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Frédéric Diefenthal et Catherine Jacob : Rencontre avec Gaston et la duchesse Dupont-Dufort du Voyageur sans bagage

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Par Julie Cadilhac – bscnews.fr / Crédit-photo: DR / Le Voyageur sans bagage est une des quatre Pièces noires de Jean Anouilh. S’inspirant d’un fait réel, l’histoire d’un soldat amnésique, Octave Monjoin ( connu sous le nom d’Anthelme Mangin), le dramaturge a imaginé le personnage de Gaston/Jacques Renaud. Réclamé par plusieurs familles dont la famille Renaud, alors qu’il est employé comme jardinier dans un asile, une douloureuse quête identitaire s’impose à ce dernier. Est-il le personnage violent et sans scrupule qu’on lui décrit? Peut-il renier son passé et sa famille ?

propos recueillis par

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Alain Fromager et Gwendoline Hamon, entourés d’une distribution de qualité, réunissant 11 comédiens au parcours remarqué, ont choisi de monter cette oeuvre majeure qui donne autant à rire qu’à grincer des dents. Une pièce chorale à découvrir . Rencontre avec Frédéric Diefenthal incarnant l’amnésique Gaston, et Catherine Jacob, dans le rôle de la duchesse Dupont-Dufort,qui ont expliqué leur adhésion à cette aventure théâtrale et la vision qu’ils avaient de leur personnage et de la pièce.

Frédéric Diefenthal interprète Gaston

Quel a été le déclencheur de votre participation à cette aventure théâtrale?
C’est un rôle qui m’avait déjà été confié par Nicole Anouilh il y a à peu près 12 ans. Un projet déjà en gestation depuis longtemps et j’ai voulu attendre le bon moment pour le jouer, pour me sentir capable d’endosser le rôle. Ensuite c’est une première rencontre concrète sur scène avec Anouilh; je l’avais déjà travaillé un peu lorsque je suivais les cours de théâtre mais là c’est enfin une vraie confrontation. C’est une pièce qui, de plus, me correspond et me renvoie à des questionnements personnels sur l’identité, le non-dit. Cet homme qui devient témoin de ce qu’il était 18 ans auparavant et d’une vie dont il ne se souvient pas, j’essaie de me mettre à sa place et de me demander comment je réagirais: d’ailleurs, quand on est en remise en question, c’est exactement ce même processus qui se met en marche. Enfin, il y a l’écriture d’Anouilh qui est géniale : il mêle à la fois la tragédie et la légèreté en insérant des personnages qui sont, finalement, en dehors de la situation, qui ont une vision plus pragmatique et qui sont souvent plus « terriens »comme les domestiques par exemple.

Si vous deviez qualifier le personnage de Gaston en deux adjectifs, lesquels serait-ce?
Factuel et ayant une sensibilité à fleur de peau.

Si on vous avait demandé de jouer un autre rôle dans la pièce, lequel auriez-vous choisi?
J’aurais joué le rôle de la duchesse ; une duchesse travestie parce que grandiloquente et pittoresque, un personnage haut en couleurs qui ne fait pas de quartiers, qui tranche dans le lard direct et qui est très drôle….Et je ne plaisante pas quand j’affirme cela!

Et si deviez côtoyer un autre auteur de théâtre sur les planches ensuite, lequel vous attirerait?
Un auteur contemporain avant tout pour jouer des choses qui évoquent une problématique actuelle. Jouer une comédie sera mon prochain projet. J’aime bien alterner. Quant à des auteurs non contemporains auxquels je m’attaquerais le jour où je me sentirais suffisamment à la hauteur ? il y aurait Shakespeare, Pirandello, Giraudoux, Bernard Shaw…

