« Is Growing Faith » de White Fence : un joli bordel sonore et jubilatoire
Par Eddie Williamson – bscnews.fr / L’homme derrière cet album ne vit pas dans le même univers que vous et moi. Quand il entend les Black Eyed Peas à la radio, je l’imagine avoir la réaction d’un Syd Barrett qui aurait fait un petit voyage en Delorean de 1964 à 2011 et qui se prend cette musique futuriste et diarrhéique dans les oreilles (un petit peu de méchanceté gratuite entretient la santé). White Fence est le projet solo de Tim Presley, membre également des excellents Strange Boys, et Is Growing Faith est son second album que je pourrais résumer comme étant un joli bordel sonore psyché-déjanté et jubilatoire.
À première vue (et même à la seconde, finalement), cet album ressemble à un cassette démo qu’aurait enregistrée les Kinks dans leur garage en 1964. Je pense que Tim Presley a enregistré son truc sur un vinyle et l’a ré-enregistré sur cassette à partir de ce vinyle, avec un de ces lecteurs CD/radio avec lequel j’enregistrais l’émission de Zegut sur RTL2, avant de l’écouter sur mon walkman Sony à 50 francs. C’est volontairement lo-fi, voire cracra-fi par moment, donc si vous avez horreur d’écouter la radio dans votre voiture parce que ça grésille, oubliez cet album ou vous allez perdre des cheveux. Je pense avoir développé un goût pour le lo-fi à force d’écouter des enregistrements pourris des années 40, 50 et 60 et des bootlegs de concerts, mais j’ai peur que beaucoup d’entre vous trouvent énervants ces artistes qui font exprès d’avoir une qualité de son un peu merdique. Faites-vous une cure de bootlegs de Led Zeppelin, Is Growing Faith sera une véritable délivrance pour vos tympans.
Voilà pour le côté lo-fi, z’êtes prévenus.
Une fois que je vous aurais convaincu d’appuyer sur « play » (ce que j’arrive toujours à faire, avouez), vous êtes partis pour un voyage dans des contrées folk-rock qui n’ont plus été revisitées ainsi depuis le milieu des années 60. Les chansons ne pourraient être construites plus bizarrement, j’pense pas qu’elles soient construite en fait, Tim Presley juxtapose des tas d’idées dans un seul morceau, morceau que s’il durait 20 minutes vous ferait probablement oublier où vous habitez et vous donnerait l’impression d’être tombé dans le terrier du lapin blanc. Un peu comme cette dernière phrase, ça part dans tous les sens et on a du mal à savoir où il va. Mais on le suit quand même, et on se gave goulûment de ses flâneries folk-rock typiques de celles des Kinks, Byrds et toute la scène psychédélique britannique des années 60. Le jeu de guitare, la façon de chanter, tout fait penser à cette époque.
J’aime particulièrement le jeu de guitare électrique de Tim Presley. Quand il sort des riffs carillonnant à la The Byrds, ça me rend jouasse. Et quand il troque l’électrique pour l’acoustique, il semble plus confortable que jamais. Facile de l’imaginer assis sur un tabouret et chanter tranquillement « Tumble, Lies & Honesty », « Stranger Things Have Happened (To You) » (avec son petit côté country délicieux) ou « When There Is No Crowd ». Ma préférence va naturellement aux morceaux plus chaotiques qui me font penser que Tim Presley ne devrait surtout pas ralentir sa consommation de substances (« Enthusiasm », « Harness ») parce que nom d’une pipe à crack, qu’est-ce que c’est bon. Et puis il y a cette merveille de « Sticky Fruitman Has Faith », où je m’attends à tout moment à voire Grace Slick, la chanteuse de Jefferson Airplane, rejoindre Presley au chant.
Le côté faussement amateur de l’album le rend encore plus savoureux. Ces morceaux ne sonneraient pas mieux enregistrés en haute déf, c’est juste impossible. Il leur faut ce côté dilettante, brocileur et abrasif pour faire démarrer la Delorean et vous ramener en 1964. Is Growing Faith plaira à tous ceux qui aiment les groupes dont j’ai cité le nom dans cet article (mis à part Led Zep) et à tous les drogués de rock psychédélique ; quant aux autres, je ne saurais trop vous recommander de tenter le coup, vous risqueriez d’aimer.
Sortie le 18 janvier 2011 (Woodsist Records)
LA VERIDICTION ; SUR PHILIPPE LACOUE-LABARTHE
BAILLY JEAN-CHRISTOPHE
Ce livre est avant tout un hommage à un homme et à sa pensée. Né en 1940, agrégé de philosophie, Philippe Lacoue-Labarthe a été influencé et a écrit sur Martin Heidegger, Jacques Derrida, Jacques Lacan, le romantisme allemand, Paul Celan, Mallarmé et la déconstruction. Il a également traduit en français nombre d’oeu…