Pierre Barayre : Jacques, son maître, la gourde, la montre et la tabatière

par
Partagez l'article !

Par Julie Cadilhac – bscnews.fr/  » Un bon conteur est un homme rare ». Une maxime que l’on devrait choisir pour conclure et que l’on met volontairement en exergue à l’ouverture tant cette mise en scène, par son espièglerie, sa simplicité et son efficacité, prouve qu’il suffit d’un auteur de génie et d’un interprète de qualité pour que la magie du verbe éclose sur scène.

Partagez l'article !

Pierre Barayre nous invite à badiner et à philosopher avec Jacques, ce valet  » animal jaseur » qui  » mène son maître », ce serviteur  » hydrophobe » qui consulte toujours sa gourde avant de parler,« pythie portative, silencieuse sitôt qu’elle (est) vide ». Ce Jacques si spirituel dont le maître ne dit  » des choses sensées » que par  » réminiscences ». Jacques enfin qui parle d’amour, ce « sujet sur lequel on écrit depuis 2000 ans et sur lequel on n’est pas plus avancé ». Jacques, le fataliste, qui croit en un  » grand rouleau où tout est écrit » , qu’on  » déploie petit à petit » et qui ne cesse de répéter que les choses arrivent  » parce que c’est écrit là-haut. »
Avec une table et deux chaises, Pascal Papini a imaginé pour le comédien diverses postures pertinentes qu’il habite avec naturel les unes après les autres et qui dynamisent ce dialogue éclairé et libertin. Grâce à la présence d’un musicien-régisseur, Pierre Barayre voit parfois aussi son récit s’unir avec intelligence à des accompagnements musicaux ou des projections-vidéos ; la narration du faux dépucelage par Dame Marguerite est à ce titre aussi séduisante que drôle.
Plus d’hésitation! Il faut venir entendre les vérités sur l’amour selon Jacques qui nous rappelle, goguenard, que l’on «  se console la nuit sans frais des calamités du jour » ou écouter son maître préciser que  » lorsqu’on est arrivé au genou, on a encore peu de chemin à faire »… Voici l’occasion réjouissante de fréquenter le verbe véloce et audacieux d’un Diderot qui plaisante, se gorge d’humour et de philosophie émoustillée… Ce « Jacques le Fataliste » est un rendez-vous incontournable avec  » deux vraies machines, vivantes et pensantes » , illusions théâtrales admirablement incarnées par un acteur investi et d’une grande justesse.

 » -Que devrais-je dire quand je n’aurais plus rien à dire?
– Tu recommenceras. »

Jacques le fataliste
D’après le roman de Denis Diderot
Le théâtre hirsute/ Compagnie Pierre Barayre
Adaptation: Pierre Barayre et Pascal Papini
Mise en jeu: Pascal Papini
Scénographie et lumières: Tangi
Composition musicale et conception vidéo: Christophe Boucher
Avec Pierre Barayre ( interprète) et Christophe Boucher ( musicien – régisseur)

Durée: 1h10

Dates des représentations:

Les 25,26 et 27 mars à 20h au Théâtre Jean Vilar – Montpellier

A voir aussi ( ou pas..)

Le jour du grand jour : une oraison nuptiale d’une intense poésie

L’illustre comédien tapissier : une fantaisie burlesque de Luc Miglietta sur la genèse d’un génie dramatique

Days of nothing : le portrait pertinent d’un artiste en résidence scolaire signé Fabrice Melquiot et Matthieu Roy

Little Boy: une tragicomédie qui utilise le rire pour combattre la folie humaine!

Les Enfants du soleil: une pièce confuse et léthargique

La mélancolie des dragons: aussi désopilant que poétique!

Le Révizor en mode burlesque? Un sans-faute pour la Compagnie Toda Via Teatro

La sortie de l’artiste de la faim : « le pouls du drame en train de mourir »

L’affaire de la rue de Lourcine? Un vaudeville qui trempe « drôlement » dans le quiproquo

Laissez votre commentaire

Il vous reste

0 article à lire

M'abonner à