On peut vous voir aussi dans des longs métrages cinématographiques ou des téléfilms: qu’est-ce qui vous séduit tout particulièrement avec les planches?
Ma vocation, c’est d’être un acteur « tout terrain ». Je travaille pareillement pour le théâtre,la télévision ou encore le cinéma. Après , la scène est quelque chose d’essentiel parce que c’est pour moi un des endroits où l’on explore le mieux son métier d’acteur. L’acteur est seul au théâtre ,face au public, même s’il est aidé par le metteur en scène en amont et par la troupe durant la pièce. Le cinéma est un sport d’équipe pour le coup ; si vous ne vous démerdez pas trop mal, que vous avez une bonne photogénie et un jeu qui va bien, il suffit de rencontrer le beau rôle, le grand réalisateur avec de bons chefs opérateurs et de bons chefs techniciens et là vous êtes sûr de décrocher un césar…ou un oscar! Je ne dénigre pas la chose, je ne dis pas non plus qu’il ne faut pas avoir de talent pour faire du cinéma. Mais s’il y a une chose que j’ai souvent remarqué chez les acteurs, comme c’est le cas avec Jean-Louis Trintignant qui ne tourne quasiment plus au cinéma , ils continuent de côtoyer la scène. Je crois à cette énergie-là, la scène c’est le contact direct avec le public.

Il y a la mise en danger également, qui est stimulante, je suppose…il y a une sorte d’adrénaline…
Oui, il y en a une effectivement et cette dernière n’existe pas au cinéma. Le cinéma, c’est un truc rigolo à faire. Je comparerais cela à des musiciens qui ne feraient que du studio et pas de concert. En concert, c’est qu’il y a l’adrénaline.

Quels ont été les retours des premières rencontres du Voyageur sans bagage avec le public justement?
Très bons. On a crée à Orléans et on a enchaîné dix représentations là-bas. On a eu un très bon accueil; c’était complet. Il y a eu un bouche à oreille qui a fonctionné. On améliore de jour en jour parce qu’on vient vraiment de la commencer cette aventure. Il y a eu de belles rencontres et une belle écoute. En même temps, c’est une belle pièce donc elle ne nous a pas attendus pour faire ses preuves. Il y a une mise en scène très fraîche qui ne tombe jamais dans l’ostentatoire ou dans la démonstration de force; c’est un travail sobre qui n’était pas forcément facile à faire puisque les deux metteurs en scène auraient pu se laisser tenter par des effets plus artificiels et, en outre, ils ont réuni une belle troupe. Ils ont insufflé à la fois une belle énergie au spectacle et leur passion d’acteurs puisqu’ils sont acteurs eux-mêmes.

Catherine Jacob interprète La Duchesse Dupont-Dufort

Comment a démarré pour vous cette aventure du Voyageur sans bagage?
J’ai rencontré Gwendoline Hamon qui m’a proposé le projet. J’ai donc lu la pièce ,compris le sujet et la nature de l’aventure que l’on me proposait. C’est une pièce à plusieurs niveaux, qui a plusieurs fils rouges et il n’y a pas que le personnage que j’interprète qui m’a séduite mais également les interrogations que pose le personnage de Gaston/Jacques.

Si vous deviez donner deux adjectifs pour qualifier cette duchesse, lesquels utiliseriez-vous? Comment l’avez-vous imaginée?
Ce n’est pas moi qui veux l’interpréter; c’est déjà écrit et très précis dans la pièce d’Anouilh. L’interprétation ne peut pas être multiple en réalité. Anouilh est un dramaturge qui écrit une trame extrêmement serrée et le choix des mots, des intentions et les repères cachés dans le texte sont incroyables! Pour revenir à la Duchesse, c’est quelqu’un d’extrêmement motivée et généreuse mais… à côté de la plaque.

Habituée également des plateaux de cinéma, que vous apporte tout particulièrement le théâtre?
C’est un autre métier. Au théâtre, on joue entre nous déjà sur scène mais quand on est un peu plus à l’aise, un peu plus rodé, on joue également avec le public et c’est cela le grand enjeu du théâtre. Même si le public écoute et ne réagit pas forcément dès le début, l’intérêt, c’est cette prise de risque et cette grande terreur qui s’appelle le trac, cette chose extrêmement angoissante mais stimulante. Sur un plateau de cinéma, on est vingt, trente ou quarante alors qu’au théâtre, c’est un saut dans le vide et l’intérêt est là.

