Anne Renton :  » La famille parfaite est une tranche de vie en désordre »

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Par Candice Nicolas – bscnews.fr / Eileen Cleary (Kathleen Turner) est la mère de famille parfaite et une catholique des plus ferventes. Tellement parfaite que Monsignor Murphy (Richard Chamberlain), prêtre de sa paroisse, la considère comme candidate au titre de femme catholique de l’année – titre qui lui confèrerait le droit à l’absolution suprême. Un petit détail cela dit, avant la délibération du jury, il faut que l’Eglise rencontre la famille des deux nominées pour s’assurer que le train de vie de toute la communauté est bien conforme au dogme catholique. Eileen doit donc présenter sa famille parfaite, mais il semblerait que viennent obscurcir le tableau quelques taches d’ombres…

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Par où commencer ? Son mariage avec Franck (Michael McGrady), ancien alcoolique coureur, est sur la corde raide. Sa fille ainée Shannon (Emily Deschanel), n’est, malgré son âge avancé toujours pas mariée, bien qu’elle s’apprête en fait à passer la bague au doigt… de sa copine avec laquelle elle attend un enfant. Son fils, Frank Jr. (Jason Ritter) a épousé sa cavalière de Prom qu’il a accidentellement mise enceinte le soir de la fête, et fait face aujourd’hui à un terrible mariage. Il se console dans les bras de la tendre manucure, mais maman n’approuve pas. On assiste ici à la représentation tendre et humble d’une famille aux allures dysfonctionnelles, mais somme toute si commune. On évite les clichés et le happy end à la Hollywood, le film est franc et les personnages sincèrement attachants. Même cette mère fanatique, finit par nous émouvoir sans nous faire sombrer dans le mélo. Kathleen Turner offre une performance mémorable dans le rôle de la matriarche en conflit permanent entre ce que lui dicte sa conscience imperturbable et les battements de son cœur qui semble ne plus suivre. Elle est entourée d’un brillant casting, dont Richard Chamberlain, Michael McGrady et Emily Deschanel. La réalisatrice Anne Renton maintient un rythme tendu mais honnête et sain entre ses personnages déboussolés mais dénués de méchanceté. Son conte moderne de la famille nous montre combien, entre gravité et légèreté, la famille n’est jamais vraiment parfaite, mais c’est toujours la famille.

Pouvez-vous nous parler de cette notion de « famille parfaite » ?
Anne Renton : La famille parfaite ? Quand on me demande le titre de mon film, ces mots évoquent inévitablement un ricanement, mais j’aime mon titre. À vrai dire, nous connaissons tous des imperfections, des luttes et triomphes qui définissent notre pas si-parfaite famille parfaite. L’histoire que j’ai choisie de raconter, est celle d’une tranche de vie en désordre, une comédie dramatique, sur des gens ordinaires qui luttent pour se retrouver. Nous plongeons dans leur vie, nous pouvons rire et pleurer avec eux, et compatir à leur souffrance, à leur déchirement. Chacun d’entre nous peut se retrouver dans l’un de mes personnages.

Qu’espérez-vous avoir accompli avec votre premier long-métrage ?
J’ai voulu faire un film avec des émotions fortes, des personnages solides et une histoire intéressante. Kathleen Turner incarne notre protagoniste, Eileen Cleary, avec une grande profondeur et elle porte une attention particulière aux détails. C’était un rêve de travailler avec elle. Nous étions aussi chanceux avec le reste de l’équipe, incroyablement talentueuse, qui est venue à bord du projet. Le voyage cinématographique peut être un projet très personnel pour le réalisateur et les acteurs. Je tiens à exprimer ma reconnaissante à tous les acteurs, l’équipe et à ceux qui m’ont aidé à mener ce projet. Mes producteurs m’ont beaucoup soutenue et ont joué un rôle primordial dans la création de ce film qui n’aurait pas pu voir le jour sans eux. Dans un sens, tout le monde impliqué ici est devenu « une petite famille », prouvant une fois de plus qu’il y a bien plusieurs définitions de la famille.

Quelle a été votre manière d’approcher Kathleen Turner pour le rôle ?
Kathleen était intéressée par mon projet, mais à condition que certains passages soient réécris. Elle voulait que nous insistions plus sur le déchirement intérieur de la protagoniste, et que soit mise en évidence la difficulté de savoir ce qui est bien et de savoir comment bien le faire.

Et qu’attendez-vous maintenant de ce projet ?
Mon espoir est que La famille parfaite encourage à jeter un nouveau regard sur nos propres imperfections et nos préjugés, et de reconnaître les différences entre nous comme un phénomène à embrasser plutôt qu’à rejeter. C’est souvent plus facile à dire qu’à faire, surtout quand une personne préfère exprimer ses vérités qui ne correspondent pas forcément à l’unité familiale, ou aux opinions et croyances d’une communauté plus large. On s’est tous retrouvé là à un moment ou à un autre. Moi la première. C’est effrayant, mais encourageant aussi. Comme un célèbre philosophe l’a dit, « pour mettre le monde en ordre, nous devons d’abord mettre de l’ordre dans la nation, pour mettre la nation en ordre, on doit mettre de l’ordre dans sa famille, pour mettre sa famille en ordre, il faut cultiver notre vie personnelle, et pour cultiver notre vie personnelle, nous devons d’abord mettre de l’ordre dans notre cœur ».

Une des répliques du film est assez provocatrice : « Je suis catholique, je n’ai pas besoin de réfléchir ». Qu’entendez-vous déclencher ici ?
Je n’espère pas ici faire un laïus sur la foi. Mon film ne dit pas quelque chose mais raconte quelque chose, et au public de l’interpréter, il n’y a pas de bon ou de mauvais message. Même si ici je me concentre sur la foi catholique du personnage de Kathleen, il s’agit plutôt de discuter de la perte de la pensée individuelle au sein d’un groupe peu enclin au compromis. Ce film aborde les bienfaits de la remise en question, en tous genres, de la croyance, oui, mais aussi de la morale et surtout des règles préétablies.

À votre avis, qu’est-ce qui fait que votre « famille parfaite » se soit si bien développée ?
Nous avion un budget modeste, et peu de temps pour les répétitions. Il a fallu que les membres du casting apprennent à travailler ensemble rapidement, et certains avaient déjà collaboré sur d’autres projets, ce qui a rendu notre tournage plus facile. Je pense que du fait que la famille – ses tensions, ses joies, ses peines – est quelque chose que tout le monde connaît, les acteurs n’ont eu aucun souci à se mettre dans la peau de leur personnage. On veut sauver sa famille, son idée de la famille.

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