Les arcanes du Désir dans notre société

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Le désir ! Le désir ! Le désir ! L’Amour, la sensualité, l’érotisme apparaissent inévitables lorsque le mot désir est lâché. Parallèle immédiat et instantané pour un terme qui brille pourtant par sa polyvalence et sa profondeur. Mais il suffit pourtant de s’apesantir quelques secondes sur la définition étymologique du mot «désir» pour s’apercevoir que la tâche se révèle ardue mais ô combien excitante car le Désir ne se niche pas uniquement au creux d’un corsage généreusement garni ou sur les courbes dentelées d’une guêpière. Le Désir s’immisce plus profondément dans l’identité même de l’humain.
Désir : Envie d’obtenir quelque chose pour en avoir du plaisir ( aspiration, envie) *
Pouvons-nous raisonnablement réduire le Désir à la dimension érotique et à la sphère charnelle ?
Taquinons l’audace et explorons le Désir sous le prisme social et nommons cette approche : le Désir du socialement valable.
Le Désir du socialement valable

Dans ce grand cirque qu’est la société française contemporaine, flanquée de ses codes, de ses moeurs et de ses aspirations, le Désir règne en maître. Il est en quelque sorte le Monsieur Loyal de la représentation permanente à laquelle se livrent les membres de cette communauté nationale, terme très à la mode en ces temps de recherche d’identité.
Les individus structurés familialement aspirent, pour la plupart, à atteindre une ataraxie sociale qui se matérialisent, à mon sens, sous 2 aspects majeurs: la stabilité et la réussite.
Ce Désir n’a rien en soi de véritablement répréhensible lorsqu’il fixe le point de convergence entre la volonté de réussir et le plaisir d’être et de devenir. Mais, dès lors qu’il a pour seul objectif l’ostentatoire présentation d’une vitrine sociale à l’égard d’autrui, la noblesse de cette volonté décline. Car, en cas d’échec ou de désillusion, cette perspective pourrait engendrer une myriade de frustrations, de jalousie et une amertume à exister.

Le Désir de Stabilité

Abordons la Stabilité en tant que volonté et sens inné de la construction familiale.
Il est d’usage de nos jours de lancer les fondations d’une vie familiale aux alentours d’une petite trentaine (1). Ce qui pose la question de définir si ce «désir de stabilité» repose sur l’opportunité d’une rencontre avec l’Élu(e) ou au contraire en vertu d’un respect du temps imparti. Autrement dit, notre engagement amoureux répond il à une histoire amoureuse solide et déterminée, ou à l’engagement avec l’Autre lors de la période propice à une union. Ainsi le désir de stabilité est-il porté par la raison et la norme sociale ou alors est-il l’heureuse conclusion d’un cheminement personnel et riche ?
Aujourd’hui, selon l’INSEE, sur 100 mariages, 41 divorces sont prononcés. Ces chiffres accréditent la thèse que « le désir de stabilité» se nourrit effrontément de ce dont nous abreuve la norme sociale. Cette même norme est généreusement relayée par l’entourage social comme la famille, les amis ou les relations diverses car l’on considère qu’à partir d’un certain âge, il apparaît comme «anormal» de ne pas être marié. Et la presse grand public traite très régulièrement de ces sujets.
Force est de constater que « ce désir de stabilité» trouve ses racines dans un assentiment social qui ne cesse de guider nos aspirations les plus intimes. En ce sens, est-ce que cette forme de désir n’est pas quelque part despotique ? Et cette proportion alarmante de divorce ne renforce t-elle pas cette idée ?

Le Désir de Réussite

Le certificat d’étude puis le baccalauréat ont chacun à leur tour cristallisé le cap majeur de la réussite sociale pour la famille française moyenne.
Mais, au-delà, de cette réussite sociale, c’est un enrichissement conséquent de la vitrine familiale redorée par le diplôme. Ainsi, (et je me hasarde à reprendre un terme politique très à la mode en ce moment) c’est un signal fort envoyé à l’entourage proche et social comme la marque d’une éducation vertueuse et efficace.
Nombreuses étaient les familles, lors de l’après-guerre, qui caressaient l’idée de voir leur chérubin intégrer la fonction publique. Pour les plus audacieux, c’était le désir cher de compter un instituteur dans le cercle. Pour les plus ambitieux, un médecin ou un pharmacien apparaissait comme un objectif noble et un tantinet nabab.
Et il n’est pas frauduleux d’avancer que ce «désir de réussite» assurait la stabilité de l’enfant mais dégageait aussi une odeur âcre de vanité pour les géniteurs.
Ce Désir de Réussite n’a rien de contestable lorsqu’il fixe le point de convergence entre la volonté de réussir et le plaisir d’être et de devenir.
Dès lors que ce désir de réussite dépasse la satisfaction de son affirmation et de son développement personnel pour se confronter à la concurrence professionnelle et matérielle envers autrui, il en devient répugnant et immature. C’est oublier que le désir de réussite est propre à chacun selon ses aspirations, ses moyens et ses propres objectifs. Concevoir le développement et la réussite d’autrui à travers son propre filtre ne re présente rien de tangible. C’est tout simplement nier la diversité de l’humain.

Le manque d’intérêt ne m’apparaît pas comme un tort mais comme une nonchalance intellectuelle. Mais rien n’est moins pire que le déni. Condamner avec suffisance et mépris le désir de réussite d’autrui, simplement parce que les critères de ce désir ne correspondent en aucun point aux siens manque fortement des aptitudes à l’étroitesse d’esprit.
Chacun de nous, certes, peut juger des moyens employés, de la volonté, de l’implication mais en aucun cas, ne rabaisser le fondement même du désir de réussite d’autrui. Une nouvelle fois, renier cela, c’est renier l’humain et ses capacités.

Ainsi, le désir de réussite incarne à lui seul la volonté, l’implication, la noblesse et la rage d’exister lorsqu’il est pensé et apprivoisé en bonne intelligence.

Nicolas Vidal

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