dans la popularité et dans les genres musicaux. Comment établissez-vous votre programmation ?
Effectivement, la programmation est un cocktail assez subtil. Il y a des artistes à très forte notoriété de manière à vraiment ancrer la salle au niveau de sa notoriété sur le territoire. Celle-ci s’accompagne toujours d’une grande exigence artistique. Il s’agit de produire des projets que l’on est susceptibles d’assumer et de défendre artistiquement. Ce sont donc des artistes connus pour lesquels nous estimons qu’ils ne sont pas des produits marketing, et qu’ils défendent des partis pris esthétiques exigeants et forts.
À l’inverse, l’idée d’une scène de musiques actuelles, c’est aussi de faire découvrir des choses au public. Pour cela, nous avons plusieurs types de dispositifs dans la programmation. Cela peut être des premières parties. Dans ce cas, il y en a une, voire deux pour chaque artiste à forte notoriété qui est programmée. C’est l’occasion d’avoir des coups de coeurs ou de découvrir de jeunes talents. Cela peut être aussi par le biais de soirées gratuites mensuelles, les « local heroes », où l’on propose un plateau de trois groupes locaux (au sens du grand sud). Il y a aussi des soirées « de l’émergence ». Il s’agit d’artistes qui peuvent être connus ailleurs sur des scènes anglo-saxonnes, aux Etats-Unis ou ailleurs en Europe. Il ne sont alors qu’émergents que pour le public français. Ce sont plutôt des soirées « découverte » dans le club avec des tarifs modérés. La programmation est un mélange de tout cela, l’idée étant de stimuler la curiosité du public. Nous souhaitons être aussi prescripteur, que les gens se disent « de toute façon, je ne connais pas, mais c’est pas grave, ça se passe à Paloma donc, forcément, ce sera intéressant ». C’est un axe fort. L’idée, c’est que le public puisse nous faire confiance, presque à l’aveugle. Ce fut le cas avec le festival This is not a love song, où nous avons vendu près de 60 pass pour le festival alors même qu’aucun nom n’était annoncé. Le pari est donc gagné. Ce côté défrichage, découverte et curiosité est vraiment l’une des missions des scènes de musiques actuelles. C’est quelque chose que nous avons a à coeur de développer dans notre programmation.
Vous dispensez différents types d’accompagnement pour les groupes locaux, dont les WikiPalomas, des réunions d’information avec des professionnels du secteur des musiques actuelles. Comment sélectionnez-vous les intervenants ?
Les Wikipalomas ne s’adressent pas uniquement aux musiciens locaux. Elles sont ouvertes à un public plus large à l’occasion de conférences sur des thèmes très variés. Les intervenants sont choisi par Clotilde Bernier, qui s’occupe du pôle accompagnement. Les conférences peuvent être en lien avec la programmation. Les WikiPaloma peuvent être aussi présentées sous l’aspect des rencontres grâce à la recommandation sur différents intervenants qui nous paraissent pertinents de convier. Tout est fait dans un esprit de partage avec un aspect concret et pragmatique. Les intervenant sont eux-mêmes des passionnés et l’idée est de maintenir un rapport complètement décomplexé au savoir. C’est-à-dire que nous ne sommes pas dans quelque chose de formel, ni d’universitaire. Ce sont des temps de formations qui sont ludiques, illustrés, dynamiques pour l’apprentissage.
Pourriez-vous expliquer à nos lecteurs ce qu’est un label exactement ?
Avec LaBelle Paloma, nous jouons sur le double nom. « Scène de musiques actuelles » par exemple est une labellisation du ministère de la culture. Elle donne un certain nombre d’objectifs aux salles qui sont labellisées. C’est aussi évidemment le sens de label phonographique, une maison de disque. En l’occurence, « LaBelle Paloma » est le nom de la pépinière artistique, un lieu d’expérimentation. C’est très important pour nous aujourd’hui, car c’est un pôle d’accompagnement envers des artistes sélectionnés suite à des appels à projets. Huit groupes en font partie. Contrairement aux autres dispositifs, nous souhaitons complètement personnaliser ce qui est proposé. Chacun des programmes se fait en fonction du groupe, de son développement, de ce qu’il projette de faire, de son identité. Avant tout, nous souhaitons les faire grandir, les faire émerger, rayonner, et profiter du réseau de Paloma pour les faire connaitre. C’est aussi l’un des enjeux lorsque nous sommes scène de musiques actuelles : faire rayonner la scène locale et travailler à l’émergence des groupes au niveau national, voire international. Par ailleurs, l’ambiguité est liée au fait qu’aujourd’hui, les labels phonographiques ont déserté le champ de l’accompagnement artistique. Ils ne prennent plus de risques. Par conséquent, nous souhaitons, non pas nous substituer à eux, mais inventer une nouvelle manière de soutenir les artistes en l’absence de ces acteurs majeurs, que sont les maisons de disques. LaBelle Paloma permet de réinventer un moyen de soutenir les groupes avec un acteur de la chaîne qui s’était énormément affaibli.
Comment choisissez-vous les artistes que vous labellisez ?
Nous sélectionnons par un appel à projet. Ensuite, il y a des pré-sélections. Les groupes retenus ont joué en live devant un jury, à Paloma. Celui-ci était composé notamment deChristian Bordarier, ancien directeur artistique de Wagram et de Clotilde Bernier, parties prenantes du pôle accompagnement, et Fred Jumel, le directeur de la structure [Paloma, ndlr].
Certains artistes que vous accompagnez progressent bien et connaissent de belles courbes de progression. Set & Match par exemple est programmé notamment au festival Art Rock à Saint Brieuc en mai prochain. Quels ressentis avez-vous face à l’émergence de ces groupes ?
Nous sommes très fiers d’eux et nous croyons en leur talent. Si nous avons investi du temps, de l’argent, de l’énergie, de la passion, c’est parce que nous pensons qu’ils en sont capables. Nous sommes ravis lorsque des intuitions et des ressentis artistiques se retrouvent confirmés par la suite et par d’autres structures. Car ce sont les artistes de la maison finalement. On pense notamment à Perfect Hand Crew sur les Inouïs du Printemps de Bourges.
Vous menez des actions culturelles, afin de promouvoir la culture et d’y favoriser l’accès. Quels retours en avez-vous ?
Ces actions culturelles ont pour but de développer un certain nombre d’actions vers des publics spécifiques tels que les scolaires, les handicapés, les personnes hospitalisées, ou encore les prisonniers. Ils viennent de tout horizons. Cependant, ce sont des projets qui sont éminemment personnalisés en fonction des interlocuteurs et des structures. La musique est un art fédérateur qui procure un plaisir immédiat. Les retours sont excellents, constructifs et enthousiasmants de la part des ateliers d’écriture qui ont été menés en prison ou au sein de centres de personnes handicapées ou encore les projets à long terme avec les écoles. Ces rencontres ont du sens au sein de la communauté et de l’ancrage territorial. Les structures avec lesquelles nous développons ces actions culturelles sont nos voisines. En tant qu’établissement public, nous avons un devoir de réponses citoyennes face à ces problématiques. Par conséquent, nous sommes en interaction très positive et c’est un pôle important de Paloma.
Paloma
Scène de Musiques Actuelles de Nîmes Métropole
250, Chemin de l’aérodrome
30 000 Nîmes
Le programmation complète sur le site officiel de Paloma
www.paloma-nimes.fr
( crédit photo D.R)
A lire aussi :
Dakh Daughters : les bacchantes venues d’Ukraine
Dick Annegarn: guitare sèche, humour et vélo en bandoulière
Fills Monkey : le show époustouflant de deux batteurs déjantés