On vous dit attachés au Luxembourg, est-ce le cas ?
MD : Oui, effectivement. C’est un peu décevant de devoir expliquer où se trouve le Luxembourg, si c’est un « vrai pays » et si on a notre propre langue, surtout en Europe, et parfois très près de la frontière même. En même temps, c’est aussi un signe qu’on est bien intégré en Europe et qu’on s’entend bien avec nos voisins.
Le fait de que le Luxembourg a un taux d’étrangers de 44 % sans que cela ne provoque de troubles particuliers rend ce pays unique au monde. Grandir parmi tant d’étrangers, être confronté à tant de cultures différentes, apprendre au moins trois langues étrangères à l’école secondaire, être obligé de quitter son pays pour poursuivre des études universitaires, représente parmi de nombreux avantages de notre petit pays, une richesse qu’il est difficile de mesurer. Je trouve que les Luxembourgeois en général s’identifient beaucoup avec leurs représentants politiques et les respectent beaucoup, un phénomène qui devient de plus en plus rare en Europe malheureusement.
Personnellement, je suis très fier de Jean Claude Juncker, notre premier ministre et tout ce qu’il a fait pour le Luxembourg, mais surtout pour l’Europe.
Qu’est ce que le Luxembourg a influencé dans votre musique ?
PW : Parce qu’il est un pays très petit, entouré par la France, la Belgique et l’Allemagne et qui, surtout à cause de ses avantages financiers, a attiré des entreprises du monde entier. Le Luxembourg est devenu un lieu culturellement très varié. Michel, Marc et moi, nous avons grandi au Luxembourg et nous parlons notre langue maternelle, le Luxembourgeois. Mais à Luxembourg-Ville par exemple, cette langue ne s’entend plus beaucoup. On parle beaucoup anglais, français ou allemand. À mon avis, notre pays nous a influencés principalement de cette façon et nous a appris une certaine ouverture sur le monde.
Peut-on parler de Jazz luxembourgeois à votre avis ?
PW : Non, je ne pense pas qu’il y a un style de jazz qui se distingue particulièrement comme jazz luxembourgeois. En fait, c’est bien dommage que la musique et les chansons luxembourgeoises traditionnelles ne soient pas plus vivantes. Si elles l’étaient, elles s’imposeraient peut-être plus dans la musique des jazzmen luxembourgeois.
Que vous a apporté votre carrière académique dans la musique que vous jouez aujourd’hui ?
MD : C’est notre carrière académique qui nous a fait quitter le pays et nous a fait rencontrer des musiciens du monde entier. Les Conservatoires et Universités sont des lieux de rencontres exceptionnelles et uniques qui permettent à l’étudiant de se faire une image globale de la scène de jazz et des différents styles, de plusieurs approches et des tendances actuelles. C’est lors de nos études que nous avons rencontré des musiciens venant des quatre coins du monde et qui nous ont influencés tant sur un plan humain que sur le plan musical.
Chacun d’entre vous a évolué pendant un certain temps sur un chemin plus personnel. Qu’est ce qui vous a motivé pour reforme ce trio ?
PW : Depuis qu’on jouait ensemble en trio lors de nos études secondaires au Luxembourg en 1998, on se rencontrait souvent sur scène faisant partie de différents projets et accompagnant d’autres musiciens. Nous avons toujours senti une synergie musicale entre nous. Nous nous connaissons depuis longtemps, nous nous entendons très bien et nous aimons voyager ensemble. Avec le bureau d’export musicLX maintenant en place au Luxembourg depuis 2009, le bon moment était donc venu pour relancer ce trio, un projet à 100% luxembourgeois.
À la différence de certains trios, on a l’impression que vous composez et que vous jouez ensemble. Est-ce le cas ?
PW : Oui, il était clair pour nous trois, que ce trio était un projet collectif c’est à dire sous nos trois noms, sans “leader” et en essayant de ne pas mettre en évidence seulement le pianiste, comme c’est le cas pour beaucoup de trio piano-contrebasse-batterie en jazz où le pianiste est souvent le leader.
Comment s’est déroulée la conception pour la réalisation de cet album ?
MR : Chacun de nous trois a écrit un certain nombre de compositions, puis nous les avons essayées pendant les répétitions pour voir si elles fonctionnaient. Puis nous avons travaillé ensemble sur les arrangements afin de réaliser une collection de compositions individuelles qui respectent une suite musicale claire.
Que vous paraît-il important que cet album traduise dans votre proposition musicale ?
MR : L’idée importante dans cet album est que la musique transmet un son de groupe collectif, portée par une écriture lyrique, essaie de faire découvrir le jazz à un nouveau public.
Quel est l’équilibre musical que vous trouvez entre vous ?
MD : L’équilibre musical est basé sur nos préférences communes en ce qui concerne le son du trio. On est à la recherche de la simplicité et de la complicité musicale, toujours au service de la composition avant tout.
Que symbolise ce premier album en commun ?
MR : Nous sommes très fiers de ce premier album. C’est vraiment un projet collectif, pour lequel nous travaillons ensemble avec beaucoup d’efforts. Le fait nous avons attendu beaucoup d’années avant de l’enregistrer ensemble, fait que cet album est une étape très importante pour nous trois.
Si vous deviez le définir en deux mots, quels seraient-ils ?
MD : C’est une question très difficile.
Jusqu’à présent, les échos sur notre disque sont pour le moment très positifs. Les gens aiment notre musique pour diverses raisons, mais il me semble y avoir une constante; la plupart ressentent du bien-être en nous écoutant. Raison, parmi d’autres, pour laquelle beaucoup de nos auditeurs nous ont avoué faire tourner le disque tant de fois chez eux. Donc voici vos deux mots:
FEELING GOOD.
> Reis-Demuth-Wiltgen
Label Laborie Jazz
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