Aviez-vous eu l’occasion de voir d’autres versions de cette pièce?
Non pas du tout. Je sais que cela a été fait pour la télévision récemment mais c’était autre chose forcément.

Cette pièce a-t-elle suscité chez vous certains questionnements sur l’identité, le choix, le poids du passé?
Evidemment cette pièce a résonné en moi et c’est nécessaire pour que cela résonne aussi chez le spectateur. Cela fait écho comme une réverbération. Forcément, tout le monde se pose la question de savoir ce que l’on ferait dans ce cas-là; aurait-on envie d’accepter son passé, de reprendre les choses à la base, referait-on le même parcours? Aurait-on envie de reprendre les choses avec la vraie conscience d’un choix possible puisque c’est ce qui arrive à Gaston qui a le choix de dire oui ou non?

Vous avez dit que c’était une pièce à trois niveaux: pourriez-vous nous préciser cette définition?
C’est une pièce à trois niveaux en effet. Il y a le personnage principal que joue Frédéric Diefenthal, amnésique,qui est dans une recherche qu’on lui impose. Le personnage de la Duchesse lui propose ainsi de rencontrer des gens en lien avec son passé. Et toute la pièce est construite sur la question des retrouvailles avec une famille qui est probablement sa vraie famille. Les personnages de la mère, du frère, de la belle-soeur sont plutôt émotionnels et psychologiques aussi Anouilh, ensuite, souhaitait insérer une « respiration » donc il a ajouté trois personnages: la Duchesse, la soubrette et le maître d’hôtel qui sont complètement décalés, qui sont là aussi pour être un clin d’oeil de convention théâtral (donc il y a un sur-jeu obligatoire). Dans le cas de la soubrette et du maître d’hôtel, ils sont dans le registre de la fantaisie puisque ils incarnent le recul, l’oeil extérieur par rapport à l’intrigue tandis que la duchesse fonce dans le tas; c’est une dynamo, la duchesse. Elle fait du caritatif à usage interne. Elle donne le petit ressort comique.

La Duchesse est donc une sorte de respiration dans la pièce?
C’est un de ses niveaux d’interprétation. En effet, au début, la pièce commence par l’explication de la situation et c’est la duchesse qui prend en charge cela mais en même temps, elle-même est au 15ème degré. C’est cela qui pousse la difficulté dans ce personnage puisqu’il faut à la fois qu’ellle pose les bases de ce que va être la pièce et en même temps qu’elle amène une petite astuce, une petite dérision.

LE VOYAGEUR SANS BAGAGE -Tournée 2012 – 2013

Mardi 19 mars -Théâtre le Forum – FREJUS
Vendredi 22 mars – Théâtre de Propriano -PROPRIANO

Samedi 23 mars- Centre cultural communal – PORTO VECCHIO

Mardi 26 mars – Théâtre Charles Dullin – LE GRAND QUEVILLY

Les 27 et 28 mars – Théâtre André Malraux – RUEIL-MALMAISON

Mardi 9 avril – Théâtre Jacques Coeur -LATTES (34)

Jeudi 11 avril – Théâtre de l’Olivier – 13800 ISTRES

Vendredi 12 avril – Théâtres en Dracénie – DRAGUIGNAN

Lundi 22 Avril 2013 – La Salle, 41 B1340 – OTTIGNIES- BELGIQUE

Mardi 23 avril – Théâtre municipal -BOULOGNE SUR MER

Jeudi 25 Avril 2013 -THEATRE ODEON – MARSEILLE

Samedi 27 avril – Palais de l’Europe -MENTON

Samedi 25 mai – Théâtre municipal- GRENOBLE

Lundi 27 Mai 2013 -THEATRE DE LA VILLE DE BERNE -CH3000 – BERNE- SUISSE

Mardi 28 Mai 2013 -THEATRE DE VEVEY – CH1800 VEVEY -SUISSE

Jeudi 30 mai- Théâtre des Hauts de Seine – PUTEAUX

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